Autorisation environnementale : les exigences du site internet dédié à la consultation publique sont précisées par arrêté

Nov 28, 2024 | Environnement

La ministre de la transition écologique a publié, au journal officiel du 27 novembre 2024, l’arrêté du 18 novembre 2024 relatif aux caractéristiques techniques du site internet prévu à l’article R. 181-36 du code de l’environnement. Cet arrêté très important définit les exigences applicables au site internet dédié à la consultation du public, organisée au cours de la procédure d’instruction d’une demande d’autorisation environnementale. Un texte à lire attentivement pour prévenir les risques juridiques et éventuels vices de procédure qui pourraient procéder d’un site internet mal conçu. Ce site internet, qui s’inscrit dans le cadre d’une réforme profonde de la procédure d’autorisation environnementale ne doit pas simplement afficher des informations mais permettre un véritable dialogue environnemental entre toutes les parties prenantes. Présentation.

De manière générale, il convient de souligner que cet arrêté s’inscrit dans le cadre d’une réforme profonde de la procédure d’autorisation environnementale dont le pilier est la parallélisation des phases d’examen et de consultation du public. Ce site n’est plus simplement un espace d’information mais bien l’endroit d’un dialogue environnementale entre toutes les parties prenantes. On peut mesurer l’importance de ce site lorsque l’on pense au fait que le public, les élus, les associations participent de plus en plus via internet aux débats en matière d’environnement.

Les textes applicables à la création et à l’animation du site internet dédié

Pour mémoire, la mise à disposition du public consulté d’un site internet dédié est prévu à l’article L.181-10-1 du code de l’environnement. Cet article dispose :

  • d’une part, que les observations et propositions du public doivent être accessibles sur un site internet ;
  • d’autre part, que les réponses du pétitionnaire à ces observations et propositions sont également mises en ligne.

L’article L.181-10-1 du code de l’environnement est ainsi rédigé : « III. – La consultation est conduite par le commissaire enquêteur ou la commission d’enquête de manière à permettre au public de disposer d’une information complète sur le projet et de participer effectivement au processus de décision. / A cet effet : (…) 3° Les observations et les propositions transmises par voie électronique sont accessibles sur un site internet désigné dans des conditions fixées par voie réglementaire ; / 4° Les réponses éventuelles du pétitionnaire aux avis mis en ligne ainsi qu’aux observations et aux propositions du public sont transmises et publiées dans les mêmes conditions, y compris lorsque ces réponses ont été formulées lors d’une réunion publique ; »

Aux termes de l’article R.181-36 du code de l’environnement, ce site internet peut être : soit une page du site internet de la préfecture, soit un site internet dédié : « I.-Lorsque la consultation du public est réalisée dans les conditions prévues à l’article L. 181-10-1, l’information du public sur l’ouverture de cette consultation est réalisée au moins quinze jours avant le début de la consultation et après information du commissaire enquêteur ou du président de la commission d’enquête. Cette information s’effectue selon les modalités suivantes : 1° L’avis de consultation est mis en ligne sur le site de la préfecture et sur le site internet spécialement dédié à la consultation lorsque ce dernier existe ; (…) » (nous soulignons)

L’arrêté du 18 novembre 2024, publié au journal officiel de ce 27 novembre 2024, comporte une liste des exigences réglementaires applicables à ce site internet, qu’il soit mis en ligne sur le site de la préfecture ou qu’il s’agisse d’un site internet dédié créé et animé par le demandeur d’une autorisation environnementale.

Le créateur du site internet décidé à la consultation du public au cours d’une procédure d’autorisation environnementale devra se référer aux termes de l’arrêté du 18 novembre 2024, en ayant à l’esprit toute fois que cet arrêté n’est pas exhaustif : il conviendra de respecter toutes les obligations légales et réglementaires applicables, en général et pas uniquement en application du code de l’environnement, à l’information mise en ligne sur un site internet.

Au demeurant, l’arrêté du 18 novembre 2024 renvoie lui-même à un autre texte très important pour la conception du site internet : « (…) il satisfait aux obligations du règlement (UE) 2016/679 du Parlement européen et du Conseil du 27 avril 2016, relatif à la protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel ».

Le demandeur d’une autorisation environnementale est-il tenu de créer et d’animer un site internet ?

Le demandeur d’une autorisation environnementale n’est donc pas, pour l’heure, contraint de créer et de mettre en ligne dédié à la consultation du public si le site internet de la préfecture accueille cette information. Reste qu’il lui sera sans doute conseillé de le faire. Nul doute que des opposants à son projet se prévaudront d’éventuelles irrégularités dans la mise en ligne et le contenu du site internet. Le juge administratif sera sans doute appelé à se prononcer sur de nouvelles questions procédant de la dématérialisation croissante des procédures de participation du public.

