En bref
Solaire : publication du décret du 3 décembre 2024 précisant les caractéristiques des panneaux solaires photovoltaïques permettant le report de l‘obligation de solarisation de certains parkings
Hydroélectricité : modifications des modalités d’expérimentation du dispositif du médiateur
Schéma d’aménagement et de gestion des eaux (SAGE) : Modification des dispositions relatives à l’élaboration, la modification et la révision des SAGE
Déchets : Assouplissement des conditions pour la reprise des déchets de construction par les distributeurs
Pénal : l’injonction prononcée par le juge des libertés et de la détention de faire cesser une pollution n’est pas subordonnée à la caractérisation d’une faute de la personne concernée (Cour de cassation)
Par arrêt du 28 janvier 2020 (n° 19-80091), la Cour de cassation a jugé, de manière inédite, que les mesures conservatoires ordonnées par le juge des libertés et de la détention, sur le fondement de l’article L. 216-13 du code de l’environnement, s’adressent à toute personne concernée par la pollution sans qu’importe la question de savoir si la responsabilité pénale de cette personne peut être engagée à raison de cette pollution.
Dans cette affaire, en juillet 2018, une pollution a été relevée dans un cours d’eau (Rhône) à hauteur d’une station de traitement et d’épuration dont l’exploitation a été confiée par un syndicat intercommunal à une société.
Une enquête pénale a alors été diligentée et des analyses ont révélé des taux de concentration en nitrites, phosphates et ions ammonium supérieurs aux normes réglementaires.
Sur demande de la Fédération départementale du Rhône et de la métropole de Lyon pour la pêche et la protection du milieu aquatique, le procureur de la République a saisi le juge des libertés et de la détention d’une requête tendant à ce qu’il soit enjoint au syndicat intercommunal et à la société de cesser tout rejet dans le milieu aquatique dépassant les seuils fixés par les normes réglementaires.
Par ordonnance du 5 septembre 2018, le juge des libertés et de la détention a fait droit à cette demande, pour une durée de six mois, sous astreinte. La société exploitante et le syndicat intercommunal ont alors interjeté appel de cette ordonnance devant la chambre de l’instruction de la Cour d’appel de Lyon.
Cette dernière a infirmé l’ordonnance du juge des libertés et de la détention. C’est la raison pour laquelle la Fédération départementale du Rhône se pourvoit en cassation à l’encontre de cet arrêt du 9 novembre 2018.
En premier lieu, pour rappel, il ressort des dispositions de l’article L. 216-13 du code de l’environnement que :
« En cas de non-respect des prescriptions imposées au titre des articles L. 181-12, L. 211-2, L. 211-3 et L. 214-1 à L. 214-6, le juge des libertés et de la détention peut, à la requête du procureur de la République, agissant d’office ou à la demande de l’autorité administrative, de la victime ou d’une association agréée de protection de l’environnement, ordonner pour une durée d’un an au plus aux personnes physiques et aux personnes morales concernées toute mesure utile, y compris la suspension ou l’interdiction des opérations menées en infraction à la loi pénale. […]
La personne concernée ou le procureur de la République peut faire appel de la décision du juge des libertés et de la détention dans les dix jours suivant la notification ou la signification de la décision.
Le président de la chambre d’instruction ou de la cour d’appel, saisi dans les vingt-quatre heures suivant la notification de la décision du juge d’instruction ou du tribunal correctionnel, peut suspendre la décision jusqu’à ce qu’il soit statué sur l’appel, sans que ce délai puisse excéder vingt jours. […] »
Cette procédure offre ainsi au juge des libertés et de la détention un pouvoir conséquent puisque celui-ci peut ordonner, pour une durée maximale d’un an, toute mesure utile destinée à mettre un terme à une pollution ou à en limiter les effets dans un but de préservation de l’environnement et de sécurité sanitaire.
En deuxième lieu, la Cour de cassation rappelle que les modalités d’application de l’article L. 216-13 précité.
En effet, cette disposition donne compétence au juge des libertés et de la détention, à la requête du procureur de la République, dans le cadre d’une enquête pénale diligentée pour non-respect des prescriptions imposées au titre des articles L. 181-12, L. 211-2, L. 211-3 et L. 214-1 à L. 214-6 du code de l’environnement, pour ordonner aux personnes concernées toute mesure utile, y compris la suspension ou l’interdiction des opérations menées en infraction à la loi pénale.
En troisième lieu, pour infirmer l’ordonnance du 5 septembre 2018 litigieuse, la Cour d’appel de Lyon a déduit de cet article L. 216-13 que l’intervention du juge des libertés et de la détention est nécessairement subordonnée au constat d’une infraction sanctionnée pénalement.
