En bref
Certificats d’économies d’énergie (CEE) : arrêté du 7 avril 2025 modifiant l’arrêté du 4 septembre 2014
Modification de l’arrêté tarifaire S21 : refonte majeure actée et à venir des conditions d’achat pour les installations sur toiture et ombrière inférieure ou égale à 500 kWc
Code minier : publication de l’arrêté du 3 avril 2025 soumettant les décisions d’octroi, d’extension ou de prolongation des concessions et permis exclusifs de recherches (PER) à évaluation environnementale
Déforestation importée : consultation publique sur un projet de règlement modifiant le règlement 2023/1115 (RDUE)
Hydrocarbures : l’interdiction de leur exploitation en 2040 n’est pas contraire au droit de propriété (Conseil d’Etat)
Par une décision en date du 18 décembre 2019, n°421004, le Conseil d’Etat a jugé que la loi du 30 décembre 2017 mettant fin à la recherche et à l’exploitation des hydrocarbures n’est pas contraire au droit de propriété tel que protégé par la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme, dès lors qu’elle poursuit l’objectif d’intérêt général de limitation du réchauffement climatique.
La haute juridiction a été saisie par une société, qui, à la suite d’une demande de titre minier pour l’exploitation de mines d’hydrocarbures conventionnels en France métropolitaine, a vu l’administration lui accorder le titre, mais seulement jusqu’au 1er janvier 2040.
Pour rappel, la loi n° 2017-1839 du 30 décembre 2017 mettant fin à la recherche ainsi qu’à l’exploitation des hydrocarbures (loi dite « Hulot ») prévoit que la durée des concessions minières délivrées à compter de sa date de publication ne peut dépasser l’échéance du 1er janvier 2040. Alors qu’en principe, une concession minière peut présenter une durée de 50 années.
La société a contesté cette décision en demandant au Conseil d’Etat d’écarter l’application de cette loi, car elle l’estime contraire à l’article 1er du protocole additionnel à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme.
Cet article garantit les biens des personnes : « Toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens. Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d’utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international ». Il prévoit toutefois que que « Les dispositions précédentes ne portent pas atteinte au droit que possèdent les Etats de mettre en vigueur les lois qu’ils jugent nécessaires pour réglementer l’usage des biens conformément à l’intérêt général (…) ».
Le Conseil d’Etat était donc saisi de la question de savoir si l’interdiction de l’exploitation d’hydrocarbure à partir du 1er janvier 2040 est ou non contraire au droit de propriété des sociétés d’exploitation minière.
Les explorateurs de ressources minières disposent d’une espérance légitime à exploiter le gisement qu’ils ont découvert
Le Conseil d’Etat a jugé que le titulaire d’un titre minier d’exploration, qui bénéficie d’une exclusivité pour exploiter un gisement qu’il découvre, dispose d’une espérance légitime à obtenir une concession pour son exploitation.
Et il a relevé que l’interdiction d’exploiter une ressource d’hydrocarbures après le 1er janvier 2040 porte atteinte à cette espérance légitime, laquelle est protégée par l’article 1er du protocole additionnelle de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme.
Absence de méconnaissance de la Convention européenne des droits de l’homme dès lors que la loi poursuit l’objectif d’intérêt général de limitation du réchauffement climatique
Le droit de propriété consacré par la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme n’est cependant pas absolu. Il peut y être déroger pour cause d’utilité publique ou lorsque l’Etat poursuit un objectif d’intérêt général.
En l’occurrence, si le Conseil d’Etat retient que la loi du 30 décembre 2017 peut porter atteinte à l’espérance légitime d’un exploitant, il considère toutefois que la loi poursuit un but d’intérêt général.
Le Conseil d’Etat relève en effet, comme il l’avait fait dans une décision du 27 juin 2018 n° 419316, que la loi relative à l’interdiction de la recherche et de l’exploitation d’hydrocarbure poursuit « l’objectif d’intérêt général de limitation du réchauffement climatique et [contribue] à respecter les engagements internationaux souscrits par le France au titre de l’Accord de Paris sur le climat ».
Il énonce de manière complémentaire que l’objectif de lutte contre le changement climatique « suppose de limiter l’exploitation des réserves d’hydrocarbures fossiles, quel que soit leur usage ».
