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Projet de loi « société de confiance » : le Gouvernement veut expérimenter le « rescrit juridictionnel »
Le projet de loi « pour un Etat au service d’une société de confiance », anciennement intitulé « droit à l’erreur » devrait être prochainement présenté en conseil des ministres puis déposé au Parlement. Il comporte, notamment, un article 39 destiné à expérimenter le dispositif du « rescrit juridictionnel ». Une nouvelle procédure qui donne le droit à l’auteur ou au bénéficiaire ou à l’auteur d’une décision administrative de saisir une cour administrative d’appel pour que celle-ci se prononce sur la régularité de la procédure suivie.
Le dispositif du « rescrit juridictionnel » est débattu depuis plusieurs années. Il l’a notamment été dans le cadre des travaux préalables à la réforme du code minier. Il est susceptible de plusieurs variantes et c’est l’une d’entre elle que le Gouvernement propose, prudemment, d’expérimenter, pendant deux ans, dans le ressort des cours administratives d’appel de Nancy et de Versailles.
En résumé, la procédure du rescrit juridictionnel permet à l’auteur ou au bénéficiaire d’une décision administrative (permis de construire, autorisation d’exploiter etc…) de saisir une cour administrative d’appel, de manière à ce que celle-ci se prononce tout de suite sur la régularité de la procédure suivie.
La procédure du rescrit juridictionnel ne peut avoir pour effet de prévenir tout recours contre une décision administrative.
Au mieux, elle doit permettre à son auteur ou à son bénéficiaire de savoir rapidement si cette décision est entachée d’illégalité en raison de l’irrégularité de la procédure préalable et, partant, de mieux évaluer le risque d’annulation en cas de recours.
L’article 39 du projet de loi est, pour l’heure, ainsi rédigé :
« I.- A titre expérimental, le bénéficiaire ou l’auteur d’une décision peut, dans un délai de deux mois à compter de la publication de la décision, saisir la cour administrative d’appel d’une demande tendant à juger de la régularité de la procédure d’octroi de cette décision.
La saisine de la cour suspend l’examen des recours dirigés contre cette décision dans lesquels sont soulevés des moyens relatifs à la régularité de la procédure suivie, à l’exclusion du recours prévu par l’article L 521-1 du code de justice administrative.
Toute personne ayant un intérêt à agir peut intervenir à la procédure.
La cour se prononce dans un délai de six mois à compter de sa saisine. Elle examine tous les moyens relatifs à la régularité de la procédure qui lui sont soumis ou sur lesquels elle estime devoir se prononcer d’office.
Si la régularité de la procédure est définitivement constatée, aucun vice de procédure ne pourra plus être invoqué ni par voie d’action ni par voie d’exception à l’encontre de la décision.
II.- Cette expérimentation est menée dans le ressort des cours administratives d’appel de Nancy et de Versailles pour une durée de deux ans à compter de la publication de la présente loi.
III.- Un décret en Conseil d’Etat fixe les décisions auxquelles le I s’applique et les modalités d’application du présent article, notamment les conditions dans lesquelles les tiers sont informés de l’existence de cette procédure.«
Il convient de souligner que la demande de rescrit juridictionnel doit être présentée rapidement, dans un délai de deux mois à compter de la publication de la décision susceptible de faire l’objet d’un recours. Elle peut être présentée en l’absence de tout recours en annulation. Si un recours au fond a été introduit, son instruction est suspendue, le temps pour la cour administrative d’appel de se prononcer sur la demande de rescrit juridictionnel.
Cette procédure du « rescrit juridictionnel » n’est pas sans intérêt mais, ainsi conçue, il est à craindre qu’elle produise des effets assez limités.
1. La cour administrative d’appel saisie d’une demande de rescrit juridictionnel peut relever l’absence mais aussi l’existence de vices de procédure. Le demandeur d’un rescrit juridictionnel devra donc s’assurer au préalable que sa demande ne risque pas d’accélérer l’annulation de la décision qu’il souhaitait pourtant protéger.
