Urbanisme : précisions sur les modalités de recours à la procédure de modification simplifiée du plan local d’urbanisme (Conseil d’Etat)

Mar 18, 2020 | Urbanisme

Par arrêt du 31 janvier 2020 (n° 416364), le Conseil d’Etat revient sur les modalités de recours à la procédure de modification simplifiée du plan local d’urbanisme (PLU).

 Dans cette affaire, le conseil municipal de la commune de T.-H. (Alpes-de-Haute-Provence) a approuvé, par délibération du 1er aout 2013, la modification simplifiée n°2 de son PLU relative à une zone Nc dédiée à l’exploitation de carrières.

Saisi d’un recours en annulation, le Tribunal administratif de Marseille a annulé cette délibération. Cette annulation a été confirmée par la Cour administrative d’appel de Marseille, laquelle a rejeté l’appel formé par la commune. Cette dernière se pourvoit alors en cassation contre cet arrêt du 12 octobre 2017.

A titre liminaire, il importe de préciser que la Cour administrative d’appel de Marseille a confirmé l’illégalité de la délibération du 1er aout 2013 en se fondant sur quatre motifs :

– L’illégalité du recours à la procédure de modification simplifiée du PLU (au lieu de la procédure de révision) ;
– L’absence d’évaluation environnementale ;
– La méconnaissance de l’article L. 145-3 du code de l’urbanisme ;
– La méconnaissance de l’article R. 123-11 du code de l’urbanisme.

En premier lieu, le Conseil d’Etat rappelle les dispositions de l’article L. 123-13-3 du code de l’urbanisme, dans sa rédaction applicable au litige, relatives à la mise en œuvre de la procédure de modification simplifiée :

« I. En dehors des cas mentionnés à l’article L. 123-13-2, et dans le cas des majorations des possibilités de construire prévues au deuxième alinéa de l’article L. 123-1-11 ainsi qu’aux articles L. 127-1, L. 128-1 et L. 128-2, le projet de modification peut, à l’initiative du président de l’établissement public de coopération intercommunale ou, dans le cas prévu au deuxième alinéa de l’article L. 123-6, du maire, être adopté selon une procédure simplifiée. Il en est de même lorsque le projet de modification a uniquement pour objet la rectification d’une erreur matérielle. »

Le Conseil d’Etat indique notamment que le recours à la procédure de modification simplifiée pour la correction d’une erreur matérielle est légalement possible « en cas de malfaçon rédactionnelle ou cartographique portant sur l’intitulé, la délimitation ou la réglementation d’une parcelle, d’un secteur ou d’une zone ou le choix d’un zonage ».

La Haute juridiction précise en effet que le recours à la procédure de modification simplifiée est possible dès lors où cette malfaçon conduit à une « contradiction évidente avec les intentions des auteurs du plan local d’urbanisme, telles qu’elles ressortent des différents documents constitutifs du plan local d’urbanisme, comme le rapport de présentation, les orientations d’aménagement ou le projet d’aménagement et de développement durable ».

Au cas d’espèce, il résulte des différents documents constitutifs du PLU que la commune n’a pas entendu remettre en cause ou restreindre les activités liées à l’exploitation des carrières existant dans la zone Nc, y compris les activités qualifiées de « connexes » à cette exploitation, et donc que l’absence, dans le règlement du PLU de 2008, de la référence à ces activités procédait d’une simple omission.

Ainsi, selon le Conseil d’Etat, la juridiction d’appel a inexactement qualifié les faits en jugeant que la modification du règlement de cette zone afin d’y autoriser, de manière explicite, les « équipements, installations et constructions nécessaires à l’exploitation de carrières et aux activités connexes » ne pouvait pas être assimilée à la rectification d’une erreur matérielle.

En deuxième lieu, le Conseil d’Etat indique également que la Cour administrative d’appel de Marseille a commis une erreur de droit en jugeant que la modification envisagée était susceptible d’induire de graves risques de nuisance, pour en déduire la nécessité d’une évaluation environnementale.

Sur ce point, la Haute juridiction précise que la modification apportée au PLU « entendait rétablir la mention d’activités existantes, antérieures au plan local d’urbanisme adopté en 2008, et n’était, par suite pas susceptible d’emporter des nuisances supplémentaires ».

En troisième lieu, il résulte des dispositions de l’article R. 123-11 du code de l’urbanisme, dans sa version applicable au litige, que les zones urbaines (U), à urbaniser (AU), agricoles (A) et naturelles et forestières (N) sont délimitées sur un ou plusieurs documents graphiques.

Ces documents graphiques au sein du règlement peuvent également faire apparaître notamment les « secteurs protégés en raison de la richesse du sol ou du sous-sol, dans lesquels les constructions et installations nécessaires à la mise en valeur de ces ressources naturelles sont autorisées ».

A cet égard, le Conseil d’Etat a jugé que la juridiction d’appel a commis une erreur de droit en jugeant que la délibération litigieuse ne pouvait légalement ouvrir la possibilité, dans ce secteur protégé en raison de la richesse de son sol et sous-sol, de réaliser des installations comme les centrales d’enrobage à chaud et les centrales à béton, au motif, selon la Cour, que ces installations étaient « connexes et non pas seulement nécessaires à l’exploitation d’une carrière ».

La Haute juridiction précise en effet que la Cour administrative d’appel de Marseille aurait dû, au lieu de les exclure par principe, apprécier l’existence d’un rapport étroit entre les activités concernées dès lors où les dispositions de l’article R. 123-11 précitées autorisent les installations « nécessaires à la mise en valeur » des « ressources naturelles ».

En dernier lieu, le Conseil d’Etat relève cependant que la méconnaissance de l’article L. 145-3 du code de l’urbanisme justifie à elle seule l’annulation de la délibération du 1er août 2013.

Cet article précise en effet qu’en zone de montagne, « l’urbanisation doit se réaliser en continuité avec les bourgs, villages, hameaux, groupes de constructions traditionnelles ou d’habitations existants ». Or, le Conseil d’Etat juge au cas d’espèce que la Cour administrative d’appel de Marseille n’a pas commis d’erreur de droit en faisant application de ces dispositions dès lors où la modification apportée au PLU était de nature à permettre une forme d’urbanisation, laquelle est proscrite.

Laura Picavez

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