En bref
Certificats d’économies d’énergie (CEE) : arrêté du 7 avril 2025 modifiant l’arrêté du 4 septembre 2014
Modification de l’arrêté tarifaire S21 : refonte majeure actée et à venir des conditions d’achat pour les installations sur toiture et ombrière inférieure ou égale à 500 kWc
Code minier : publication de l’arrêté du 3 avril 2025 soumettant les décisions d’octroi, d’extension ou de prolongation des concessions et permis exclusifs de recherches (PER) à évaluation environnementale
Déforestation importée : consultation publique sur un projet de règlement modifiant le règlement 2023/1115 (RDUE)
ICPE et Covid-19: décret du 1er avril 2020 portant dérogation au principe de suspension des délais pendant la période d’urgence sanitaire
Le ministère de la transition écologique a publié aujourd’hui au Journal officiel le décret n° 2020-383 du 1er avril 2020 portant dérogation au principe de suspension des délais pendant la période d’urgence sanitaire liée à l’épidémie de covid-19. Ce décret « dégèle » ainsi de nombreux délais en matière administrative aux motifs de la sécurité, la protection de la santé et de la salubrité publique et la préservation de l’environnement, ce qui impacte particulièrement les ICPE. Analyse.
Introduction. Pour rappel, la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d’urgence pour faire face à l’épidémie de covid-19, a permis au Gouvernement d’adopter une série d’ordonnances, parmi lesquelles l’ordonnance n° 2020-306 du 25 mars 2020 relative à la prorogation des délais échus pendant la période d’urgence sanitaire et à l’adaptation des procédures pendant cette même période.
Par principe, l’article 1er de cette ordonnance prévoit que les délais impactés (prorogés ou suspendus) sont ceux qui ont expiré ou qui expirent entre le 12 mars 2020 et le 24 juin 2020. Les articles 7 et 8 de cette ordonnance prévoient ainsi des adaptations particulières pour les délais et procédures en matière administrative.
Toutefois, l’article 9 de cette ordonnance prévoit que :
« Par dérogation aux dispositions des articles 7 et 8, un décret détermine les catégories d’actes, de procédures et d’obligations pour lesquels, pour des motifs de protection des intérêts fondamentaux de la Nation, de sécurité, de protection de la santé, de la salubrité publique, de préservation de l’environnement et de protection de l’enfance et de la jeunesse, le cours des délais reprend. […] »
C’est sur le fondement de cet article que le décret ici commenté a été adopté.
Son article 1 dispose ainsi que, « compte tenu des enjeux pour la sécurité, la protection de la santé et de la salubrité publique et la préservation de l’environnement », de très nombreux délais, détaillés ci-après, reprennent leur cours à la date d’entrée en vigueur du présent décret (le 3 avril 2020), par dérogation à ce qui a donc été prévu par les textes précédemment rappelés.
I. Les délais applicables à certains contrôles, mesures, analyses et surveillances ayant pour objet la sécurité, la protection de la santé et de la salubrité publique et la préservation de l’environnement.
En premier lieu, cela concerne de nombreuses décisions prises en matière d’installations classées pour la protection de l’environnement (ICPE), qui relèvent toutes du code de l’environnement :
– les mises en demeure et les sanctions administratives prévues en cas d’exploitation sans titre (article L. 171-7) ;
– les mises en demeure et les sanctions administratives prévues en cas de non-respect des prescriptions applicables à l’exploitation (article L. 171-8) ;
– les arrêtés ministériels fixant des prescriptions générales applicables aux ICPE soumises à autorisation (article L. 512-5), à enregistrement (article L. 512-7) et à déclaration (article L. 512-10) ;
– les arrêtés préfectoraux fixant des prescriptions générales applicables aux ICPE soumises à déclaration (article L. 512-9) ;
– les arrêtés préfectoraux portant autorisation environnementale (article L. 181-12), autorisation environnementale pour modification substantielle et les prescriptions complémentaires (article L. 181-14) ;
– les arrêtés préfectoraux portant enregistrement et prescriptions particulières (article L. 512-7-3) ;
– les arrêtés préfectoraux édictant des prescriptions spéciales pour des ICPE soumises à déclaration (article L. 512-12) ;
– les arrêtés préfectoraux portant prescriptions de mesures nécessaires en cas d’accident, d’incident, d’inobservations de certaines conditions ou de tout autre dangers ou inconvénients (article L. 512-20).
Il convient donc de souligner que, pour l’essentiel, le fonctionnement des installations classées pour la protection de l’environnement se poursuit conformément au droit commun. En effet, aucun délai n’est désormais « adapté » pour :
– la fixation de prescriptions générales ;
– le respect des prescriptions des autorisations, enregistrements et déclarations ;
– le respect des arrêtés de prescriptions complémentaires ;
– le respect des mises en demeure ainsi que des sanctions administratives.
En deuxième lieu, sont également concernés certaines décisions prises en matière d’installations, ouvrages, travaux et activités (IOTA), qui relèvent également du code de l’environnement :
– les arrêtés portant autorisation environnementale et les prescriptions nécessaires, ainsi que les arrêtés de prescriptions complémentaires, en tant qu’ils portent sur la sécurité ou la sûreté des ouvrages hydrauliques (articles R. 181-43 et R. 181-45) ;
– les arrêtés ministériels et mesures prises relatives à tout événement ou évolution concernant un barrage ou un système d’endiguement ou leur exploitation et mettant en cause ou susceptible de mettre en cause la sécurité des personnes ou des biens (article R. 214-125).
