En bref
Hydroélectricité : Modifications des modalités d’expérimentation du dispositif du médiateur
Schéma d’aménagement et de gestion des eaux (SAGE) : Modification des dispositions relatives à l’élaboration, la modification et la révision des SAGE
Déchets : Assouplissement des conditions pour la reprise des déchets de construction par les distributeurs
Certificats d’économie d’énergie : Publication au JO de ce jour de l’arrêté du 18 novembre 2024 modifiant plusieurs textes règlementaires relatifs aux opérations standardisées d’économie d’énergie
COP 21 : les négociateurs adressent un nouveau projet d’accord aux politiques
Le Groupe ADP a adopté, ce 5 décembre 2015, un projet d’accord de 21 pages suivi d’un projet de décision de 22 pages. Une carte des consensus possibles laissée à la disposition des Gouvernements. Il appartient désormais aux représentants des Gouvernements des 195 Parties présentes au Bourget de finaliser le texte de l’accord de Paris. Il y aura bien un accord et la dynamique née à Paris pourra se poursuivre. Mais la route est encore longue pour que cet accord soit « universel, ambitieux et juridiquement contraignant ».
2Le Groupe ADP
Le « Ad Hoc Working Group on the Durban Platform for Enhanced Action » (ADP) a donc adopté, ce 5 décembre 2015, un projet d’accord et un projet de décision de la 21ème Conférence des Parties à la Convention cadre des Nations-Unies sur les changements climatiques de 1992.
Le Groupe ADP est un « organe subsidiaire » dont la création est rendue possible par la Convention de 1992. Cet organe de négociation a été créé par une décision de la 17ème Conférence des Parties (COP17) qui s’est tenue à Durban en 2011. De 2011 à 2015, ce groupe a donc négocié un texte susceptible de
La décision de la COP17 précise que les Parties ont fixé le but suivant au Groupe ADP :
« Also decides to launch a process to develop a protocol, another legal instrument or an agreed outcome with legal force under the Convention applicable to all Parties, through a subsidiary body under the Convention hereby established and to be known as the Ad Hoc Working Group on the Durban Platform for Enhanced Action »
Le but est donc l’adoption d’un accord juridiquement contraignant dans le cadre de la Convention de 1992 (CCNUCC). La date limite pour y parvenir a té fixée à 2015, lors de la COP21 qui se tient donc ces jours-ci à Paris :
« 4. Decides that the Ad Hoc Working Group on the Durban Platform for Enhanced Action shall complete its work as early as possible but no later than 2015 in order to adopt this protocol, another legal instrument or an agreed outcome with legal force at the twentyfirst session of the Conference of the Parties and for it to come into effect and be implemented from 2020; »
Un projet d’accord
Ce 5 décembre 2015, le premier motif de satisfaction tient au fait que le Groupe ADP a réussi à adopter un projet d’accord. un accord qui balance entre nationalisation/approche du bas vers le haut et internationalisation/approche haute vers le bas, de la lutte contre les changements climatiques. Fondemantalement, cet accord ne devrait pas aboutir à un transfert de souveraineté des Etats vers un organe supranational. Il procède d’une approche pragmatique où les Etats sont encouragés plutôt que contraints juridiquement à agir.
Concrètement, ce projet constitue une carte des consensus possibles. Toutefois, il ne s’agit encore que d’un projet et de nombreuses incertitudes demeurent, sur le fond comme sur la forme.
Sur la forme, même si un accord est adopté le 11 ou le 12 décembre 2015, il sera encore nécessaire que les Etats ratifient (lorsque leur droit interne le prévoit) ce texte pour qu’il puisse entrer en vigueur. Il n’est pas encore certain que la Conférence des Parties à l’Accord de Paris soit composée de la totalité des 195 Etats présents à Paris. En son temps, le protocole de Kyoto signé en 1997 avait aussi été vécu comme un succès avant que sa difficile ratification ne vienne réduire l’ambition initiale. Ainsi, si toutes les Parties doivent se mettre d’accord pour rédiger cet accord et décider de le placer dans le cadre de la Convention de 1992, il est possible que certaines de ces Parties seulement ne procèdent à son application.
