En bref
Emballages : le décret n°2025-1081 du 17 novembre 2025 sur la filière REP des emballages professionnels est (enfin) publié
Le décret du 17 novembre 2025 confirme que la filière REP des emballages professionnels répond à un schéma plutôt financier, ce que confirmait déjà la version projet du texte.
On ne manquera toutefois pas de relever que dans sa version publiée, le décret a notablement évolué dans sa rédaction par rapport à sa version projet. Par exemple, le décret du 17 novembre 2025 a supprimé la catégorie des emballages mixtes, là où la version projet avait uniquement supprimé la notion d’ « alimentaire ». La distinction reposant désormais sur les emballages ménagers et professionnels, laquelle pourra être précisée par un arrêté « périmètre » pris par la ministre chargée de l’environnement (un tel projet d’arrêté avait d’ailleurs été soumis à consultation publique, en même temps que le projet de cahier des charges).
Il est difficile d’anticiper sur le cadre règlementaire de la future filière REP des emballages professionnels, dès l’instant où certaines précisions devront être apportées par le cahier des charges (prise en charge opérationnelle, modalités de détermination des coûts liés à la reprise des emballages usagés en vue de leur réemploi, barème d’éco-modulation, etc.).
Enfin, si les emballages de produits relevant d’autres filières REP et qui sont clairement identifiés au sein du décret, ne relèvent pas de la filière REP des emballages ménagers comme professionnels, le décret n’apporte aucune précision sur les modalités de compensation des coûts dans le cas où les déchets d’emballages relevant de ces produits seraient pris en charge par le ou les éco-organismes agréés au titre de la REP des emballages.
Un maire peut refuser le permis de construire d’un poulailler industriel en raison du manque d’eau, en tenant compte du changement climatique (jurisprudence cabinet)
[webinaire] 21 novembre 2025 : « Etat de droit et Environnement : le Conseil constitutionnel face aux reculs environnementaux » (La Fabrique écologique)
[colloque] 17 octobre 2025 : intervention d’Arnaud Gossement à la IXème édition des Journées Cambacérès sur « Justice et Environnement » organisées par la Cour d’appel et la Faculté de droit de Montpellier
Principe de non régression : l’administration ne peut pas revenir sur un progrès de la protection de l’environnement sans justifier de motifs d’intérêt général (Conseil d’Etat)
Par un arrêt d’une grande importance rendu ce 9 juillet 2021, le Conseil d’Etat a jugé que l’autorisation de dérogations à l’interdiction de vols de nuit à l’aéroport de Beauvais-Tillé méconnaît les exigences du principe de non-régression. Un arrêt important en raison des précisions apportées par la Haute juridiction quant à la portée de ce principe.
Résumé
- Le principe de non régression est l’un des principes généraux du droit de l’environnement.
- Il a été inscrit à l’article L.110-1 du code de l’environnement à la suite de l’entrée en vigueur de la loi n° 2016-1087 du 8 août 2016 pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages.
- Aux termes de l’article L.110-1 du code de l’environnement, les autorités s’inspirent, dans le cadre des lois qui en définissent la portée, du « principe de non-régression, selon lequel la protection de l’environnement, assurée par les dispositions législatives et réglementaires relatives à l’environnement, ne peut faire l’objet que d’une amélioration constante, compte tenu des connaissances scientifiques et techniques du moment« .
- Le principe de non régression est de plus invoqué par les auteurs de recours devant le juge administratif.
- Par une décision n°404391 du 8 décembre 2017, le Conseil d’Etat a fait une première application de ce principe et annulé deux dispositions réglementaires sur son fondement.
- Par une décision n°439195 rendue ce 9 juillet 2021, le Conseil d’Etat a annulé, sur le fondement du principe de non-régression, l’article 1er de l’arrêté du 26 décembre 2019 par lequel le ministre chargé de l’aviation civile avait autorisé des dérogations à l’interdiction d’atterrissage nocturne à l’aéroport de Beauvais-Tillé.
Rappel des faits et de la procédure
Par un arrêté du 25 avril 2002, le ministre des transports a instauré des restrictions d’exploitation de l’aérodrome de Beauvais-Tillé interdisant notamment à tout aéronef d’atterrir ou de décoller entre 0 heure et 5 heures, heures locales de départ ou d’arrivée sur l’aire de stationnement, et aux avions les plus bruyants d’atterrir ou décoller entre 22 heures et 7 heures du matin.
Par arrêté du 26 décembre 2019, le même ministre a modifié celui du 25 avril 2002 et prévu, en son article 1er, que le ministre chargé de l’aviation civile peut, au cas par cas, autoriser des dérogations à cette interdiction d’atterrissage nocturne, dans les conditions qu’il fixe.