En troisième lieu, cela concerne également certaines décisions prises en matière de déchets, qui relèvent également du code de l’environnement :
– les mises en demeure et les sanctions administratives prévues en cas d’abandon ou de gestion non conforme de déchets (article L. 541-3) ;
– les mesures prises en cas de présence d’un véhicule inutilisable ou d’une épave (articles L. 541-21-3 à L. 541-21-5) ;
– les mesures prescrites en cas de transfert interrompu ou de transfert illicite de déchets (article L. 541-41), ainsi que les mises en demeure et sanctions administratives prévues en cas de non-respect de ces prescriptions (article L. 541-42).
En quatrième lieu, d’autres types de décisions relevant du code de l’environnement sont concernées :
– les mises en demeure de satisfaire aux obligations relatives aux contrôles des produits chimiques (article L. 521-17), ainsi que les sanctions administratives en cas de non-respect de celles-ci (article L. 521-18) ;
– les arrêtés préfectoraux de prescriptions d’aménagement et d’exploitation des ouvrages d’infrastructure jugées indispensables pour préserver la sécurité des populations, la salubrité et la santé publiques directement ou indirectement par pollution du milieu (article L. 551-3) ;
– les mesures nécessaires à prendre relatives à la sécurité des canalisations de transport et de distribution à risques (article L. 554-9), ainsi que certaines opérations de contrôle prévues par les arrêtés ministériels prescrivant des prescriptions techniques pour ces canalisations de transport et de distribution à risques (article R. 554-44) ;
– les arrêtés ministériels prévoyant les exigences essentielles de sécurité et les autres exigences fonctionnelles applicables aux matériels à gaz (article R. 557-8-3) ;
– les arrêtés ministériels prévus pour l’installation et la mise en service des équipements sous pression, des récipients à pression simples et des équipements sous pression nucléaires (article R. 557-14-3), ainsi que pour leurs modifications et réparations (article R. 557-14-5), et leur suivi en service lorsqu’ils sont installés au sein d’ICPE (article R. 557-14-4).
En cinquième lieu, sont également visées certaines décisions relevant du code minier :
– les mesures nécessaires de protection en cas de travaux de recherches ou d’exploitation d’une mine et l’exécution obligatoire de ces mesures en cas de manquement (article L. 173-2) ;
– les mesures de retrait de titre ou d’autorisation miniers après mise en demeure en cas de manquements (article L. 173-5 du code minier).
En sixième lieu, sont également visées certaines décisions relevant du code de l’énergie :
– les mises en demeure et sanctions administratives prévues en cas de manquements à plusieurs dispositions de ce code (article L. 142-31) ;
– les arrêtés préfectoraux d’autorisation d’exécuter les travaux (article R. 521-31) ainsi que les prescriptions complémentaires (articles R. 521-40 et R. 521-46) portant sur la sécurité et la sûreté des ouvrages hydrauliques.
II. Les délais de réalisation de certains travaux, des prélèvements, des vidanges de plans d’eau, des actions d’entretien de cours d’eau, des dragages et des mesures d’évitement, de réduction et de compensation.
Sont ainsi concernées l’ensemble de ces actions dans le cadre des décisions suivantes :
– les autorisations environnementales au titre de la loi sur l’eau (L. 181-1-1° du code de l’environnement : les installations, ouvrages, travaux et activités) ;
– les arrêtés de prescriptions spécifiques pour les opérations soumises à déclaration au titre de la loi sur l’eau (article R. 214-35 du code de l’environnement) ;
– les dérogations à l’interdiction de destruction d’espèces protégées et de leurs habitats (article L. 411-2 du code de l’environnement).
III. Les délais mentionnés dans certaines décisions de l’Autorité de sûreté nucléaire.
Les décisions concernées sont celles qui ont été adoptées à compter de l’entrée en vigueur du présent décret et jusqu’au terme de la période mentionnée au I de l’article 1er de cette même ordonnance, soit du 3 avril 2020 jusqu’au 24 juin 2020.
Il s’agit des décisions suivantes :
– les mises en demeure et les sanctions administratives prévues par les articles L. 171-7 et L. 171-8 du code de l’environnement, en cas d’exploitation sans titre ou de non-respect des prescriptions applicables à l’installation nucléaire ;
– les mesures nécessaires en cas de menace pour la sécurité, la santé et la salubrité publiques ou la protection de la nature et de l’environnement (article L. 593-20 du code de l’environnement) ;
– la suspension du fonctionnement de l’installation nucléaire en cas de risques graves et imminents (article L. 593-22 du code de l’environnement) ;
– les sanctions administratives prévues en cas de manquement (article L. 596-4 du code de l’environnement) ;
– les mesures prévues en cas de défaillance de l’exploitant d’une installation nucléaire (article L. 596-5 du code de l’environnement) ;
– les sanctions administratives prévues en cas de manquement en matière de radioprotection (article L. 1333-31 du code de la santé publique).
IV. Enfin, l’article 1er de ce décret prévoit que les délais suivants reprennent également leur cours normal à compter du 3 avril 2020 :
– les délais d’élaboration et d’homologation des plans annuels de répartition du volume d’eau faisant l’objet de l’autorisation de prélèvement (article R. 214-31-3 du code de l’environnement) ;
– les délais notifiés par la direction de la sécurité de l’aviation civile aux exploitants d’aérodromes dans le cadre de l’exercice du suivi mentionné à l’article 6 de l’arrêté du 28 août 2003 relatif aux conditions d’homologation et aux procédures d’exploitation des aérodromes.
Notre conseil
1. Il importe tout d’abord de faire le point sur chaque délai et vérifier si celui-ci a bien été surpendu et/ou dégelé.
2. En cas de dégel d’un délai, il convient de faire le point sur les effets de la période de suspension qui a couru du 12 mars au 3 avril 2020 (lendemain de la publication au JO du décret du 1er avril 2020).
Camille Pifteau
Avocate – cabinet Gossement Avocats
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