En bref
Eolien : Gossement Avocats défend la société BayWa r.e. et obtient le rejet de recours dirigés contre un parc éolien devant la Cour administrative d’appel de Lyon
Solaire : publication du décret du 3 décembre 2024 précisant les caractéristiques des panneaux solaires photovoltaïques permettant le report de l‘obligation de solarisation de certains parkings
Hydroélectricité : modifications des modalités d’expérimentation du dispositif du médiateur
Schéma d’aménagement et de gestion des eaux (SAGE) : Modification des dispositions relatives à l’élaboration, la modification et la révision des SAGE
Solaire : l’Etat souhaite renégocier certains contrats d’achat à la baisse (Les Echos)
Me Arnaud Gossement a été interrogé par le quotidien Les Echos sur le projet du Gouvernement de renégocier à la baisse certains contrats d’achat d’électricité d’origine solaire photovoltaïque. L’article peut être consulté ici. Plus de précisions ci-après.
A titre liminaire, il convient de préciser que l’information selon laquelle l’Etat s’apprêterait à renégocier les contrats d’achat d’électricité d’origine solaire signés avant 2011 doit être traitée avec prudence. Il convient en effet d’attendre une confirmation officielle de ce projet et le texte du projet de loi de finances pour 20
Si cette information devait être confirmée, elle serait toutefois très regrettable pour plusieurs raisons.
- cette communication porterait une nouvelle atteinte à l’image de la filière qui a déjà beaucoup souffert par le passé des effets du moratoire décidé par l’Etat en décembre 2010.
- elle serait de nature à fragiliser encore la confiance des acteurs économiques, des investisseurs aux consommateurs. La filière a en effet été l’objet ces dernières années d’une politique du « stop and go » qui s’est traduite par une instabilité des normes, un changement des règles et
- elle révélerait une absence de concertation avec la filière et ses représentants, ce qui serait contraire à l’impératif d’une bonne gouvernance des énergies renouvelables
- elle pourrait générer un contentieux important : administratif mais aussi commercial.
Sur le plan du droit, une telle décision de remettre en cause les contrats déjà signés il y a plusieurs années, pose de nombreuses questions.
Le contrat d’achat : un contrat administratif. La première question qu’il convient de se poser tient à la nature juridique du contrat d’achat qui pourrait, éventuellement, être remis en cause. Depuis la loi du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l’environnement dite « Grenelle 2 » du 12 juillet 2010, les contrats d’achat d’énergie conclus entre des producteurs d’électricité et l’obligé (EDF) sont des contrats administratifs par détermination de la loi (cf. article L. 314-7 du code de l’énergie).
Le Conseil d’Etat a précisé que les contrats conclus avant ou après le 1er juin 2011 – date d’entrée en vigueur de l’ordonnance de codification – sont des contrats administratifs (cf. CE, 21 mars 2012, Société EDF, n° 349415). Seule exception : cette disposition ne s’applique pas aux contrats faisant l’objet d’une instance en cours à la date du 14 juillet 2010 (cf. TC, 5 mars 2012, Société Baryflor c/EDF, n°3843). Aussi, il convient d’être attentif à ce cas spécifique pour déterminer le cadre juridique de la résiliation du contrat d’achat d’électricité. Néanmoins, à ce jour, les contrats d’achat d’électricité sont, dans la majorité des cas, des contrats administratifs dont le contentieux relève de la compétence du juge administratif.
Sur la clause de résiliation du contrat d’achat. Les contrats d’achat d’électricité, qui se présentent sous la forme d’un contrat-type, comportent une clause de résiliation à l’initiative de l’acheteur (EDF OA) comme du producteur.
A la lecture des conditions générales des contrats d’achat d’électricité successifs, EDF OA a expressément la possibilité de résilier un contrat d’achat, à la demande du Préfet de région, lorsque le producteur ne se conforme à son obligation de régularisation, en cas de manquements. Cette faculté figure désormais à l’article L. 314-6 du code de l’énergie, créé par la loi du 17 aout 2015 :
« Les contrats prévoient les conditions dans lesquelles ils peuvent être suspendus ou résiliés par Électricité de France, les entreprises locales de distribution ou les organismes agréés mentionnés à l’article L. 314-6-1, dans des conditions approuvées par l’autorité administrative »
Sur la résiliation pour motif d’intérêt général. Hormis ce cas spécifique, l’acheteur peut en principe résilier un contrat d’achat en se fondant sur le régime général du contrat d’achat d’électricité (au vu de ce qui précède, seul le régime applicable aux contrats administratifs est envisagé).
En effet, la décision d’Assemblée du 2 mai 1958 Distillerie de Magnac-Laval a ouvert la possibilité pour la personne publique contractante de résilier un contrat pour motif d’intérêt général. De jurisprudence ancienne, ce principe s’applique à l’ensemble des contrats administratifs, même en l’absence de texte ou de stipulation contractuelle (cf. CE 31 juill. 1996, Sté des téléphériques du massif du Mont-Blanc, n° 126594). Néanmoins, la légalité de la décision est en principe subordonnée à la réunion de deux conditions :
- L’existence d’un motif d’intérêt général ;
S’agissant du motif d’intérêt général, le juge administratif examine au cas par cas les motifs invoqués et admet des motifs variés, liés à la relation contractuelle (motifs budgétaires, difficultés d’exécution..) ou extérieure aux parties : durée excessive du contrat au regard de la législation en vigueur (cf. CE, 7 mai 2013, Sté auxiliaires de parcs de la région parisienne, n° 365043).
