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Convention citoyenne pour le climat: analyse de la proposition visant à renforcer les clauses environnementales dans les marchés publics
Le Groupe de Travail « Produire et Travailler » de la Convention citoyenne pour le climat propose un nouvel objectif à l’horizon 2030 visant à renforcer les clauses environnementales dans les marchés publics (objectif PT7) et émet une proposition en ce sens (PT7.1). Cette proposition se fonde sur un constat : les marchés publics constituent à la fois un levier financier fort pour réaliser la transition et sont un symbole pour encourager la transformation de la société. Analyse.
I. Contexte de la proposition
La proposition du groupe de travail s’inscrit dans la continuité des réglementations successives, visant à « verdir » la commande publique.
En premier lieu, des dispositifs favorisant la prise en compte du développement durable et de la protection de l’environnement ont été progressivement intégrés dans le droit des marchés publics français, sous l’impulsion de l’Union européenne et en particulier de la directive européenne 2004/18/CE du 31 mars 2004.
Ainsi, dès 2004, le code des marchés publics a autorisé les considérations environnementales comme critères d’attribution, à condition qu’elles soient en rapport avec l’objet du marché.
Cette politique a connu une nouvelle étape avec la réforme du droit de la commande publique intervenue en avril 2016, à la suite de l’adoption de la directive européenne n°2014/24/UE sur la passation des marchés publics, qui a ouvert aux acheteurs la possibilité d’insérer des critères et des clauses environnementales dans les marchés publics.
Ainsi, l’article L. 2112-2 du code de la commande publique prévoit désormais que :
« Les clauses du marché précisent les conditions d’exécution des prestations, qui doivent être liées à son objet.
Les conditions d’exécution peuvent prendre en compte des considérations relatives à l’économie, à l’innovation, à l’environnement, au domaine social, à l’emploi ou à la lutte contre les discriminations ».
Cette possibilité est également prévue pour les marchés de défense et de sécurité (cf. article R. 2312-4 du même code). Par ailleurs, le code de la commande publique prévoit que l’acheteur peut imposer que les moyens utilisés pour exécuter tout ou partie d’un marché soient localisés sur le territoire des Etats membres de l’Union européenne afin, notamment, de prendre en compte des considérations environnementales (cf. article L. 2112-4 du même code).
Encore récemment, la loi n° 2020-105 du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire a modifié le code de la commande publique de manière à valoriser le réemploi dans la commande publique.
En deuxième lieu, parallèlement, la France, dans le cadre de sa « Stratégie Nationale de Transition Écologique vers le Développement Durable » s’est fixée comme objectif de mener une politique de commande publique durable ambitieuse. Le Plan National d’Action pour les Achats Publics Durables 2015-2020, adopté en février 2015 a fixé notamment comme objectif pour la commande publique en France à l’horizon 2020, que 30 % des marchés passés au cours de l’année comprennent au moins une disposition environnementale.
II. Contenu de la proposition
La proposition visant à « renforcer les clauses environnementales dans les marchés publics » se décompose en plusieurs sous-propositions et deux mesures en sont extraites.
En premier lieu et à titre principal, le groupe de travail propose de modifier le code de la commande publique de manière à rendre la clause environnementale obligatoire et l’étendre à tous les marchés publics.
Autrement dit, le recours à la clause environnementale ne serait plus facultatif. En outre, il ne viserait pas les marchés qui ont une dimension environnementale mais l’ensemble des marchés publics, sans distinction. Selon nous, cette proposition pose problème, au regard de l’impératif d’adéquation des critères avec l’objet du marché. Sa conformité au droit de l’Union européenne pourrait également poser question.
En outre, le rapport propose que le « critère environnemental » intervienne pour, au minimum, 20 % de la note. Dès lors, la valeur du critère environnemental serait, quel que soit l’objet du marché, notable. Il s’agit donc d’une proposition très concrète, qui aurait un impact fort sur la commande publique.
En deuxième lieu, le groupe de travail propose en guise de seconde mesure de « mettre en avant la valeur écologique des offres avec la notion « d’offre écologiquement la plus avantageuse » ». L’idée étant de « montrer que l’offre valorisée sur les marchés publics est la plus viable écologiquement et pas la plus intéressante économiquement ».
Concrètement, la notion de « valeur écologique supplanterait ainsi la notion de « valeur économique ».
Ainsi, le rapport préconise de favoriser les entreprises vertueuses et des achats plus locaux et plus durables. Il propose que les marchés publics imposent le respect des règlementations européennes en vigueur, comme par exemple le label Bio et que les offres induisant moins de déplacements, donc moins d’émissions de gaz à effet de serre, soient privilégiées.
A la lecture du rapport, le groupe de travail met l’accent sur l’importance de favoriser la proximité géographique. Cet aspect de la proposition est néanmoins sensible puisqu’il pourrait se heurter au principe de libre concurrence en droit de l’Union européenne.
A noter que le rapport précise que la réforme n’a pas vocation à alourdir inutilement la procédure existante et propose de « veiller à ce que la mesure la plus avantageuse écologiquement ne soit pas pour autant beaucoup plus coûteuse que la plus avantageuse économiquement ». En pratique, l’équilibre entre intérêts économique et écologique peut s’avérer délicat à trouver.
En dernier lieu, conscients de l’importance de la réforme proposée, les membres du groupe de travail proposent d’accompagner et de sensibiliser les personnes publiques.
En ce sens, il est proposé d’actualiser et d’accentuer la formation des fonctionnaires et des élus en charge des marchés publics et, de manière inédite, de « mettre en place un réseau de « référents » pour aider les donneurs d’ordres publics à rédiger leurs marchés et aux candidats à y répondre en respectant les clauses environnementales ».
Les membres du groupe de travail considèrent en effet qu’un accompagnement est indispensable à la mise en œuvre de cette proposition, tout en soulignant que la formation de toutes les personnes publiques concernées serait couteuse. Dès lors, ils préconisent la mise en place de ce réseau de « personnes facilitantes ».
Si l’idée de recourir à un autre modèle que la formation parait pertinente, les modalités pratiques ne sont pas précisées. Ainsi, le groupe de travail ne donne pas d’indications sur les membres envisagées de ce réseau ou encore son fonctionnement. Cette proposition reste donc, en l’état, relativement théorique.
En conclusion, la proposition du groupe de travail « Produire et Travailler » s’inscrit dans la continuité des mesures actuelles tendant à verdir la commande publique – et qui sont à encourager –. Pour autant, le fait d’imposer d’intégrer un critère environnemental à hauteur de 20% à l’ensemble des marchés publics, sans dérogation, parait très difficile à mettre en œuvre et ne parait pas adapté à l’ensemble des situations.
Surtout, une telle généralisation du critère environnemental relèverait davantage de l’impulsion du droit de l’Union européenne.
Margaux Bouzac
Avocate sénior
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