En bref
[Soirée débat] 9 décembre 2025 – « Désinformation climatique : le rôle du droit face au brouillage du réel »
Un maire peut refuser le permis de construire d’un poulailler industriel en raison du manque d’eau, en tenant compte du changement climatique (jurisprudence cabinet)
[webinaire] 21 novembre 2025 : « Etat de droit et Environnement : le Conseil constitutionnel face aux reculs environnementaux » (La Fabrique écologique)
[colloque] 17 octobre 2025 : intervention d’Arnaud Gossement à la IXème édition des Journées Cambacérès sur « Justice et Environnement » organisées par la Cour d’appel et la Faculté de droit de Montpellier
Délai de recours : le Conseil d’Etat confirme sa jurisprudence relative au délai raisonnable d’un an pour contester une décision administrative
Par arrêt du 9 mars 2018, n° 401386, le Conseil d’Etat a jugé que la légalité d’un titre exécutoire ne peut être contestée au-delà d’un « délai raisonnable d’un an », et ce, alors même que les décisions entreprises n’indiquaient pas les voies et les délais de recours. Il confirme ainsi sa jurisprudence résultant de l’arrêt d’Assemblée du 13 juillet 2016, n° 387763..
En l’espèce, une société X a conclu avec une commune un contrat autorisant ladite société à déposer des déchets d’activité de soins sur le site d’une décharge publique, moyennant le paiement d’une redevance. La commune X a adressé plusieurs titres exécutoires à la société X pour exiger le paiement d’une somme, correspondant en réalité, à une augmentation du montant de la redevance dont n’avait pas été informée la société X.
Dans ces conditions, la société X a contesté la légalité de ces titres exécutoires. Les titres exécutoires ont été annulés par les juges du fond (première instance, confirmé en appel), ces derniers, ayant en l’occurrence, écarté la fin de non-recevoir soulevée en défense par la commune.
La commune X s’est alors pourvue en cassation. Le Conseil d’Etat confirme sa jurisprudence relative au délai raisonnable de recours d’un an et l’étend désormais au contentieux des titres exécutoires.
En premier lieu, le Conseil d’Etat rappelle tout d’abord les dispositions de l’article R. 421-5 du code de justice administrative aux termes duquel « les délais de recours contre une décision administrative ne sont opposables qu’à la condition d’avoir été mentionnés, ainsi que les voies de recours, dans la notification de la décision. »
Il relève, en outre, qu’en application de l’article 1617-5 du code général des collectivités territoriales, un recours contre un titre exécutoire émis par une collectivité territoriale est prescrit dans le délai de deux mois suivant la notification dudit titre.
En l’occurrence, les titres exécutoires contestés par la société X n’indiquaient pas les voies et délais de recours, de sorte qu’en principe, le délai de deux mois ne lui était pas opposable.
En deuxième lieu, ce n’est pourtant pas en ce sens que va statuer le Conseil d’Etat. En reprenant le principe dégagé dans sa décision du 13 juillet 2016, le Conseil d’Etat va écarter le principe de l’inopposabilité des délais de recours prévu à l’article R. 421-5 précité :
« 3. Toutefois, le principe de sécurité juridique, qui implique que ne puissent être remises en cause sans condition de délai des situations consolidées par l’effet du temps, fait obstacle à ce que puisse être contestée indéfiniment une décision administrative individuelle qui a été notifiée à son destinataire, ou dont il est établi, à défaut d’une telle notification, que celui-ci a eu connaissance. En une telle hypothèse, si le non-respect de l’obligation d’informer l’intéressé sur les voies et les délais de recours, ou l’absence de preuve qu’une telle information a bien été fournie, ne permet pas que lui soient opposés les délais de recours fixés par le code de justice administrative, le destinataire de la décision ne peut exercer de recours juridictionnel au-delà d’un délai raisonnable.«
C’est donc par application du principe de sécurité juridique, et plus particulièrement, par la nécessité de ne pas remettre en cause des situations « consolidées » par l’effet du temps, qu’il convient, selon la Haute juridiction, d’encadrer le délai de recours et d’écarter l’application de l’article R. 421-5 du code de justice administrative.