A défaut, le juge administratif affirme que « la résiliation unilatérale est constitutive d’une faute de nature à engager la responsabilité contractuelle de l’administration« . Dans cette hypothèse, le cocontractant lésé peut réclamer la réparation de préjudices issus du comportement fautif de l’administration (cf. CAA Paris, 17 octobre 2011, Société LEA, n° 10PA0059). A titre d’illustration, il a récemment été jugé que la modification des priorités financières de la personne publique ne constituait pas un motif d’intérêt général (cf. CAA Douai, 4 avril 2019, n° 17DA02401).
- L’indemnisation du cocontractant
Sauf stipulation contractuelle contraire, la résiliation pour motif d’intérêt général a pour contrepartie l’indemnisation du cocontractant. Elle doit couvrir l’intégralité du dommage subi par le cocontractant, à condition qu’il puisse en justifier le montant. Elle prend en compte les dépenses engagées10 ainsi que le gain manqué par le titulaire (cf. CE, 18 novembre 1988, Ville d’Amiens, n° 61871 ; CE, 16 février 1996, Syndicat intercommunal de l’arrondissement de Pithiviers, n° 82880).
Arnaud Gossement – Margaux Bouzac
Avocats – cabinet Gossement Avocats
Vous avez apprécié cet article ? Partagez le sur les réseaux sociaux :
Découvrez le cabinet Gossement Avocats
Gossement Avocats est une référence dans ses domaines d’excellence :
droit de l’environnement, droit de l’énergie, droit de l’urbanisme, tant en droit public qu’en droit privé.
À lire également
A69 : le Gouvernement peut-il faire échec à l’exécution du jugement du tribunal administratif de Toulouse au moyen d’une loi de validation ?
Plusieurs parlementaires ont annoncé qu'ils déposeraient une proposition de "loi de validation" pour faire échec à l'exécution du jugement par lequel, ce 27 février 2025, le tribunal administratif de Toulouse a annulé l’arrêté du 1er mars 2023 par lequel le préfet de...
Plastique à usage unique : un projet de décret qui ne changera rien à l’interdiction dans les cantines (et ailleurs)
Le Gouvernement organise, du 20 février au 14 mars 2025, une consultation publique sur un projet de décret portant modification de la définition des contenants alimentaires de cuisson, de réchauffe et de service mentionnée à l’article D.541-338 du code de...
Economie circulaire : consultation publique sur le projet d’arrêté relatif aux modulations des contributions financières en cas d’incorporation de plastiques recyclés
Le projet d’arrêté fixant les modulations applicables aux contributions financières versées par les producteurs lorsqu’ils incorporent des matières plastiques recyclées est en consultation publique jusqu’au 1er avril 2025. Parmi les points importants figurent...
Certificats d’économies d’énergie : le Gouvernement confirme l’organisation de la sixième période et un renforcement de la lutte contre la fraude (projet de PPE 3)
Le Gouvernement organise, du 7 mars au 5 avril 2025, une nouvelle consultation publique sur un nouveau projet de programmation pluriannuelle de l’énergie pour la période 2025-2035 (PPE3). Un projet de décret qui devrait donc être publié pour mettre en œuvre des...
Solaire / Dérogation espèces protégées : la présomption irréfragable de la raison impérative d’intérêt public majeur ne dispense pas de la preuve de l’absence de solution alternative satisfaisante (Tribunal administratif d’Orléans)
Par un jugement n°2402086 du 13 février 2025, le tribunal administratif d'Orléans a annulé l'arrêté par lequel un préfet a délivré, au porteur d'un projet de centrale solaire, une autorisation de déroger à l'interdiction de destruction d'espèces protégées. Ce jugement...
Solaire : une serre photovoltaïque constitue « un espace clos et couvert » dont le permis de construire est soumis à étude d’impact préalable, si elle a vocation à demeurer le plus souvent fermée et à faire obstacle au passage (Conseil d’Etat)
Par une décision n°487007 du 25 février 2025, le Conseil d'Etat a jugé qu'une serre photovoltaïque constitue "un espace clos et couvert" dont le permis de construire est soumis à étude d'impact préalable, si, eu égard à sa nature et à sa fonction, elle a vocation à...
Découvrez le cabinet Gossement Avocats
Notre Cabinet
Notre valeur ajoutée :
outre une parfaite connaissance du droit, nous contribuons à son élaboration et anticipons en permanence ses évolutions.
Nos Compétences
Gossement Avocats est une référence dans ses domaines d'excellence :
droit de l'environnement, droit de l'énergie, droit de l'urbanisme, tant en droit public qu'en droit privé.
Contact
Le cabinet dispose de bureaux à Paris, Rennes et intervient partout en France.