En bref
Certificats d’économies d’énergie (CEE) : arrêté du 7 avril 2025 modifiant l’arrêté du 4 septembre 2014
Modification de l’arrêté tarifaire S21 : refonte majeure actée et à venir des conditions d’achat pour les installations sur toiture et ombrière inférieure ou égale à 500 kWc
Code minier : publication de l’arrêté du 3 avril 2025 soumettant les décisions d’octroi, d’extension ou de prolongation des concessions et permis exclusifs de recherches (PER) à évaluation environnementale
Déforestation importée : consultation publique sur un projet de règlement modifiant le règlement 2023/1115 (RDUE)
PFAS : le point sur les textes et la jurisprudence relatifs aux substances per- et polyfluoroalkylées
Les risques pour l’environnement et la santé publique des substances per- et polyfluoroalkylées (PFAS) sont de mieux en mieux connus et qualifiés, en raison de leur persistance dans l’environnement et de leurs effets sanitaires. En conséquence, le droit de l’Union européenne et le droit interne comportent un nombre croissant de dispositions pour prévenir et gérer ces risques. Dans ce contexte, la présente note est consacrée à un état des lieux du droit positif et de la jurisprudence de référence.
I. L’encadrement des PFAS par le droit de l’Union européenne
Directive (UE) n° 2024/3019 du 27 novembre 2024 relative au traitement des eaux résiduaires urbaines Publiée au Journal officiel de l’Union européenne du 12 décembre 2024, cette directive impose aux États membres de renforcer la surveillance des PFAS dans les eaux résiduaires urbaines. Elle prévoit notamment des mesures de surveillance pour les stations d’épuration alimentant des zones de captage d’eau potable pour les agglomérations de plus de 10 000 habitants (cf. Article 21). La directive souligne également la nécessité d’une évaluation de la faisabilité d’un système de responsabilité élargie des producteurs pour les produits contenant des PFAS (cf. Considérant 54), renforçant ainsi la lutte contre cette pollution persistante.
Règlement (UE) 2024/573 du 7 février 2024 relatif aux gaz à effet de serre fluorés. Ce règlement étend la régulation des PFAS aux gaz à effet de serre fluorés, dont certains sont des PFAS ou se dégradent en PFAS. Conformément au principe de précaution, il encourage les entreprises à rechercher des alternatives moins nuisibles pour la santé, le climat et l’environnement (cf. Considérant 7).
Règlement (UE) 2025/40 du 19 décembre 2024 sur les emballages. Aux termes de ses considérants 20 et 21, le Règlement estime que les PFAS représentent un danger pour l’environnement et la santé humaine. À compter du 12 août 2026, les emballages destinés à entrer en contact avec des denrées alimentaires ne pourront plus contenir des concentrations de PFAS égales ou supérieures à des seuils spécifiques précisés par le Règlement en son article 5.
II. L’encadrement des PFAS par le droit interne
Le plan d’action interministériel sur les PFAS de 2024. Remplaçant celui de 2023, ce plan vise à approfondir les connaissances sur les méthodes de mesure des émissions de PFAS et leur dissémination, en élargissant les investigations aux sédiments, aux organismes vivants et aux biens de consommation. Afin d’améliorer la surveillance, il prévoit également l’extension du suivi des PFAS aux stations d’épuration de plus de 10 000 équivalents-habitants, aux rejets atmosphériques des installations d’incinération, aux eaux brutes et traitées, ainsi qu’aux sols et au littoral. En outre, la surveillance des PFAS sera élargie à de nouvelles substances et à des secteurs jusqu’ici non couverts, comme les matières fertilisantes.
Arrêté ministériel du 31 octobre 2024 relatif à l’analyse des substances per- et polyfluoroalkylées dans les émissions atmosphériques des installations d’incinération, de co-incinération et d’autres traitements thermiques de déchets. Les exploitants de certaines ICPE sont tenus de procéder à une campagne de prélèvements et d’analyses des substances PFAS listées en annexe. Ces analyses doivent être effectuées sur l’ensemble des points d’émission atmosphérique canalisés résultant du traitement thermique des déchets (cf. Article 2). La liste annexée comprend 49 substances PFAS.
