Appel d’offres solaire au sol : le droit de l’urbanisme au coeur du cahier des charges

Sep 4, 2016 | Energie – Climat

L’Etat vient de publier le cahier des charges de l’appel d’offres portant sur la réalisation et l’exploitation d’Installations de production d’électricité à partir de l’énergie solaire « Centrales au sol de puissance comprise entre 500 kWc et 17 MWc ». Un cahier des charges marqué par des exigences précises en matière d’urbanisme.

Cet appel d’offres porte sur la réalisation et l’exploitation d’installations de production d’électricité à partir de centrales photovoltaïques au sol situées en France métropolitaine.

Présentation générale. L’appel d’offres comporte six périodes de candidatures qui s’ouvriront de manière régulière, la première débutera le 9 janvier 2017, la dernière s’achèvera le 3 juin 2019.

Pour être éligible, la puissance des installations doit être comprise entre 500 kWc et 17 MWc.

Le cahier des charges de l’appel d’offres répartit les installations selon les trois familles :

  • Installations photovoltaïques au sol de puissance strictement supérieure à 5 MWc et inférieure ou égale à 17 MWc ;
  • Installations photovoltaïques (ou autre installation de production d’électricité à partir de l’énergie solaire) au sol de puissance strictement supérieure à 500 kWc et inférieure ou égale à 5 MWc ;
  • Installations photovoltaïques sur ombrières de parking de puissance strictement supérieure à 500 kWc et inférieure ou égale à 10 MWc.

Les 3000 MWc ouverts par l’appel d’offres seront ventilés selon les six périodes et les trois familles présentées. Les lauréats désignés bénéficieront d’un contrat de complément de rémunération. Les projets fondés sur financement participatif seront valorisés.

La notation des candidatures sera pondérée entre les critères du prix, de l’impact carbone du projet, de la pertinence environnementale, et, pour la première période et les familles 1 et 2, l’absence de défrichement et la détention de l’autorisation d’urbanisme.

La désignation de projets sécurisés par rapport aux contraintes urbanistiques

Le Cahier des charges comporte des précisions importantes en matière d’admissibilité des projets candidats. Ce qui en ressort, c’est la volonté de désigner des projets qui bénéficient de garanties importantes en termes de sécurité juridique, en particulier concernant le droit de l’urbanisme. Les dossiers seront, par conséquent, plus difficiles à constituer.

En premier lieu, pour être admissible, le projet candidat doit correspondre à l’un des trois cas suivants :

1er cas : le projet est situé dans une zone urbanisée ou à urbaniser du document d’urbanisme en vigueur, PLU ou POS ;

2ème cas : le projet satisfait aux conditions cumulatives suivantes :

a) le Terrain d’implantation se situe sur une zone naturelle d’un PLU ou d’un POS portant mention « énergie renouvelable », « solaire », ou « photovoltaïque » (N-pv, Ne, Nz, N-enr, …), ou sur toute zone naturelle dont le règlement du document d’urbanisme autorise explicitement les installations de production d’énergie renouvelable, solaire ou photovoltaïque, ou sur une zone « constructible » d’une carte communale

et

b) le Terrain d’implantation n’est pas situé en zones humides, telles que définies au 1° du I de l’article L. 211-1 et l’article R211-108 du code de l’environnement.

et

c) le projet n’est pas soumis à autorisation de défrichement, et le Terrain d’implantation n’a pas fait l’objet de défrichement au cours des cinq années précédant la Date limite de dépôt des offres.

3ème cas : le projet est situé sur un site dégradé, tel qu’un ancien site pollué ou industriel.

S’agissant du 2ème cas, le cahier des charges impose que le terrain d’implantation du projet soit situé dans une zone qui prévoit explicitement la possibilité d’implanter des installations de production d’énergie renouvelable.

Partant, l’appel d’offres n’est pas accessible aux projets implantés, soit dans des zones agricoles, soit dans des zones naturelles dont les documents d’urbanisme n’autorisent pas expressément la possibilité d’exploiter, en leur sein, une installation d’énergie renouvelable.