Sur la forme toujours, la valeur juridique de cet accord demeure imprécise même si, de par sa structure, il se rapproche du protocole. A noter : les Etats qui signeront et ratifieront cet accord de Paris pourront pas formuler de réserves (article 24 : « No reservations may be made to this Agreement ».), ce qui contribue à éviter d’affaiblir la portée de l’accord.
Sur le fond, tous les points clés de l’accord procèdent de phrases entre crochets ou d’options. Ce qui signifie qu’il y a consensus sur le fait d’avoir un accord mais pas sur son contenu. Et tous les points clés n’y figurent pas encore. Ainsi, l’accord ne comporte aucune référence au développement des énergies renouvelables ou des économies d’énergie. Quant au prix du carbone la formulation retenue est susceptible de bien des interprétations.
Les points clés du projet d’accord
On notera :
– que l’objectif de contenir l’élévation de la température moyenne du globe à 1,5°C ou 2°C n’est pas encore tranché ;
– que le mécanisme de suivi des INDC (contributions nationales volontaires de réduction des émissions de gaz à effet de serre) demeure au cœur de l’accord mais avec des modalités encore non consensuelles. La méthode de vérification et de révision de ces contributions pourrait être renvoyée à la CMA qui se réunira après entrée en vigueur de l’accord (2020).
– que le mécanisme Pertes et Dommages ne devrait pas être supprimé ;
– que le financement demeure à négocier – dans son montant comme dans ses modalités – mais que toutes les options sont encore ouvertes ;
– que les énergies renouvelables et les économies d’énergie sont absentes du projet d’accord et du projet de décision ;
– que, s’agissant du prix à carbone, le projet ne prévoit qu’une simple reconnaissance de l’importance d’un instrument destiné à réorienter le financement. Une rédaction particulièrement faible.
– que la reconnaissance du rôle des organes politiques infranationaux (collectivités territoriales en France) est réduite à la portion congue (levels).
L’objectif : 1,5°C ou 2°C
L’article 2 du projet dispose notamment :
« The purpose of this Agreement is [to enhance the implementation of the Convention] [and] [to achieve the objective of the Convention as stated in its Article 2]. In order to strengthen the global response to the threat of climate change, Parties agree to take urgent action and enhance cooperation and support so as:
(a) To hold the increase in the global average temperature [below 1.5 °C] [or] [well below 2 °C] above pre-industrial levels by ensuring deep reductions in global greenhouse gas [net] emissions;(…) »
L’objectif est de contenir l’élévation de la température moyenne du globe en dessous de 1, 5°C ou de 2°C. L’arbitrage reste à faire pour aller plus loin que la déclaration de Copenhague COP15.
Les définitions
Un accord international est une convention entre des Parties. A l’identique d’un bon contrat, un accord international doit comporter des termes précis pour éviter, par la suite, des applications et interprétations divergentes de son contenu. C’est un pré-requis. Or, le projet d’accord de paris comporte, non seulement une foule de termes très imprécis mais, en outre, un article 1er qui a été vidé de ses définitions. Cet article 1er se borne à renvoyer aux définitions de la CCNUCC. Des expressions comme « bas carbone » ou « neutre en carbone » continueront d’avoir autant de sens que de lecteurs.
Le mécanisme de suivi des INDC
Le cœur de l’accord est constitué du mécanisme de suivi des contributions nationales volontaires de réduction des émissions de gaz à effet de serre. L’article 2 bis du projet d’accord comporte la phrase entre crochets suivante :
« [Successive [intended] nationally determined contributions will be [informed by the result of the global stocktake as defined in Article 10 of the Convention] and communicated before the expiry of the previous [intended] nationally determined contribution by the Party concerned.] »
Le lien est ainsi fait entre le suivi de la réalisation de ces INDC et l’inventaire global qui devra être réalisé par la future Conférence des Paries à l’accord de Paris (CMA), prévu à l’article 10 du projet d’accord.
