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Responsabilité des personnes publiques du fait des promesses non tenues (Conseil d’État, 6 décembre 2017, n°400406)
Par une décision du 6 décembre 2017, le Conseil d’Etat a, une nouvelle fois, reconnu la responsabilité d’une collectivité territoriale, du fait de promesses non tenues.
Dans cette affaire, le département du Gard avait lancé un appel à projets auprès de promoteurs aux fins d’acquisition d’un immeuble de son patrimoine en vue de réaliser un ensemble immobilier comprenant des logements sociaux. L’offre de la société requérante avait été retenue et le président du conseil général lui avait indiqué que « sans attendre la signature du compromis de vente qui ne pourra intervenir qu’après déclassement de l’immeuble du domaine public, il lui était accordé l’autorisation de déposer une demande de permis de construire ». Or, la collectivité avait par la suite abandonné le projet, tandis que la société attributaire avait déjà réalisé diverses études et déposé des demandes de permis de construire.
La société retenue et une société par laquelle la demande de permis de construire avait été présentée ont alors saisi le juge administratif d’une demande en réparation du préjudice subi, à titre principal au titre de la responsabilité pour faute de la collectivité du fait de sa promesse non tenue et, à titre subsidiaire, au titre de l’enrichissement sans cause.
En premier lieu, alors que le Tribunal administratif avait, en première instance, rejeté la demande, la Cour administrative d’appel de Marseille avait au contraire reconnu la responsabilité de la collectivité du fait des promesses non tenues de la collectivité (cf. CAA Marseille, 1er avril 2016, n° 14MA03826).
La Cour administrative d’appel de Marseille avait alors procédé à un examen approfondi des circonstances de fait, en retenant
– d’une part, la faute de la collectivité au motif qu’elle avait incité « fermement » la société à exécuter des prestations relatives à la réalisation des études préalables au dépôt de demandes d’autorisation d’urbanisme et au dépôt de ces demandes, en soulignant néanmoins que la collectivité ne pouvait pas être regardée comme ayant incité à exposer des frais autres que ceux relatifs aux demandes d’autorisations d’urbanisme ;
– d’autre part, l’imprudence des sociétés requérantes, de nature à exonérer la collectivité d’une partie de sa responsabilité, dans la mesure où les sociétés dont l’activité a pour objet de porter des projets immobiliers avaient engagé des études et réalisé des prestations sans attendre la signature du contrat relatif à la réalisation du programme immobilier.
Si la Cour avait admis la réparation du préjudice constitué par les frais d’études engagés, elle avait écarté le manque à gagner du fait de la perte de chance de réaliser l’ensemble de l’opération, qu’elle avait jugé sans lien direct avec la faute retenue. Elle avait alloué sur ce fondement un montant de 7 976,12 euros et 172 158,20 euros à chacune des sociétés requérantes.
A noter que la Cour administrative d’appel de Marseille avait écarté la demande subsidiaire au titre de l’enrichissement sans cause, dans la mesure où les requérants ne démontraient pas que leur appauvrissement aurait eu pour conséquence un enrichissement de l’administration.
En deuxième lieu, par la décision du 6 décembre 2017, le Conseil d’Etat confirme l’arrêt rendu par la Cour administrative d’appel de Marseille, en retenant que le département du Gard avait « fermement incité la société S. à exécuter certaines prestations et avait formellement promis à celle-ci la signature d’un contrat ».
A noter que l’affaire a néanmoins été renvoyée devant la Cour administrative d’appel, dès lors que le Conseil d’Etat a constaté une contradiction entre les motifs et le dispositif de l’arrêt, sur le préjudice indemnisable.
Cette affaire constitue donc une nouvelle reconnaissance d’une promesse fautive d’une personne publique.
Traditionnellement rarement admise, la responsabilité des personnes publiques sur ce fondement est désormais plus souvent reconnue.
En effet, il y a quelques mois, la Cour administrative d’appel de Marseille avait déjà indemnisé une société du coût de ses études pour un projet abandonné dès lors que la commune avait « donné des assurances précises et constantes […] sur la faisabilité de son projet d’implantation d’un parc éolien dans une zone où ce dernier ne pouvait pas être implanté eu égard à la sensibilité du site » (cf. CAA Marseille, 23 mai 2017, n° 15MA05017).
Si cette évolution se confirme, les développeurs de projets pourront se prévaloir d’une jurisprudence susceptible plus protectrice de leurs intérêts.
Margaux Caréna
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