La juridiction d’appel a jugé, à tort, que la seule constatation des anomalies relevées quant aux concentrations réglementaires dans le cours d’eau à hauteur de la station de traitement et d’épuration concernée « ne saurait suffire à caractériser une faute » de nature à engager, à la charge de la société et/ou du syndicat intercommunal, « leur responsabilité pénale ou l’imputabilité contraventionnelle du non-respect des prescriptions réglementaires».
Ainsi, selon la Cour d’appel de Lyon, l’article L. 216-13 du code de l’environnement n’est applicable que lorsqu’une faute pénale est caractérisée.
En dernier lieu, la Cour de cassation juge, au contraire, que le non-respect d’une prescription obligatoire suffit et que le pouvoir du juge des libertés et de la détention de prononcer des mesures conservatoires destinées à faire cesser une pollution, au titre de l’article L. 216-13 du code de l’environnement, n’est pas subordonné à la caractérisation d’une faute pénale par la personne concernée :
« L’article L. 216-13 du code de l’environnement ne subordonne pas à la caractérisation d’une faute de la personne concernée de nature à engager sa responsabilité pénale le prononcé par le juge des libertés et de la détention, lors d’une enquête pénale, de mesures conservatoires destinées à mettre un terme à un pollution ou à en limiter les effets dans un but de préservation de l’environnement et de sécurité sanitaire».
En conséquence, la Cour de cassation juge que la Cour d’appel de Lyon a méconnu le sens et la portée de l’article L. 216-13 du code de l’environnement et « casse et annule » l’arrêt attaqué.
Laura Picavez
Avocate – Cabinet Gossement Avocats
Vous avez apprécié cet article ? Partagez le sur les réseaux sociaux :
Découvrez le cabinet Gossement Avocats
Gossement Avocats est une référence dans ses domaines d’excellence :
droit de l’environnement, droit de l’énergie, droit de l’urbanisme, tant en droit public qu’en droit privé.
À lire également
Agrivoltaïsme : une proposition de loi pour limiter à 5MWc par exploitation agricole, la puissance installée des centrales solaires
Une proposition de loi visant "un développement raisonné de l’agrivoltaïsme" devrait être prochainement déposée à l’Assemblée nationale par le député Pascal Lecamp. Ce texte comporte quatre mesures qui suscitent déjà de nombreux commentaires : la création d'une...
Déchets : rejet du recours contre deux textes organisant la filière REP des produits et matériaux de construction du bâtiment (Conseil d’Etat, 10 février 2025, n°483376)
Par une décision du 10 février 2025, le Conseil d’Etat a rejeté la requête de l’Association des recycleurs indépendants qui tendait à l’annulation de la décision de rejet implicite du ministre de la transition écologique sur la demande d’abrogation du décret...
Autoconsommation collective : exonération de l’accise sur l’électricité (projet de loi de finances pour 2025)
Aux termes du projet de loi de finances pour 2025 adopté, les opérations d’autoconsommation collective d’une puissance inférieure ou égale à 1MWc vont être exonérées de l’accise sur l’électricité (anciennement TICFE et anciennement CSPE). Le projet de loi de finances...
Charte de l’environnement : Arnaud Gossement participe au webinaire organisé le 14 février par l’Association des journalistes de l’environnement
L'association des journalistes de l'environnement organise, ce 14 février à 14h, un webinaire exceptionnel consacré au 20ème anniversaire de la Charte de l'environnement (loi constitutionnelle du 1er mars 2005). Arnaud Gossement interviendra aux côtés d'invités...
Dérogation espèces protégées : un projet de logements sociaux répond-il à une raison impérative d’intérêt public majeur au seul motif que la commune n’a pas atteint ses objectifs de construction ? (Conseil d’Etat)
Par une décision datée du 29 janvier 2025, le Conseil d'Etat a jugé que la cour administrative d'appel de Nancy a inexactement qualifié les faits en estimant qu'un projet de logements sociaux ne répondait pas à une raison impérative d'intérêt public majeur au motif...
Le Haut conseil pour le climat souligne la fragilité juridique de la Stratégie française énergie climat
Ce 31 janvier 2025, le Haut conseil pour le climat a publié son avis - sur auto saisine - sur le projet de troisième programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE 3) mis en consultation par le gouvernement, du 4 novembre au 16 décembre 2024. Si le Haut conseil pour le...
Découvrez le cabinet Gossement Avocats
Notre Cabinet
Notre valeur ajoutée :
outre une parfaite connaissance du droit, nous contribuons à son élaboration et anticipons en permanence ses évolutions.
Nos Compétences
Gossement Avocats est une référence dans ses domaines d'excellence :
droit de l'environnement, droit de l'énergie, droit de l'urbanisme, tant en droit public qu'en droit privé.
Contact
Le cabinet dispose de bureaux à Paris, Rennes et intervient partout en France.