Comme il l’avait jugé par sa décision du 13 juillet 2016, le Conseil d’Etat prend le soin de souligner qu’une telle règle ne « porte pas atteinte à la substance du droit au recours » :
« 5. La règle énoncée ci-dessus, qui a pour seul objet de borner dans le temps les conséquences de la sanction attachée au défaut de mention des voies et délais de recours, ne porte pas atteinte à la substance du droit au recours, mais tend seulement à éviter que son exercice, au-delà d’un délai raisonnable, ne mette en péril la stabilité des situations juridiques et la bonne administration de la justice, en exposant les défendeurs potentiels à des recours excessivement tardifs. Il appartient, dès lors, au juge administratif d’en faire application au litige dont il est saisi, quelle que soit la date des faits qui lui ont donné naissance. »
En troisième lieu, le délai raisonnable pour contester un titre exécutoire est fixé à un an « à compter de la date à laquelle le titre, ou à défaut, le premier acte procédant de ce titre ou un acte de poursuite a été notifié au débiteur ou porté à sa connaissance. »
Il convient donc de porter une attention particulière sur ce délai raisonnable de recours d’un an, qui désormais s’applique à des décisions administratives rendues dans plusieurs domaines (pension de retraite, titre exécutoire).
Emma Babin
Avocate – responsable du bureau de Rennes
Cabinet Gossement Avocats
Vous avez apprécié cet article ? Partagez le sur les réseaux sociaux :
Découvrez le cabinet Gossement Avocats
Gossement Avocats est une référence dans ses domaines d’excellence :
droit de l’environnement, droit de l’énergie, droit de l’urbanisme, tant en droit public qu’en droit privé.
À lire également
Charte de l’environnement : le juge judiciaire est compétent, à certaines conditions, pour statuer sur une demande de réparation du préjudice écologique causé par une activité autorisée (AMM) par l’administration (Cour de cassation, 13 novembre 2025, n°500 FS-B)
En cette année du vingtième anniversaire de la Charte de l'environnement, la Cour de cassation vient, pour la deuxième fois (cf. notre commentaire) d'en faire application. Mais d'une manière qui peut apparaître surprenante. Par un arrêt rendu ce 13 novembre 2025, la...
Dérogation espèces protégées : l’illégalité de l’autorisation d’exploiter une activité industrielle peut démontrer l’existence d’un « risque suffisamment caractérisé » imposant au préfet d’enjoindre au porteur de projet de déposer une demande de « dérogation espèces protégées » (TA Guyane, 11 décembre 2025, Association Guyane Nature Environnement, n°2201889)
Par un jugement n°2201889 rendu ce 11 decembre 2025, le tribunal administratif de la Guyane a annulé, à la demande de l'association Guyane Nature Environnement, d'une part une autorisation d'exploiter une mine d'aurifère, d'autre part le refus du préfet d'ejoindre au...
Dermatose nodulaire : Arnaud Gossement invité de l’émission « Sur le terrain » sur France info TV
Ce lundi 15 décembre 2025, Arnaud Gossement était l'un des invités de l'émission "Sur le terrain" présentée par Loïc de la Mornais sur France Info TV et consacrée à la colère des agriculteurs confrontés à l'épidémie de Dermatose nodulaire contagieuse (DNC). L'émission...
[Conférence] 10 décembre 2025 : grande conférence sur l’avenir de l’énergie solaire, au salon Energaïa, organisée par Tecsol
Arnaud Gossement est l'un des intervenants de la grande conférence sur l'énergie solaire qu'organise Tecsol au salon Energaia, ce mercredi 10 décembre, de 15h30 à 16h30. Nous remercions André Joffre (président), Alexandra Batlle (secrétaire générale de Tecsol) et...
Communication responsable : l’Agence de la transition écologique (ADEME) publie l’édition 2025 de son « Guide anti-greenwashing »
L'Agence de la transition écologique (ADEME) a publié, ce 3 décembre 2025, sa nouvelle édition du "Guide anti-greenwashing". A jour des dernières évolutions du droit de l'Union et interne sur les allégations environnementales, ce guide, très complet et utile,...
Urbanisme : le maire peut refuser un permis de construire en raison de l’insuffisance de la ressource en eau (Conseil d’Etat, 1er décembre 2025, n°493556)
Par une décision n°493556 rendue ce 1er décembre 2025, le Conseil d'État a jugé que le maire de de la commune de Fayence avait légalement pu rejeter une demande de permis de construire des logements au motif d'une insuffisance de la ressource en eau, et ce, sur le...
Découvrez le cabinet Gossement Avocats
Notre Cabinet
Notre valeur ajoutée :
outre une parfaite connaissance du droit, nous contribuons à son élaboration et anticipons en permanence ses évolutions.
Nos Compétences
Gossement Avocats est une référence dans ses domaines d'excellence :
droit de l'environnement, droit de l'énergie, droit de l'urbanisme, tant en droit public qu'en droit privé.
Contact
Le cabinet dispose de bureaux à Paris, Rennes et intervient partout en France.




![[Conférence] 10 décembre 2025 : grande conférence sur l’avenir de l’énergie solaire, au salon Energaïa, organisée par Tecsol](https://www.gossement-avocats.com/wp-content/uploads/2024/04/solaire-adobe.jpeg)

