En bref
Solaire : publication du décret du 3 décembre 2024 précisant les caractéristiques des panneaux solaires photovoltaïques permettant le report de l‘obligation de solarisation de certains parkings
Hydroélectricité : modifications des modalités d’expérimentation du dispositif du médiateur
Schéma d’aménagement et de gestion des eaux (SAGE) : Modification des dispositions relatives à l’élaboration, la modification et la révision des SAGE
Déchets : Assouplissement des conditions pour la reprise des déchets de construction par les distributeurs
Qualification de contrat administratif : le Conseil d’Etat fait application de la nouvelle définition du critère relatif aux clauses exorbitantes
Par une décision du 5 février 2018, le Conseil d’Etat a fait application de la nouvelle définition de la « clause exorbitante », qui confère aux contrats un caractère administratif (cf. CE, 5 février 2018, société Endel, n°414846).
I. Contexte
Pour mémoire, un contrat est qualifié de contrat administratif par détermination de la loi (marché public, délégation de service public, etc.) ou, à défaut, au regard de critères jurisprudentiels. Sauf exception, les Juridictions reconnaissent un contrat administratif au regard de deux critères cumulatifs : d’une part, la présence d’une personne publique au contrat (critère organique) et d’autre part, l’objet du contrat ou la présence de clauses exorbitantes (critère matériel).
Les clauses exorbitantes ont longtemps été définies par opposition au « droit commun », comme ayant pour effet de conférer aux parties des droits et obligations « étrangers par leur nature à ceux qui sont susceptibles d’être consenties par quiconque dans le cadre des lois civiles et commerciales » (TC, 15 novembre 1999, Cne de Bourisp, n° 3144)
Par une décision du 13 octobre 2014, le Tribunal des conflits a reformulé la notion de « clause exorbitante du droit commun » en la couplant à celle d’intérêt général :
« Considérant, en troisième lieu, que le contrat litigieux ne comporte aucune clause qui, notamment par les prérogatives reconnues à la personne publique contractante dans l’exécution du contrat, implique, dans l’intérêt général, qu’il relève du régime exorbitant des contrats administratifs » (cf. TC, 13 octobre 2014 , Sté Axa France IARD, n° 3963; v. également, TC, 4 juillet 2016, n° 4052).
Cette définition a par la suite été adoptée par le Conseil d’Etat (cf. notamment CE, 10 février 2016, n° 373664) et la Cour de cassation (cf. notamment Civ. 1re, 17 février 2016 n° 14-26.632).
II. Décision commentée
Par la décision du 5 février 2018, le Conseil d’Etat fait application de cette nouvelle lecture de la « clause exorbitante ».
Le juge des référés du Conseil d’Etat était saisi, dans cette affaire, d’une demande d’annulation des procédures de passation de deux lots d’un marché relatif aux services de réparation et d’entretien d’installation du Centre spatial guyanais lancée par le Centre national d’études spatiales (CNES). Le CNES, établissement public industriel et commercial de l’Etat, est en effet chargé de la passation des contrats pour les besoins du Centre spatial guyanais, en application d’un accord international conclu entre le Gouvernement français et l’Agence spatiale européenne.
Compte tenu de cette nature particulière, le Conseil d’Etat a été conduit à rechercher si le juge des référés précontractuels était compétent pour connaitre de ce contrat et, précisément, si celui-ci devait être qualifié de contrat administratif.
Le Conseil d’Etat a relevé, tout d’abord, que ces contrats sont régis par la loi française et n’entrent pas dans le champ de la règlementation des marchés publics. En effet, la règlementation des marchés publics n’est pas applicable aux marchés conclus « selon la procédure convenue entre une organisation internationale et l’acheteur lorsque le marché public est cofinancé majoritairement par cette organisation internationale […]« .
C’est dans ces circonstances que le Conseil d’Etat a recherché si ces contrats devaient être qualifiés de contrats administratifs, au regard des critères fixés par la jurisprudence :
« que si, par suite, ces contrats n’ont pas le caractère de contrats administratifs par détermination de la loi, il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés, d’une part, que ces marchés sont soumis à un cahier des clauses administratives particulières élaboré par le CNES, qui renvoie aux différents cahiers des clauses administratives générales applicables aux marchés publics ; que pour le marché litigieux, est ainsi rendu applicable le cahier des clauses administratives générales des marchés de fournitures courantes et de services ; d’autre part, que l’exécution de ce contrat est également régie par le cahier des clauses administratives particulières du CNES, lequel confère à l’établissement public des prérogatives particulières à l’égard de ses cocontractants pour assurer, pour le compte de l’Etat, sa mission régalienne tendant à l’exécution des engagements internationaux liant la France à l’Agence spatiale européenne ; que ce renvoi au cahier des clauses administratives générales des marchés de fournitures courantes et de services et l’application du cahier des clauses administratives particulières du CNES doivent être regardés comme introduisant dans ces contrats des clauses impliquant dans l’intérêt général qu’ils relèvent d’un régime exorbitant de droit public ; que l’existence de ces clauses confère par suite à ces contrats un caractère administratif« .