Loi n° 2025-188 du 27 février 2025 relative à la protection contre les risques PFAS (cf. notre commentaire). Voici une synthèse des principales dispositions de cette loi.
Interdiction progressive des Pfas dans certains produits. Afin de limiter l’exposition de la population et de l’environnement à ces substances, la loi prévoit une interdiction progressive de leur utilisation dans plusieurs catégories de produits. À compter du 1ᵉʳ janvier 2026, seront interdites la fabrication, l’importation, l’exportation et la mise sur le marché des cosmétiques contenant des PFAS, des farts de ski, ainsi que des vêtements, chaussures et produits imperméabilisants, à l’exception des équipements de protection destinés aux militaires et aux pompiers. À partir de 2030, cette interdiction s’étendra à l’ensemble des textiles, y compris ceux utilisés dans l’ameublement, à l’exception des textiles techniques à usage industriel, dont la liste sera définie par décret. La loi précise toutefois que ces interdictions ne concerneront pas les produits contenant uniquement des traces résiduelles de PFAS, dont les seuils de concentration admissibles seront fixés ultérieurement par décret (cf. article L. 524-1 du code de l’environnement).
Surveillance et régulation des PFAS dans les eaux. La loi impose aux autorités sanitaires d’effectuer des analyses régulières portant sur une liste de PFAS établie par décret. Cette liste pourra être élargie en fonction de l’évolution des connaissances scientifiques et de la capacité des laboratoires à détecter d’autres PFAS (cf. article L.1321-9-1 du code de la santé publique). Dans le cadre de cette surveillance, les agences régionales de santé devront établir un bilan annuel des analyses menées sur l’eau potable, y compris celle vendue en bouteille. À partir de ces résultats, un rapport national sera publié chaque année par le ministère de la Santé afin d’évaluer l’exposition des populations aux PFAS (cf. article 5 de la loi). Par ailleurs, la loi fixe un objectif de suppression progressive des rejets aqueux de PFAS issus des activités industrielles. L’État devra ainsi établir une trajectoire nationale visant à mettre fin à ces rejets d’ici cinq ans. Afin d’accompagner les collectivités locales dans la dépollution des eaux, un plan de financement spécifique devra être mis en place par le gouvernement. Cette mesure répond à une problématique économique importante, certaines collectivités devant déjà supporter des coûts élevés liés au traitement de l’eau contaminée (cf. article L. 523-6-1 du code de l’environnement).
Accès à l’information et transparence pour le public. La loi prévoit la mise en ligne d’une carte interactive recensant l’ensemble des sites industriels, anciens et actuels, ayant émis des PFAS dans l’environnement. Cette carte, qui devra être mise à jour au moins une fois par an, indiquera également les quantités de PFAS émises par ces sites (cf. article L.1321-9-1 du code de la santé publique).
Mise en place d’une redevance sur les rejets de PFAS. En application du principe « pollueur-payeur », la loi a instauré une redevance spécifique applicable aux ICPE soumises à autorisation et impliquées dans des activités générant des rejets de PFAS dans l’eau. Le seuil de perception de cette redevance est fixé à 100 grammes de PFAS rejetés par an. Le montant de la redevance est de 100 euros pour chaque tranche de 100 grammes rejetés (cf. Article L. 213-10-2 du code de l’environnement). Il convient de noter que les décrets d’application n’ont pas encore été publiés.
