En bref
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Solarisation des parkings : publication du décret d’application de l’article 40 de la loi APER
Restauration de la nature : la Commission européenne propose un règlement historique pour restaurer les écosystèmes endommagés d’ici à 2050
Pour mettre en œuvre le « Pacte vert européen », la Commission européenne a présenté Ce 22 juin 2022, une proposition de règlement pour la restauration de la nature. Celle-ci, outre une définition de que doit être la « restauration de la nature » consacre un objectif général de restauration de la nature pour tous les écosystèmes endommagés d’ici 2050. Pour y parvenir, la Commission propose une série d’obligations à la charge des Etats membres et des objectifs précis et chiffrés, déclinés dans des plans nationaux de restauration. Une proposition de texte qui, pour la première fois, propose un dispositif d’adaptation à la crise de la nature.
A titre liminaire, il convient de formuler les observations suivantes.
- Une proposition de règlement. La Commission européenne a présenté, ce 22 juin 2022, une proposition de règlement. A la différence d’une directive, un règlement n’appelle pas de mesures de transposition pour être directement applicable sur le territoire de tous les Etats membres de l’Union européenne. A la suite de sa discussion, ce règlement entrera en vigueur vingt jours après sa publication au Journal officiel de l’Union européenne (article 23). Il fera l’objet d’une première évaluation de son application par la Commission européenne en 2035 (article 22).
- Des obligations et objectifs contraignants. La proposition de règlement pour la restauration de la nature ne se borne pas à énoncer des objectifs généraux et non contraignants. Elle comporte une série d’obligations à la charge des Etats membres de respecter des objectifs précis et souvent chiffrés. Une procédure en justice (article 16) destinée à assurer le respect du règlement est prévue.
- Une évolution notable du droit de l’environnement. Depuis les années 70, le droit de l’environnement a surtout été consacré à la prévention des atteintes à l’environnement. Or, comme en matière de lutte contre le changement climatique, la prévention n’est plus suffisante, il convient également de traiter de l’adaptation, au changement climatique
- Une réduction du risque de fractionnement de l’environnement et de son droit. L’environnement et son droit sont souvent confrontés au risque de fractionnement et de raisonnement en silos. Or, l’environnement constitue un tout indivisible et son droit ne devrait pas, à notre sens, cloisonner les différents enjeux : lutte contre le changement climatique, protection de la nature, prévention et gestion des déchets, économies d’énergie, production d’énergie renouvelable etc… L’article 1er de la proposition de règlement établit un lien entre changement climatique et protection de la nature : « This Regulation lays down rules to contribute to: (a) the continuous, long-term and sustained recovery of biodiverse and resilient nature across the Union’s land and sea areas through the restoration of ecosystems; (b) achieving the Union’s overarching objectives concerning climate change mitigation and climate change adaptation; (c) meeting the Union’s international commitments.«
I. Les principales dispositions de la proposition de règlement pour la restauration de la nature
Le plan de la proposition de règlement. La proposition de règlement pour la restauration de la nature est organisée en fonction des chapitres suivants.
- Chapitre I. Dispositions générales : articles 1 à 3
- Chapitre II. Objectifs et obligations de restauration : articles 4 à 10
- Chapitre III. Plans nationaux de restauration : articles 11 à 16
- Chapitre IV. Suivi et évaluation : articles 17 et 18
- Chapitre V. Actes délégués et comitologie : articles 19 à 21
- Chapitre VI. Dispositions finales : articles 23 et 23
Les principales dispositions à retenir. La proposition de règlement
- Un objectif général de restauration de la nature pour tous les écosystèmes endommagés d’ici 2050
- Une définition de la notion de restauration
- Une série d’obligations de restauration des écosystèmes terrestres, marins, urbains et forestiers, à la charge des Etats membres et comportant des objectifs chiffrés et contraignants
- Une obligation d’élaboration de plans nationaux de restauration
Liste des principaux articles de la proposition de règlement. Pour chaque article, la liste suivante fait état de l’une des principales dispositions qu’il comporte. Il importe toutefois de lire l’intégralité des dispositions de la proposition de règlement ainsi que ses annexes.
Article 1. Objectif général
- Obligation pour les Etats membres de restauration de la nature pour 30% du territoire de l’Union européenne en 2030 et pour tous les écosystème endommagés en 2050.
- L’article 1er de la proposition de règlement précise notamment que les Etats membres doivent (« shall ») prendre des mesures de restauration qui : « This Regulation establishes a framework within which Member States shall put in place, without delay, effective and area-based restoration measures which together shall cover, by 2030, at least 20 % of the Union’s land and sea areas and, by 2050, all ecosystems in need of restoration.«
Article 3. Définitions
- Définition de la notion de « restauration » de la nature. L’article 2 de la proposition de règlement comporte une série très importante de définitions, dont celle de « restauration ». Pour la première fois, la Commission européenne propose un cadre juridique complet, non pas uniquement pour prévenir les atteintes à la nature mais pour restaurer les écosystèmes endommagés. L’objectif de restauration n’est plus seulement compris dans le cadre dispositif de compensation des atteintes à la nature.