Le renvoi à l’article 10 est également opéré par une option de l’article 3 : « Option 2: Each Party shall [communicate its successive][, update or confirm its] ### every five years [on a synchronized basis] [, taking into account the outcomes of the global stocktake referred to in Article 10].«
Les instruments de garantie de l’accord
L’un des enjeux de cet accord consiste à définir les instruments qui permettront de garantir le respect par les Parties de leurs engagements. Il s’agit d’un point clé de l’accord car de nature à créer ou non une relation de confiance entre Parties.
– Le premier de ces instruments sera la CMA : la Conférence des Parties à l’accord de Paris, définie à l’article 12 du projet d’accord.
– Cette CMA pourra s’appuyer sur le Secrétariat cité à l’article 8 de la Convention cadre de 1992 (article 13 du projet d’accord).
– L’article 11 prévoit (entre crochets) la possible création d’un Comité dont le rôle sera d’assurer l’application de l’accord. Un organe intéressant car il pourrait pouvoir travailler en continu alors que la CMA ne se réunit que par intervalles.
– L’article 11 prévoit (option) la création d’un « Tribunal of Climate Justice« , ce qui constituerait à elle seule une mesure spectaculaire.
A noter également : l’article 10 relatif à l’inventaire global réalisé par la CMA. La rédaction de cet article 10 a progressé :
« The CMA shall periodically assess the [overall][collective] progress towards achieving the purpose16 of this Agreement and its long-term goals. It shall do so in a comprehensive and facilitative manner, considering mitigation, adaptation and the means of implementation and support17.
2. The CMA shall undertake its first global stocktake in 2024 and every five years thereafter unless otherwise decided by the CMA.
3. The outcome of the global stocktake shall inform Parties in [undertaking their efforts and] enhancing their successive actions and support, as appropriate, [and in [preparing][and][finalizing] any successive INDC18] in accordance with relevant provisions of this Agreement, with a view to achieving the purpose and long-term goals [and increasing the ambition] of this Agreement in light of [the best available science][and][equity] [and in accordance with the principle of common but differentiated responsibilities and respective capabilities, in light of different national circumstances]. » (je souligne)
Ainsi, le premier inventaire réalisé par la CMA – qui devrait être mise en place après 2020 et l’entrée en vigueur de l’accord – pourrait intervenir en 2024 puis tous les 5 ans.
Le prix du carbone
Dans sa version du 3 décembre, le projet d’accord comportait en introduction, le considérant Pp15 suivant :
« [Acknowledging that putting a price on carbon is an important approach for the cost-effectiveness of the cuts in global greenhouse gas emissions,]
Il s’agissait ici de fixer un prix au carbone. Cette dispositions, certes déclarative, a été retirée par la suite.
L’article 6 (financement) de cette version du 3 décembre comportait en outre cette phrase entre crochets :
« [Parties [shall][should][other] implement and improve where necessary the pricing of greenhouse gas emissions.] »
Dans la version du 5 décembre 2015 adoptée par le Groupe ADP, le considérant Pp15 a disparu et l’article 6 précise désormais :
« [Parties recognise that the appropriate pricing of greenhouse gas emissions in its many forms, is an important instrument for the reorientation of investment and finance flows consistent with a pathway towards low emission and climate resilient economies and societies.] {Placement proposal: to be moved to section on mitigation} ».
Le texte est donc passé du coût du carbone à celui des émissions de gaz à effet de serre. Une nuance importante. Et l’engagement est faible : il s’agit uniquement de reconnaître l’importance d’un instrument de réorientation de investissements et flux financiers. Il s’agit plus ici de contenir un problème que d’agir à sa source pour le régler.
Conclusion
A ce stade de son élaboration, il est probable que l’accord de Paris constituera un type de convention internationale d’un genre nouveau. A mi chemin entre la convention ou le traité par lequel des Etats s’obligent par avance à des transferts de souveraineté vers des institutions supranationales et la simple déclaration de bonnes intentions.
Il est également probable que cet accord soit encore simplifié mais il importe surtout qu’il soit précisé.
Rendez-vous dans les prochains jours pour savoir si les exécutifs nationaux réussissent à adopter, non pas un accord, mais un accord qui, sans régler à lui seul le problème, contribue vraiment à la lutte contre le changement climatique.
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