En bref
Solaire : publication du décret du 3 décembre 2024 précisant les caractéristiques des panneaux solaires photovoltaïques permettant le report de l‘obligation de solarisation de certains parkings
Hydroélectricité : modifications des modalités d’expérimentation du dispositif du médiateur
Schéma d’aménagement et de gestion des eaux (SAGE) : Modification des dispositions relatives à l’élaboration, la modification et la révision des SAGE
Déchets : Assouplissement des conditions pour la reprise des déchets de construction par les distributeurs
Quotas d’émissions de gaz à effet de serre : transmission au repreneur de la « dette carbone » d’une entreprise en liquidation judiciaire (tribunal administratif d’Orléans, 14 mars 2024, n°2101497)
Par un jugement rendu ce 14 mars 2024, le tribunal administratif d’Orléans a jugé que le nouvel exploitant d’une installation classée est tenu de reprendre les obligations de l’ancien exploitant relatives à la déclaration des émissions de gaz à effet et à la restitution de quotas. Le nouvel exploitant ne peut ainsi faire échec à la transmission dans son patrimoine de ces obligations en se prévalant de son offre de reprise telle que validée par le tribunal de commerce lors de la cession des actifs de l’ancien exploitant. Pour le tribunal administratif d’Orléans, « les dispositions spécifiques du code de commerce ne sauraient faire obstacle à l’application des dispositions du code de l’environnement, issues de la transposition de la directive 2003-87-CE du Parlement européen et du Conseil du 13 octobre 2003« . Commentaire.
Ce jugement retient l’attention pour deux motifs principaux.
En premier lieu, le tribunal administratif d’Orléans a jugé que le transfert du bénéfice de l’autorisation environnementale attachée à l’ICPE entraine le transfert des obligations résultant de l’autorisation pour les émissions de gaz à effet de serre.
En second lieu, son jugement précise aussi que le nouvel exploitant ne saurait opposer au transfert de ces obligations les termes de son offre de reprise.
« III.- En cas de changement d’exploitant, les obligations de déclaration des émissions et des niveaux d’activité et de restitution prévues aux articles L. 229-7 et L. 229-16 incombent, pour la totalité des années précédentes, au nouvel exploitant dès l’intervention du changement d’exploitant.«
Procédant à l’application au cas d’espèce de ces dispositions, le tribunal administratif d’Orléans a souligné que le transfert du bénéfice d’une autorisation environnementale – valant autorisation pour les émissions de gaz à effet de serre – a aussi pour conséquence de transférer dans le patrimoine du nouvel exploitant les obligations de l’ancien exploitant en matière de restitution d’émissions de quotas de gaz à effet de serre (pour la totalité des années précédentes) :
« 9. Il résulte de ces dispositions que, d’une part, l’autorisation environnementale délivrée à une installation classée pour la protection de l’environnement tient lieu d’autorisation pour les émissions de gaz à effet de serre et, d’autre part, le transfert d’une autorisation environnementale à un nouveau bénéficiaire comme le changement d’exploitant d’une installation bénéficiant d’une autorisation d’émission de gaz à effet de serre doivent être déclarées au préfet. Enfin, il résulte de ces dispositions, et plus particulièrement du III de l’article R. 229-17, qu’en cas de changement d’exploitant, les obligations de déclaration des émissions et des niveaux d’activité et de restitution incombent, pour la totalité des années précédentes, au nouvel exploitant dès l’intervention du changement d’exploitant. »
On soulignera que le transfert des obligations de déclaration des émissions et des niveaux d’activité et de restitution de quotas vaut « pour la totalité des années précédentes ».
En second lieu, le tribunal administratif d’Orléans a refusé que le nouvel exploitant se prévale des termes de son offre de reprise telle que validée par le tribunal de commerce lors de la cession d’actifs pour faire échec à l’application des dispositions de l’article R.229-17 du code de l’environnement.
En effet, pour le tribunal administratif d’Orléans, « les dispositions spécifiques du code de commerce ne sauraient faire obstacle à l’application des dispositions du code de l’environnement, issues de la transposition de la directive 2003-87-CE du Parlement européen et du Conseil du 13 octobre 2003. » :
« 12. Par suite, alors que les dispositions spécifiques du code de commerce ne sauraient faire obstacle à l’application des dispositions du code de l’environnement, issues de la transposition de la directive 2003-87-CE du Parlement européen et du Conseil du 13 octobre 2003, la société requérante ne peut utilement soutenir ni, d’une part, que les dispositions de l’article R. 229-17 du code de l’environnement ne permettent pas de déroger aux règles d’ordre public régissant les cessions d’entreprises découlant de l’article L. 661-6 du code de commerce et de la jurisprudence de la Cour de cassation en application desquelles le repreneur de l’activité ne peut se voir imposer des charges qu’il n’a pas expressément souscrites dans son offre ni, d’autre part, qu’en vertu de l’article L. 641-13 du code de commerce les créances environnementales sont de celles qui s’imposent à l’organe de la procédure et qu’ainsi la dette découlant du fait que la société X a dépassé la limite d’émissions autorisées sur l’année 2020 s’impose aux mandataires judiciaires. Pour les mêmes motifs, le moyen tiré de la méconnaissance de l’autorité de la chose jugée dont est revêtu le jugement du tribunal de commerce d’Orléans du 28 janvier 2021 arrêtant le plan de cession totale de la société X doit, en tout état de cause, être écarté. » (nous soulignons).
Ce raisonnement est particulièrement intéressant. Dés l’instant où les dispositions du code de l’environnement en cause – relatives au transfert de l’autorisation pour les émissions de gaz à effet de serre – procèdent de la transposition d’une directive européenne, le juge administratif en déduit que le code de commerce ne sauraient faire obstacle à leur application.
Nul doute que ce jugement sera abondamment commenté et retiendra l’attendra de toutes les personnes concernées par la reprise d’entreprises.
Arnaud Gossement
avocat et professeur associé à l’université Paris I Panthéon-Sorbonne
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