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[webinaire] 21 novembre 2025 : « Etat de droit et Environnement : le Conseil constitutionnel face aux reculs environnementaux » (La Fabrique écologique)
[colloque] 17 octobre 2025 : intervention d’Arnaud Gossement à la IXème édition des Journées Cambacérès sur « Justice et Environnement » organisées par la Cour d’appel et la Faculté de droit de Montpellier
Déchets : vers une taxe sur les emballages plastiques relevant d’une filière de responsabilité élargie du producteur ? (Loi de finances 2026)
Le Parlement examine actuellement le projet de loi de finances pour 2026. L’article 21 de ce texte, dont l’examen se poursuit en séance publique, comporte plusieurs mesures relatives au « verdissement » de la fiscalité applicable aux déchets. Parmi les mesures envisagées : une taxe sur les emballages en plastique. Présentation.
Commentaire général
Si l’amélioration de la collecte séparée et le recyclage des emballages en plastique est une intention très louable, l’instauration d’une taxe sur les emballages en plastique présente l’inconvénient de soumettre une même catégorie de produits (les emballages en plastique) à la fois à une taxe et à l’éco-contribution au titre de la responsabilité élargie des producteurs.
Il est important, à cet égard, de rappeler que le juge administratif a rappelé à plusieurs reprises que les contributions financières dont sont redevables les producteurs de produits, en contrepartie de la prise en charge par un éco-organisme, des déchets qui en sont issus, n’est ni un prélèvement fiscal ni une taxe (cf. CE, 28 décembre 2017, n°408425) mais une « charge obligatoire qui augmente le prix des produits » (cf. CAA Paris, 23 janvier 2014, n°12PA02969). Or, en instaurant une taxe sur les emballages en plastique, le législateur prend le risque de renforcer la confusion sur la nature juridique de l’éco-contribution qui est souvent perçue, à tort, comme une taxe. Ce risque paraît d’autant plus élevé que les redevables de la taxe sont les éco-organismes ou les producteurs organisés en systèmes individuels et que les modalités de calcul de la taxe sont parfois similaires à celles prévues dans le cadre de la responsabilité élargie du producteur (en particulier s’agissant du rôle de l’Ademe).
Les objectifs de la réforme de la fiscalité des déchets. Les dispositions du projet de loi de finances pour 2026 poursuivent les objectifs suivants :
- Améliorer les incitations fiscales résultant pour les apporteurs de déchets de la taxe générale sur les activités polluantes applicable aux déchets non dangereux et à la TVA ;
- Introduire une taxe sur les emballages en plastique ;
- Codifier au sein du code sur les impositions et les services les mesures fiscales applicables aux déchets (cf. articles L. 433-1 à L. 433-130).
I. L’augmentation de la TGAP sur les déchets et l’application d’un taux de TVA unique à tous les modes de gestion des déchets
L’article 21 du projet de loi de finances pour 2026 comporte les mesures suivantes :
- une mesure de simplification, avec l’application du taux de 5,5 % à l’ensemble des prestations achetées par les collectivités en matière de collecte et de traitement des déchets ;
- une nouvelle trajectoire de hausse de la TGAP sur l’enfouissement, avec une augmentation des tarifs d’environ 10 % par an sur la période 2026-2030 ;
- une nouvelle trajectoire de hausse du tarif normal et des deux tarifs réduits de la TGAP sur l’incinération durant la même période.
Selon l’exposé des motifs, si l’application d’un taux de TVA distinct selon le mode de gestion des déchets (un taux de 5,5% pour la collecte séparée, le tri et la valorisation matière et de 10% pour les autres modes de collecte et de traitement), avait permis de réduire la part des déchets destinés à être enfouis, le recours à l’enfouissement et à l’incinération sans valorisation thermique reste encore trop élevés.
Dans ce contexte, les mesures prévues dans le projet de loi de finances poursuivent l’objectif d’inciter plus fortement au respect de la hiérarchie des modes de traitement des déchets et favoriser les filières de tri et de valorisation des déchets. en basculant d’une mesure fiscale jugée peu efficace (plusieurs taux de TVA) vers la TGAP sur les déchets, dispositif jugé plus efficace.
II. La création d’une taxe sur les emballages en plastique
L’article 21 du projet de loi prévoit de créer une taxe sur les emballages en plastique dans les conditions sont précisées aux articles L.433-105 à 130 du code des impositions sur les biens et les services.
Quels sont les emballages plastiques concernés ? Ce sont les emballages en plastique qui relèvent du principe de la responsabilité élargie du producteur (REP) et dont l’« élément structurel » est en plastique, c’est-à-dire un matériau constitué d’un polymère auquel des additifs ou d’autres substances peuvent avoir été rajoutés, conformément à la définition mentionnée à l’article 3, point 52 du règlement (UE) 2025/40 du Parlement européen et du Conseil du 19 décembre 2024 relatif aux emballages et aux déchets d’emballages.
Que recouvre précisément la taxe sur les emballages en plastique ? La taxe sur les emballages en plastique s’applique aux emballages en plastique, qui répondent aux critères visés plus haut, et au titre lesquels « est mise en œuvre, au cours d’une année pendant laquelle des déchets d’emballages en plastique non recyclés ont été produits sur le territoire de taxation, une responsabilité élargie ».
Selon l’article 21 du projet de loi, la « responsabilité élargie » désigne la prise en charge par les éco-organismes des obligations découlant de la REP, en contrepartie du versement par les producteurs d’une contribution financière ainsi que les systèmes individuels mis en place par les producteurs de produits.