Article 4. Restauration des écosystèmes terrestres
- Obligation pour les Etats membres d’améliorer ou de rétablir le bon état écosystèmes terrestres (« habitats types » listés en annexe I) pour, au moins 30% de leur surface d’ici 2030, 60% d’ici 2040, 90% d’ici 2050
Article 5. Restauration des écosystèmes marins
- Obligation pour les Etats membres d’améliorer ou de rétablir le bon état écosystèmes marins (« habitats types » listés en annese II) pour, au moins 30% de leur surface d’ici 2030, 60% d’ici 2040, 90% d’ici 2050 marins
Article 6. Restauration des écosystèmes urbains
- Obligation pour les Etats membres d’assurer l’absence de perte nette d’espaces verts urbains d’ici à 2030, une augmentation de 5 % d’ici à 2050, un minimum de 10 % de couvert arboré dans chaque agglomération, ville et banlieue d’Europe
- Obligation pour les Etats membres d’assurer une augmentation des espaces verts urbains de 3% d’ici 2040 par référence à 2021
Article 7. Restauration des continuités écologique des cours d’eaux et des fonctions des zones humides
- Objectif de restauration d’au moins 25 000 km de cours d’eau en cours d’eau à courant libre dans l’Union européenne d’ici 2030
Article 8. Restauration des populations de pollinisateurs
- Obligation pour les Etats membres d’inverser le déclin des populations de pollinisateurs d’ici à 2030 puis accroître leurs populations
Article 9. Restauration des écosystèmes agricoles
- Obligation pour les Etats membres d’assurer, dans les écosystèmes agricoles, une augmentation globale de la biodiversité et une évolution positive pour les papillons de prairies, les oiseaux des milieux agricoles, le carbone organique dans les sols minéraux sous les terres cultivées et les particularités topographiques à haute diversité biologique sur les terres agricoles
Article 10. Restauration des écosystèmes forestiers
- Obligation pour les Etats membres d’assurer, dans les écosystèmes forestiers, une augmentation globale de la biodiversité et évolution positive de la connectivité forestière, du bois mort, de la part des forêts inéquiennes, des oiseaux des milieux forestiers et des stocks de carbone organique
Articles 11 à 14 élaboration et contenu des plans nationaux de restauration
- Ces articles énumèrent les données, indicateurs et textes à prendre en compte lors de l’élaboration de ces plans nationaux de restauration ainsi que leur contenu
- NB : les Etats membres doivent articuler ce travail d’élaboration des plans nationaux de restauration avec celui relatif à l’identification des zones propices pour le développement des énergies renouvelables (Plan REpowerEU). : « Member States shall coordinate the development of national restoration plans with the designation of the renewables go–to areas. During the preparation of the nature restoration plans, Member States shall ensure synergies with the already designated renewables go–to areas and ensure that the functioning of the renewables go–to areas, including the permitting procedures applicable in the renewables go–to areas foreseen by Directive (EU) 2018/2001 remain unchanged.«
- Les Etats membres doivent élaborer ces plans nationaux de restauration en y associant le public (articles 4 à 10 de la directive 2001/42/EC)
- Les Etats mémbres doivent présenter leurs projets de plans nationaux de restauration dans un délai de 24 mois à compter de l’entrée en vigueur du règlement.
II. Focus sur la définition de la « restauration de la nature »
La proposition de règlement. L’article 2 de la proposition de règlement de la Commission comporte une série de définitions très importantes pour le droit de l’environnement en général et la protection de la nature en particulier. Ces définitions s’articulent entre elles. Il est donc important de les lire toutes pour bien comprendre la cohérence d’ensemble du nouveau dispositif juridique de restauration de la nature.
Parmi celles-ci on relèvera la définition de la notion de « restauration » :
« restoration’ means the process of actively or passively assisting the recovery of an ecosystem towards or to good condition, of a habitat type to the highest level of condition attainable and to its favourable reference area, of a habitat of a species to a sufficient quality and quantity, or of species populations to satisfactory levels, as a means of conserving or enhancing biodiversity and ecosystem resilience«
Plusieurs points de cette définition retiennent l’attention.
Un procédé actif ou passif. En premier lieu, cette définition précise que la restauration de la nature peut être opérée de manière active ou passive. Ce point est très important pour la sélection à venir des méthodes de restauration. La restauration pourra aussi imposer une non intervention de l’homme sur la nature.
L’objectif relatif « bon état » des écosystèmes endommagés. En deuxième lieu, cette définition comporte un critère général relatif au but à atteindre pour une opération de restauration, celui de « good condition ». Cette notion est à son tour l’objet d’une définition :
« good condition » means a state where the key characteristics of an ecosystem, namely its physical, chemical, compositional, structural and functional state, and its landscape and seascape characteristics, reflect the high level of ecological integrity, stability and resilience necessary to ensure its long-term maintenance;«
A noter : l’objectif précité est décliné en fonction des écosystèmes concernés :
- « of a habitat type to the highest level of condition attainable and to its favourable reference area, »
- « of a habitat of a species to a sufficient quality and quantity, or of species populations to satisfactory levels
De nouveau, il convient, pour bien préciser le contenu de cette définition de la notion de restauration », de se reporter à d’autres définitions. Et notamment à celles-ci : « ecosystem », « habitat of a species », « favourable reference area », « sufficient quality of habitat ».
En droit interne (français), la définition de la « renaturation » est codifiée à l’article L. 101-2-1 du code de l’urbanisme, dans sa rédaction issue de la loi « climat et résilience » du 22 août 2021 : « La renaturation d’un sol, ou désartificialisation, consiste en des fonctions ou des opérations de restauration ou d’amélioration de la fonctionnalité d’un sol, ayant pour effet de transformer un sol artificialisé en un sol non artificialisé.«
Si les notions de « restauration de la nature » et de « renaturation » sont très proches en droit, il importe de souligner que la notion de « renaturation » en droit interne s’éloigne de celle de « restauration de la nature » en droit de l’Union européenne, en ce que la première ne concerne que les sols alors que la deuxième intéresse la protection des écosystèmes sans les réduire à leurs sols.
Arnaud Gossement
Avocat – docteur en droit
Professeur associé à l’université Paris I Panthéon-Sorbonne
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