Ainsi, le Conseil a ainsi retenu la qualification de contrat administratif, par référence à un « régime exorbitant de droit public ». Le Conseil d’Etat a précisément identifié deux éléments caractérisant ce « régime exorbitant de droit public » : le renvoi au CCAG des marchés de fournitures courantes et de services et l’application du cahier des clauses administratives particulières du CNES.
A noter que, pour retenir la compétence du juge des référés précontractuels, le Conseil d’Etat relève par ailleurs que ces contrats, qui ont pour objet de confier à un prestataire de services des tâches liées au fonctionnement du centre spatial en contrepartie d’un prix, est au nombre des contrats de prestations de services dont le juge du référé précontractuel peut connaitre en vertu de l’article L.551-1 du code de justice administrative.
Sur le fond, le Conseil d’Etat juge que les procédures de passation des lots ne sont entachées d’aucune irrégularité.
Margaux Caréna
Avocate – Référente pour le droit public des affaires
Cabinet Gossement Avocats
Vous avez apprécié cet article ? Partagez le sur les réseaux sociaux :
Découvrez le cabinet Gossement Avocats
Gossement Avocats est une référence dans ses domaines d’excellence :
droit de l’environnement, droit de l’énergie, droit de l’urbanisme, tant en droit public qu’en droit privé.
À lire également
A69 : le Gouvernement peut-il faire échec à l’exécution du jugement du tribunal administratif de Toulouse au moyen d’une loi de validation ?
Plusieurs parlementaires ont annoncé qu'ils déposeraient une proposition de "loi de validation" pour faire échec à l'exécution du jugement par lequel, ce 27 février 2025, le tribunal administratif de Toulouse a annulé l’arrêté du 1er mars 2023 par lequel le préfet de...
Plastique à usage unique : un projet de décret qui ne changera rien à l’interdiction dans les cantines (et ailleurs)
Le Gouvernement organise, du 20 février au 14 mars 2025, une consultation publique sur un projet de décret portant modification de la définition des contenants alimentaires de cuisson, de réchauffe et de service mentionnée à l’article D.541-338 du code de...
Economie circulaire : consultation publique sur le projet d’arrêté relatif aux modulations des contributions financières en cas d’incorporation de plastiques recyclés
Le projet d’arrêté fixant les modulations applicables aux contributions financières versées par les producteurs lorsqu’ils incorporent des matières plastiques recyclées est en consultation publique jusqu’au 1er avril 2025. Parmi les points importants figurent...
Certificats d’économies d’énergie : le Gouvernement confirme l’organisation de la sixième période et un renforcement de la lutte contre la fraude (projet de PPE 3)
Le Gouvernement organise, du 7 mars au 5 avril 2025, une nouvelle consultation publique sur un nouveau projet de programmation pluriannuelle de l’énergie pour la période 2025-2035 (PPE3). Un projet de décret qui devrait donc être publié pour mettre en œuvre des...
Solaire / Dérogation espèces protégées : la présomption irréfragable de la raison impérative d’intérêt public majeur ne dispense pas de la preuve de l’absence de solution alternative satisfaisante (Tribunal administratif d’Orléans)
Par un jugement n°2402086 du 13 février 2025, le tribunal administratif d'Orléans a annulé l'arrêté par lequel un préfet a délivré, au porteur d'un projet de centrale solaire, une autorisation de déroger à l'interdiction de destruction d'espèces protégées. Ce jugement...
Solaire : une serre photovoltaïque constitue « un espace clos et couvert » dont le permis de construire est soumis à étude d’impact préalable, si elle a vocation à demeurer le plus souvent fermée et à faire obstacle au passage (Conseil d’Etat)
Par une décision n°487007 du 25 février 2025, le Conseil d'Etat a jugé qu'une serre photovoltaïque constitue "un espace clos et couvert" dont le permis de construire est soumis à étude d'impact préalable, si, eu égard à sa nature et à sa fonction, elle a vocation à...
Découvrez le cabinet Gossement Avocats
Notre Cabinet
Notre valeur ajoutée :
outre une parfaite connaissance du droit, nous contribuons à son élaboration et anticipons en permanence ses évolutions.
Nos Compétences
Gossement Avocats est une référence dans ses domaines d'excellence :
droit de l'environnement, droit de l'énergie, droit de l'urbanisme, tant en droit public qu'en droit privé.
Contact
Le cabinet dispose de bureaux à Paris, Rennes et intervient partout en France.