L’appel d’offres n’est pas non plus accessible aux projets implantés sur des territoires qui ne sont pas couverts par un document d’urbanisme, auxquels s’appliquent alors les dispositions du règlement national de l’urbanisme.

Ces conditions d’implantation imposées par le cahier des charges rejoignent l’appréciation très stricte de la doctrine administrative concernant les projets de centrale solaire au sol en zone agricole ou naturelle.

En effet, par une circulaire du 18 décembre 2009 relative au développement et au contrôle des centrales solaires au sol, que nous avions commentée, le ministère de l’écologie a clairement affirmé que les centrales solaires au sol ne peuvent pas être autorisées en zone agricole du POS ou du PLU et qu’il est donc nécessaire de faire évoluer le document d’urbanisme avant la phase opérationnelle du projet.

Pour autant, en 2015, la Cour administrative d’appel de Nantes et la Cour administrative d’appel de Bordeaux sont venues rappeler qu’une centrale solaire au sol, tant que le projet comporte des caractéristiques lui permettant d’être compatible avec la destination de la zone (installations de ruches, programme de plantation en jachère, plantation d’herbes et pâturage ovins…), peut tout à fait être implantée dans une zone A ou N sans évolution du document d’urbanisme (cf. CAA Nantes, 23 octobre 2015, n°14NT00587 et CAA Bordeaux, 13 octobre 2015, n°14BX01130).

Cependant, alors que ces décisions du juge administratif démontraient qu’il était possible de développer un projet de centrale solaire au sol au sein d’une zone agricole ou naturelle sans pour autant que ne soit expressément prévue, dans le document d’urbanisme, l’installation de telles exploitations, ce cahier des charges publié le 24 août 2016 pour le développement des installations au sol ou sur ombrières met fin, à sa manière, à ce type de projet.

La prévision d’un projet de centrale solaire au sol doit donc être inscrite explicitement dans le document d’urbanisme, et ce en dehors des zones agricoles, ce qui implique nécessairement son acceptation par les auteurs des documents d’urbanisme.

Sans un tel zonage, même s’il serait possible d’obtenir un permis de construire, le projet ne pourrait pas candidater à l’appel d’offres.

En second lieu, le dossier de candidature devra être accompagné d’un certificat d’éligibilité.

Au plus tard quatre mois avant la date limite de dépôt des candidatures, le candidat doit déposer un dossier sur son projet auprès de la DREAL. Le Préfet vérifie si le projet répond à l’un des trois cas d’implantation ci-dessus exposé.

Au vu des pièces du dossier, le Préfet délivre alors un certificat d’éligibilité ou le refuse.

Sachant qu’il s’agit d’une pièce nécessaire pour l’admission de la candidature à l’appel d’offres, le refus du préfet emportera l’inéligibilité du projet à l’appel d’offres.

En troisième lieu, le candidat doit joindre une copie de l’arrêté de permis de construire en cours de validité ou la déclaration préalable de travaux correspondant aux caractéristiques de son projet décrit dans sa candidature.

Le cahier prévoit une dérogation, mais seulement pour la première période de candidature. Pour les familles 1 et 2, la candidat n’est contraint de produire « que » :

  • la notification du délai d’instruction de la demande de permis de construire qui ne fait pas mention de pièces manquantes. La demande devant donc être déposée et être jugée complète par le service instructeur avant le dépôt de la candidature ;
  • une preuve de la mise à disposition du terrain d’implantation du projet par son propriétaire.

A défaut de production de l’autorisation d’urbanisme, la candidature sera éliminée.

Les prescriptions du cahier des charges auront donc pour effet de sécuriser la faisabilité des projets lauréats par rapport au droit de l’urbanisme. En revanche, ces conditions alourdissent de manière assez importante la phase préalable au dépôt des offres pour les candidats potentiels à l’appel d’offres.

La préparation des dossiers de candidature sera déterminante. Les candidats devront vérifier l’implantation de leur projet et sécuriser juridiquement leur demande autorisation d’urbanisme. Ils devront également être très vigilants au calendrier qu’ils mettront en place afin de tenir compte de l’obligation de produire l’autorisation d’urbanisme correspondant au projet. L’enjeu étant d’éviter leur élimination. 

Florian Ferjoux

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