Le Conseil d’Etat a également rejeté l’argument de la requérante selon lequel la production d’hydrocarbures sur le territoire français aurait un impact environnemental plus limité que leur importation et leur consommation en France.
De telle sorte, l’interdiction d’exploiter des hydrocarbures en France à partir du 1er janvier 2040 ne méconnaît pas le droit de propriété tel qu’il résulte de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme.
Cette décision permet donc de rappeler qu’une loi peut poursuivre l’objectif de lutte contre le changement climatique et ainsi aménager des principes du droit international ou du droit national (comme cela a été également reconnu pour la liberté d’entreprendre comprise dans le bloc de constitutionnalité : CE, 27 juin 2018, n° 419316).
Florian Ferjoux
Avocat- Gossement Avocats
Vous avez apprécié cet article ? Partagez le sur les réseaux sociaux :
Découvrez le cabinet Gossement Avocats
Gossement Avocats est une référence dans ses domaines d’excellence :
droit de l’environnement, droit de l’énergie, droit de l’urbanisme, tant en droit public qu’en droit privé.
À lire également
2 mai 2025 : conférence d’Arnaud Gossement à l’université de Lille sur « L’effet non-suspensif des recours en contentieux administratif, à l’aune de l’affaire de l’autoroute A69 »
Le vendredi 2 mai 2025 à 14h, Me Arnaud Gossement donnera, à l'université de Lille, une conférence intitulée : "Retour sur l'affaire de l'autoroute A69, l'effet non-suspensif de recours en contentieux administratif". Cette conférence sera animée par M. Pierre-Yves...
« Ne boudons pas les bonnes nouvelles » : nouvelle chronique d’Arnaud Gossement pour le journal La Croix
Arnaud Gossement est l’un des quatre experts membres du comité écologie du journal La Croix. Un comité mis en place pour accompagner la rédaction dans sa volonté de mieux traiter l’actualité des enjeux environnementaux. Dans ce cadre, Arnaud Gossement a publié ici une...
Transition énergétique : le Premier ministre confirme un changement de forme et de fond pour la prochaine feuille de route énergétique, qui sera adoptée par une loi
Ce lundi 28 avril 2025, à l'Assemblée nationale, le Premier ministre a procédé à une "déclaration sur la souveraineté énergétique de la France" qui a été suivie d'un débat sans vote, comme le prévoit l'article 50-1 de la Constitution. Un débat du même type sera...
Déchets – économie circulaire : une proposition de loi pour rendre visible l’éco-contribution sur les produits relevant du principe de la responsabilité élargie du producteur (REP)
Voici une mesure qui peut sembler technique mais qui est en réalité essentielle pour la protection de l'environnement et, plus précisément, pour la prévention et la gestion des déchets. Ce 17 avril 2025, M. Stéphane Delautrette et plusieurs autres députés du groupe...
Pollution de l’eau potable par les nitrates : la Commission européenne saisit la Cour de justice de l’Union européenne d’un recours contre la France (Affaire C-154/25)
Par un recours daté du 21 février 2025 et rendu public ce 22 avril 2025 (affaire C-154/25), la Commission européenne a demandé à la Cour de justice de l'Union européenne de constater que la France ne respecte toujours pas la directive (UE) 2020/2184 du Parlement...
Loup : article de Me Florian Ferjoux dans le « Journal du droit européen » sur la jurisprudence récente de la Cour de justice de l’Union européenne
Me Florian Ferjoux a procédé à une analyse des enjeux juridiques liés à la préservation du loup au regard de la directive Habitats dans son nouvel article intitulé : « Le loup : la protection des espèces dans la directive Habitats », publié au sein du Journal du droit...
Découvrez le cabinet Gossement Avocats
Notre Cabinet
Notre valeur ajoutée :
outre une parfaite connaissance du droit, nous contribuons à son élaboration et anticipons en permanence ses évolutions.
Nos Compétences
Gossement Avocats est une référence dans ses domaines d'excellence :
droit de l'environnement, droit de l'énergie, droit de l'urbanisme, tant en droit public qu'en droit privé.
Contact
Le cabinet dispose de bureaux à Paris, Rennes et intervient partout en France.