III. La jurisprudence relative aux PFAS
Tribunal administratif de Lyon, ref., 20 juin 2024, n°2405279. Le juge des référés du tribunal administratif de Lyon a suspendu l’arrêté préfectoral du 1er février 2024 qui prenait acte de la création par la société Daikin Chemical France d’une nouvelle unité de fabrication dans son usine de Pierre-Bénit. Le juge administratif a, à cette occasion, reconnu la toxicité des PFAS, leur persistance dans l’environnement, ainsi que leurs effets sur la santé humaine. Il a jugé que bien que les valeurs d’émission déclarées par l’exploitant ne dépassent pas les seuils de référence, le site étant situé dans une zone densément peuplée au sud de Lyon, il convient de prendre en compte les importantes émissions de PFAS générées par les usines locales depuis des décennies. [À la suite de cette suspension, l’exploitant a soumis un dossier modifié, et la préfète a autorisé le projet par un arrêté en date du 15 octobre 2024, imposant des prescriptions complémentaires à l’établissement – par une décision du 23 janvier 2025, le juge des référés du tribunal administratif de Lyon a rejeté la requête demandant la suspension de cet arrêté (cf. TA Lyon, 23 janvier 2025, n°2412963)].
Tribunal judiciaire de Lyon, 2 août 2024, n°24/00538. Le tribunal judiciaire de Lyon a ordonné une expertise sur le fondement de l’article 145 du code de procédure civile. Il a ainsi désigné un expert chargé d’analyser la pollution aux PFAS émise par deux installations ICPE, d’évaluer la responsabilité potentielle des exploitants et de proposer des mesures de remédiation.
Tribunal administratif de Lyon, 13 septembre 2024, n°2407723. Par une ordonnance du juge des référés, la requête tendant à la suspension de l’arrêté préfectoral par lequel la préfète du Rhône a imposé des prescriptions complémentaires à la société Arkema a été rejetée. Ces prescriptions faisaient suite au dépôt, par l’exploitant, de dossiers de porter à connaissance relatifs, d’une part, à l’installation d’un nouveau réacteur de polymérisation, et d’autre part, à l’augmentation de la capacité de stockage d’un réacteur existant, dans un contexte de présence de PFAS.
Cour de cassation, 18 mars 2025, n°24-81.339 : La Cour de cassation a confirmé l’arrêt par lequel la cour d’appel de Lyon du 11 janvier 2024 avait jugé irrecevable l’appel formé par des riverains et des associations contre une ordonnance du juge des libertés et de la détention (JLD) dans le cadre d’un référé environnemental. Ces derniers avaient demandé au procureur de la République de saisir le JLD pour faire cesser les infractions environnementales d’un exploitant d’une installation classée, notamment en raison du rejet de substances PFAS. Le juge avait rejeté la demande, estimant que des mesures suffisantes avaient déjà été prises par le préfet. Les requérants avaient fait appel sur la base de l’article L. 216-13 du code de l’environnement, qui permet à « la personne concernée » de contester une décision du JLD. Cependant, la cour d’appel avait interprété cette notion comme ne visant que la personne mise en cause pour non-respect des prescriptions environnementales, excluant ainsi les victimes de pollution. La Cour de cassation a validé cette interprétation, confirmant que le droit d’appel est réservé au procureur de la République et à la personne mise en cause.
En conclusion, la problématique des PFAS a pour conséquence un cadre juridique et un contentieux en croissance. A titre d’exemple, Eau de Paris, au moyen d’une plainte contre X déposée fin mars 2025 devant le tribunal judiciaire de Paris, cherche à établir la responsabilité des producteurs de ces substances et à garantir l’application effective du principe du pollueur-payeur. Cette démarche s’inscrit dans un contexte où plus de la moitié des ICPE ayant transmis des données, soit 59,6 %, ont détecté des PFAS dans leurs rejets aqueux.
Ce cadre continuera sans doute à s’étoffer avec, notamment, la publication des décrets d’application de la loi n° 2025-188 du 27 février 2025. Par ailleurs, plusieurs arrêtés ministériels essentiels, tels que celui concernant la surveillance des PFAS dans les stations d’épuration, sont toujours en attente, ce dernier étant actuellement soumis à consultation publique (cf. notre article). Sur le plan européen, la révision du règlement REACH ainsi que l’éventuelle adoption d’une réglementation spécifique aux PFAS sont encore en cours de discussion.
Marie Anderco – juriste / élève avocate
cabinet Gossement Avocats
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