Dans certains cas, l’avocat qui conseille une demande de rescrit juridictionnel à son client pourra craindre que cette procédure n’aboutisse en réalité à faire juger plus rapidement encore que l’autorisation administrative défendue est illégale. En d’autres termes, le résultat obtenu serait tout à fait contraire à l’effet recherché. Dans l »hypothèse du pire, le bénéficiaire d’une autorisation administrative serait seul responsable de la mise en évidence de l’illégalité de la décision qu’il souhaitait pourtant faire « valider » par la cour administrative d’appel.
2. La demande de rescrit juridictionnel de la cour administrative d’appel est censée accélérer le délai global d’instruction d’un recours dirigé contre une décision administrative.
Toutefois, cette procédure ouvre à son tour un nouveau délai qui sera, au minimun, de six mois. Il s’agit d’un minimun car bien des raisons pourront amener ce délai – qui apparaît n’être qu’indicatif – à s’allonger. En outre, le contenu et la portée de la décision portant rescrit juridictionnel feront immanquablement débat entre les parties si un tribunal administratif est saisi d’un recours.
4. La présente disposition demeure assez imprécise sur la possibilité de contester la décision par laquelle la cour administrative d’appel se prononce sur une demande de rescrit juridictionnel.
L’article 39 précise : Si la régularité de la procédure est définitivement constatée, aucun vice de procédure ne pourra plus être invoqué ni par voie d’action ni par voie d’exception à l’encontre de la décision. » Cette disposition n’indique pas si le Conseil d’Etat peut ou non être saisi, soit directement contre la décision comportant un rescrit juridictionnel, soit en tant que juge de cassation après exercice de la voie d’appel.
5. Autre imprécision : quelle est la portée d’un décision portant rescrit juridictionnel en l’absence de tout recours en annulation contre la décision administrative ?
Que se passe-il si la cour saisie d’une demande de rescrit juridictionnel constate que la décision déférée à son contrôle est illégale mais qu’aucun recours en annulation n’a été formé ? Il pourrait paraître étrange de laisser subsister une décision pourtant jugée illégale par une juridiction administrative.
6. La demande de rescrit juridictionnel ne permettra peut être pas de « traiter » tous les motifs d’illégalité éventuelle d’une décision administrative mais seulement certains motifs d’illégalité externe.
L’article 39 précise ici : La cour […] examine tous les moyens relatifs à la régularité de la procédure qui lui sont soumis ou sur lesquels elle estime devoir se prononcer d’office.
Seuls les moyens (arguments) soumis à la cour ou examinés d’office et relatifs à la « régularité de la procédure » pourront faire l’objet d’une demande de rescrit juridictionnel. Il n’est donc pas certain que tous les motifs relatifs à la régularité de la procédure soient examinés. Le « rescrit » émis dans ces conditions ne vaudra pas « quitus ». Il aura été émis à un instant T et à l’endroit de certains vices de procédure uniquement.
Si la cour ne se prononce pas sur tous les vices de procédure susceptibles d’entacher d’illégalité la décision administrative déférée à son contrôle, il semble pourtant que plus aucun vice de procédure ne puisse être invoqué par un requérant, même ceux qui n’auraient pas été étudiés dans le cadre du rescrit.
L’article 39 précise ici : « Si la régularité de la procédure est définitivement constatée, aucun vice de procédure ne pourra plus être invoqué ni par voie d’action ni par voie d’exception à l’encontre de la décision. »
Il conviendra, lors de l’expérimentation à venir, de vérifier si le texte comporte ici une contradiction. Si le rescrit juridictionnel positif interdit à un requérant de critiquer la régularité de la procédure suivie, il importe que la cour qui rédige le rescrit soit tenue de se prononcer sur tous les vices de procédure susceptibles d’entacher d’illégalité la décision administrative concernée.
En conclusion, il est sage d’expérimenter cette procédure pour, éventuellement, la perfectionner, avant de la généraliser.
Il est cependant regrettable que le Gouvernement n’ait pas exploré toutes les autres pistes de réduction des délais d’instruction des recours et de traitement des recours abusifs qui bloquent sans raison des projets, parfois pendant des années.
Arnaud Gossement
Avocat associé – Cabinet Gossement Avocats
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