Pour s’assurer la maîtrise et de la régularité de l’information mise en ligne, le pétitionnaire aura certainement intérêt à créer un site internet dédié et à vérifier que ce dernier respecte toutes les exigences législatives et réglementaires applicables. Cela suppose une veille juridique permanente car les exigences législatives et réglementaires applicables à ce sites peuvent évoluer.

Quelles sont les principales exigences relatives à la conception et au contenu du site internet dédié à la consultation du public ?

Comme cela a été précédemment indiqué, le demandeur de l’autorisation environnementale ne doit pas se borner à l’arrêté du 18 novembre 2024 pour s’assurer de la régularité du site internet dédié, s’il décide d’en créer un. Reste qu’il s’agit pour l’heure d’un texte de référence dont il convient de s’assurer de l’entier respect.

Cet arrêté comporte cinq catégories d’exigences. L’attention des demandeurs d’autorisation environnementales doit être attirée sur l’importance de ces exigences et sur ce qu’elles induisent. La présente note n’est pas exhaustive.

S’agissant des « exigences générales », on notera notamment que le site « permet l’accès aux avis requis réglementairement, ainsi qu’aux observations et propositions du public et aux réponses du pétitionnaire, sans possibilité de supprimer ou de modifier ces avis, observations, propositions et réponses. » Cette exigence est d’une particulière importance car les avis requis réglementairement doivent en effet être portés à la connaissance du public dans des délais contraints.

S’agissant des « exigences vis-à-vis du public » : le site internet dédié doit comporter un volume considérable d’informations dont certaines doivent faire l’objet d’une mise à jour permanente. Ainsi, le site internet «  comporte les renseignements utiles à la consultation, notamment l’avis de consultation, les dates d’ouverture et de clôture de cette consultation, les dates, lieux et renseignements utiles sur les réunions d’ouverture et de clôture ainsi que, le cas échéant, les permanences du commissaire enquêteur ou de la commission d’enquête. Une page d’information est prévue regroupant les dates et informations essentielles et mise à jour régulièrement, à destination du public »

Une exigence retient particulièrement l’attention : la charte utilisateur. Le site doit en effet posséder « une charte utilisateur pour encadrer les observations et propositions du public« . Des règles de modération desdites observations et propositions devront nécessairement y figurer. Il conviendra d’établir cette charte en coordination avec les services de l’Etat mais aussi avec les commissaires enquêteurs qui seront chargés d’en faire assurer le respect.

S’agissant des « exigences vis-à-vis des commissaires enquêteurs », il convient de souligner que le commissaire enquêteur devra pouvoir intervenir sur ce site internet. Notamment pour assurer la modération des observations du public mises en ligne : « il permet au commissaire enquêteur ou à la commission d’enquête d’interagir avec tous les utilisateurs ; / – il fournit un outil de modération au seul commissaire enquêteur ou aux membres de la commission d’enquête permettant de masquer toute observation ne répondant pas à la charte utilisateur. »

S’agissant des « exigences relatives au pétitionnaire », le site doit notamment lui permettre de répondre aux observations du public : « il permet au pétitionnaire d’accéder et de répondre aux avis, observations et propositions formulées. » Cette exigence est cruciale et démontre que ce site doit non pas simplement afficher des informations mais permettre un véritable dialogue environnemental entre toutes les parties prenantes.

S’agissant des « exigences relatives aux services de l’Etat », on retiendra que les services de l’Etat doivent avoir accès à ce site ce qui suppose notamment une excellente collaboration entre ces services et le pétitionnaire : « il permet un accès différencié pour les services de l’Etat, afin qu’ils puissent exporter facilement toutes les contributions et les pièces jointes associées, et afin de permettre la publication par le préfet de la synthèse des observations et propositions du public et des réponses du pétitionnaire, en cas de non-remise du rapport et des conclusions du commissaire enquêteur ou de la commission d’enquête, pendant une durée minimale de trois mois. »

Cet arrêté du 18 novembre 2024, publié de manière assez confidentielle, doit donc retenir l’attention des demandeurs d’autorisation environnementale. Il conviendra de rester très attentif à la manière dont le juge administratif exercera son contrôle quant à la légalité de ce site internet et ses conséquences pour la légalité de la décision qui interviendra sur la demande d’autorisation environnementale.

Arnaud Gossement

avocat et professeur associé à l’université Paris I Panthéon-Sorbonne

 

 

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