Plusieurs associations de protection de l’environnement ont demandé l’annulation pour excès de pouvoir de l’article 1er de cet arrêté, devant le Conseil d’Etat
Par une décision n°439195 rendue ce 9 juillet 2021, le Conseil d’Etat a annulé, sur le fondement du principe de non-régression, l’article 1er de l’arrêté du 26 décembre 2019 par lequel le ministre chargé de l’aviation civile avait autorisé des dérogations à l’interdiction d’atterrissage nocturne à l’aéroport de Beauvais-Tillé.
Une nouvelle application du principe de non régression
L’arrêt ici commenté rappelle tout d’abord la lettre du principe de non régression :
« 2. Aux termes du II de l’article L. 110-1 du code de l’environnement, les autorités s’inspirent, dans le cadre des lois qui en définissent la portée, du » principe de non-régression, selon lequel la protection de l’environnement, assurée par les dispositions législatives et réglementaires relatives à l’environnement, ne peut faire l’objet que d’une amélioration constante, compte tenu des connaissances scientifiques et techniques du moment « .
Le Conseil d’Etat a procédé au contrôle de la conformité de l’arrêté objet du recours avec ce principe de non-régression, en ces termes :
« 3. Les dispositions de l’arrêté attaqué donnent au ministre chargé de l’aviation civile le pouvoir d’accorder, au cas par cas, aux aéronefs effectuant des vols réguliers de transport de passagers et performants d’un point de vue acoustique, dont le dernier atterrissage était prévu entre 21 heures et 23 heures et dont le décollage est prévu le lendemain après 5 heures, le droit d’atterrir la nuit sur l’aéroport de Beauvais, par dérogation à l’interdiction posée par l’arrêté du 25 avril 2002, sans que soit limité le nombre de ces autorisations dérogatoires. Faute pour l’administration, d’une part, d’avoir encadré le surcroît du trafic aérien nocturne qui pourrait résulter de l’octroi de ces dérogations et d’autre part, d’avoir indiqué les motifs d’intérêt général qui pourraient le cas échéant les justifier, les associations requérantes sont fondées à soutenir que l’arrêté attaqué méconnaît les dispositions du 9° du II de l’article L. 110-1 du code de l’environnement. posant le principe de non-régression de la protection de l’environnement. »
A la suite de cette analyse, le Conseil d’Etat a annulé l’article 1er de l’arrêté litigieux « assouplissant » l’interdiction des vols de nuit aux motifs que l’administration :
- n’a pas encadré le surcroît du trafic aérien nocturne qui pourrait résulter de l’octroi de ces dérogations,
- n’a pas indiqué les motifs d’intérêt général qui pourraient le cas échéant les justifier.
Cet arrêt est très important à plusieurs titres :
1. Le Conseil d’Etat confirme l’importance du principe de non régression en en faisant une nouvelle application. Ce qui va nécessairement renforcer l’intérêt des auteurs de recours en annulation devant le juge administratif et enrichir la jurisprudence à son endroit.
2. Le principe de non-régression est ici appliqué pour contribuer au progrès de la protection de l’environnement entendue au sens large. L’interdiction des vols de nuit intéresse bien entendu la santé publique en raison des nuisances sonores qu’ils sont susceptibles de créer.
3. Par application du principe de non-régression, le Conseil d’Etat construit, depuis 2017, une jurisprudence très intéressante par laquelle il contrôle l’action de l’administration au regard de ce qui relève ou non de « l’amélioration constante » de la protection de l’environnement. Ce qui impose en retour à l’administration de s’interroger, avant toute décision ayant une incidence sur l’environnement, sur sa contribution à cette « amélioration constante » de la protection de l’environnement. De s’interroger puis de justifier sa décision.
4. La décision ici commentée est importante en raison des précisions apportées par le Conseil d’Etat quant à la portée de ce principe.
Par application de ce principe et dans les cas où le législateur ne lui pas expressément demandé de prendre une mesure dans un sens déterminé, l’administration doit, lorsqu’elle prend une décision qui intéresse la protection de l’environnement au sens large :
- évaluer le niveau de protection de l’environnement assuré par le droit, à l’instant où elle prend cette décision ;
- évaluer l’incidence de cette décision pour ce niveau de protection de l’environnement ;
- justifier précisément, par des motifs d’intérêt général, un éventuel risque de « régression » de ce niveau de protection de l’environnement ;
- encadrer précisément ce risque de « régression ».
Au fil de cette jurisprudence en construction depuis 2017, c’est donc une obligation renforcée d’évaluation et de motivation des décisions ayant une incidence sur l’environnement qui se dégage du principe de non-régression. Laquelle permet ensuite devant le juge administratif un débat sur ce que doit représenter le progrès du droit de l’environnement.
Arnaud Gossement
avocat – professeur associé à l’Université Paris I
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