Pour définir les « déchets d’emballages en plastique non recyclés », le projet de texte renvoie à la définition mentionnée par la décision (UE, EURATOM) 2020/2053 du Conseil du 14 décembre 2020 relative au système des ressources propres de l’Union européenne, laquelle renvoie sur ce point à la définition mentionnée dans la directive 94/62/CE sur les emballages et les déchets d’emballages. Il est intéressant de noter, à cet égard, qu’aux termes de la décision précitée du 14 décembre 2020, les recettes provenant de l’application d’un taux d’appel uniforme (0,80 euros par kilogramme) au poids des déchets d’emballages en plastique non recyclés produits dans chaque État membre, figurent parmi les recettes propres inscrites au budget de l’Union européenne.
C’est d’ailleurs précisément afin de limiter la contribution, aujourd’hui très importante, de la France au budget de l’Union assise sur les déchets plastiques non recyclés, qu’il est prévu d’instituer la taxe sur les emballages en plastique. L’exposé des motifs du projet de loi indique en effet que le taux de recyclage des emballages en plastique en France (25,9% en 2023) se situe à un niveau très en deçà de la moyenne en Europe (41,5%).
Sur quels territoires s’applique la taxe ? Le « territoire de taxation » comprend le territoire métropolitain, la Guadeloupe et de la Martinique, la Guyane, la Réunion, Mayotte ainsi que Saint-Martin.
Quel est le fait générateur de la taxe ? Celui-ci est constitué par l’achèvement de l’année civile au cours de laquelle les conditions cumulatives suivantes sont remplies :
- Une responsabilité élargie du producteur est mise en œuvre pour les emballages en plastique ;
- Les quantités de déchets d’emballages en plastique non recyclés ne sont pas nulles sur le territoire de taxation
Le montant de la taxe. Le montant de la taxe est calculé en tenant notamment compte d’un tarif progressif jusqu’en 2030, à partir d’un tarif de 30 euros la tonne en 2026. Un barème spécifique est prévu pour les bouteilles en plastique, ce qui s’explique par leur « surreprésentation dans les déchets abandonnés dans l’espace public ou les corbeilles de rue et par les objectifs environnementaux supplémentaires fixés par la réglementation française et européenne. »
Quelles sont les personnes assujetties ? Le projet de loi de finances prévoit que le redevable de la taxe est l’éco-organisme et le producteur organisé en système individuel, tels que désignés respectivement aux alinéas 2 et 9 de l’article L. 541-10 du code de l’environnement.
Selon l’exposé des motifs du projet de loi, il est proposé de faire contribuer « également » les éco-organismes car ces derniers sont responsables, aux côtés des collectivités territoriales, de la collecte et du recyclage de ces emballages. L’article 21 prévoit un impôt de répartition à la charge des éco-organismes (et, le cas échéant, des personnes qui mettent en place des systèmes individuels au titre de leurs obligations de responsabilité élargie des producteurs) calculé sur la même base que la contribution à l’Union européenne (quantité nationale de plastiques non recyclés) et ventilé entre éco-organismes à hauteur de leur part de marché, laquelle est appréciée en fonction des quantités d’emballages en plastique mis sur le marché par leurs adhérents.
Le rôle de l’Ademe dans la constatation de la taxe. L’Ademe constate, rend public et communique au redevable les données intervenant dans le calcul de la taxe autres que les tarifs. Il constate des données prévisionnelles ou provisoires au cours de l’année à l’achèvement de laquelle intervient le fait générateur et de l’année suivante et des données définitives au cours de la deuxième année suivante.
L’entrée en vigueur de la mesure. Les modalités d’application de cet article 21, s’agissant en particulier du rôle de l’Ademe dans le calcul du montant de la taxe, seront précisées par décret. L’application de la taxe sur les emballages est différée au 1er janvier 2029 pour les emballages en plastique professionnels afin de tenir compte de la mise en place récente, et non achevée (l’arrêté portant cahier des charges est toujours en attente de publication), de la filière REP des déchets d’emballages des professionnels.
Emma Babin – avocate associée
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On ne manquera toutefois pas de relever que dans sa version publiée, le décret a notablement évolué dans sa rédaction par rapport à sa version projet. Par exemple, le décret du 17 novembre 2025 a supprimé la catégorie des emballages mixtes, là où la version projet avait uniquement supprimé la notion d’ « alimentaire ». La distinction reposant désormais sur les emballages ménagers et professionnels, laquelle pourra être précisée par un arrêté « périmètre » pris par la ministre chargée de l’environnement (un tel projet d’arrêté avait d’ailleurs été soumis à consultation publique, en même temps que le projet de cahier des charges).
Il est difficile d’anticiper sur le cadre règlementaire de la future filière REP des emballages professionnels, dès l’instant où certaines précisions devront être apportées par le cahier des charges (prise en charge opérationnelle, modalités de détermination des coûts liés à la reprise des emballages usagés en vue de leur réemploi, barème d’éco-modulation, etc.).
Enfin, si les emballages de produits relevant d’autres filières REP et qui sont clairement identifiés au sein du décret, ne relèvent pas de la filière REP des emballages ménagers comme professionnels, le décret n’apporte aucune précision sur les modalités de compensation des coûts dans le cas où les déchets d’emballages relevant de ces produits seraient pris en charge par le ou les éco-organismes agréés au titre de la REP des emballages.
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