En bref
Certificats d’économies d’énergie (CEE) : arrêté du 7 avril 2025 modifiant l’arrêté du 4 septembre 2014
Modification de l’arrêté tarifaire S21 : refonte majeure actée et à venir des conditions d’achat pour les installations sur toiture et ombrière inférieure ou égale à 500 kWc
Code minier : publication de l’arrêté du 3 avril 2025 soumettant les décisions d’octroi, d’extension ou de prolongation des concessions et permis exclusifs de recherches (PER) à évaluation environnementale
Déforestation importée : consultation publique sur un projet de règlement modifiant le règlement 2023/1115 (RDUE)
Contentieux : le défaut d’information environnementale peut avoir des conséquences sur les délais de recours (CJUE)
Par une décision préjudicielle du 7 novembre 2019 (C-280/18), la Cour de justice de l’Union européenne a précisé les conditions dans lesquelles les délais de recours peuvent être inopposables en cas de non-respect au droit d’information du public.
Résumé : par cette décision importante en date du 7 novembre 2019, la Cour de justice de l’Union européenne a jugé que les délais de recours sont inopposables au public lorsque celui-ci n’a pas eu la possibilité de participer effectivement à l’évaluation environnementale. Bien que cette décision ne concerne que le droit grec, elle pourrait être applicable en France. La portée de cette décision devra être précisée au cas par cas par le juge national.
Faits et procédure
C’est à l’occasion d’un litige portant sur un projet de création d’un complexe touristique sur l’île d’Ios, que le Conseil d’Etat grec a transmis deux questions préjudicielles à la Cour de justice de l’Union européenne le 21 mars 2018.
La Cour de justice de l’Union européenne était ainsi interrogée sur la compatibilité du droit national grec avec la directive 2011/92/UE du 13 décembre 2011. Celui-ci prévoit :
– D’une part que les opérations de participation du public au processus préalable de décision se tiennent au niveau du siège de l’autorité administrative régionale compétente, et non au niveau de la municipalité dont dépend le lieu d’implantation du projet
– D’autre part, que l’annonce de l’approbation d’un projet sur un site internet spécifique fait courir un délai de 60 jours pour introduire un recours.
Dans cette affaire, conformément à la législation grecque applicable au projet en cause au principal, une étude d’incidence environnementale (EIE) avait été réalisée.
Le 2 août 2013, un appel à participer à l’EIE a été publié dans le journal local de l’île de Syros, distante d’Ios de 55 milles nautiques. C’est également à Syros que s’est tenue la consultation.
Un an plus tard, le ministre de l’Environnement et de l’Energie et le ministre du Tourisme adopte une décision d’approbation des exigences environnementales (DAEE), tel que le prévoit le dispositif législatif grec.
Plus de 18 mois après l’adoption de celle-ci, plusieurs propriétaires immobiliers sur l’île d’Ios et trois associations pour la protection de l’environnement ont formé un recours contre la DAEE. Ils affirment n’avoir pris connaissance de la DAEE que lors du début des travaux d’aménagement du site et ce, malgré sa publication sur un site Internet spécifique faisant courir un délai de recours de 60 jours.
Sur la qualité de l’information et la participation du public à l’évaluation environnementale
En premier lieu, la Cour de justice de l’Union européenne a jugé qu’il revient aux autorités nationales de s’assurer que les canaux d’information utilisés sont propres à atteindre les personnes directement concernées par le projet, afin qu’elles puissent avoir la possibilité de participer effectivement au processus décisionnel
En l’espèce, elle observe qu’un affichage dans les locaux du siège administratif régional, situé sur l’île de Syros, bien qu’assorti d’une publication dans un journal local de cette île, ne paraît pas contribuer de façon adéquate à l’information du public concerné, sauf à ce que ce journal soit largement diffusé sur l’île d’Ios.
Par conséquent, la Cour de justice de l’Union européenne renvoie au Conseil d’Etat grec le soin de vérifier si tel est le cas.
En second lieu, elle observe que les conditions d’accès au dossier de la procédure de participation doivent permettre au public concerné d’exercer ses droits de manière effective.
En l’espèce, la Cour de justice de l’Union européenne charge le juge national de vérifier si ces exigences ont été respectées, en tenant compte notamment de l’effort fourni par le public de l’île d’Ios et de la charge pesant sur l’administration.
Sur le délai de recours
Au regard de la réponse apportée par la Cour à la première question préjudicielle, elle juge que le dispositif national qui fixe un délai de recours commençant à courir à compter de l’annonce d’une autorisation d’un projet sur l’Internet, est contraire à la directive EIE, lorsque le public n’a pas eu la possibilité de s’informer préalablement sur la procédure d’autorisation.
Elle considère qu’il ne serait « pas compatible avec le principe d’effectivité d’opposer un délai à une personne si le comportement des autorités nationales combiné avec l’existence du délai a eu pour conséquence de la priver totalement de la possibilité de faire valoir ses droits devant les juridictions nationales, c’est-à-dire si les autorités, par leur comportement, ont été à l’origine de la tardiveté du recours. »
En conclusion, cette décision de la Cour de justice de l’Union européenne qui lie la qualité de l’information environnementale à la computation des délais de recours sera sans doute souvent discutée devant les juridictions nationales s’agissant de la recevabilité des recours introduits contre des décisions ayant une incidence sur l’environnement.
Toutefois, la Cour a manifestement pris soin de réaliser un équilibre entre droit au recours et principe de sécurité juridique. Plusieurs critères doivent en effet être satisfaits pour qu’un délai de recours fixé en droit interne ne soit plus opposable à raison d’un défaut d’information environnementale.
A lire également :
Communiqué de presse n° 137/19 de la CJUE du 7 novembre 2019
Lara Wissaad
Juriste – Cabinet Gossement Avocats
Vous avez apprécié cet article ? Partagez le sur les réseaux sociaux :
Découvrez le cabinet Gossement Avocats
Gossement Avocats est une référence dans ses domaines d’excellence :
droit de l’environnement, droit de l’énergie, droit de l’urbanisme, tant en droit public qu’en droit privé.
À lire également
2 mai 2025 : conférence d’Arnaud Gossement à l’université de Lille sur « L’effet non-suspensif des recours en contentieux administratif, à l’aune de l’affaire de l’autoroute A69 »
Le vendredi 2 mai 2025 à 14h, Me Arnaud Gossement donnera, à l'université de Lille, une conférence intitulée : "Retour sur l'affaire de l'autoroute A69, l'effet non-suspensif de recours en contentieux administratif". Cette conférence sera animée par M. Pierre-Yves...
« Ne boudons pas les bonnes nouvelles » : nouvelle chronique d’Arnaud Gossement pour le journal La Croix
Arnaud Gossement est l’un des quatre experts membres du comité écologie du journal La Croix. Un comité mis en place pour accompagner la rédaction dans sa volonté de mieux traiter l’actualité des enjeux environnementaux. Dans ce cadre, Arnaud Gossement a publié ici une...
Transition énergétique : le Premier ministre confirme un changement de forme et de fond pour la prochaine feuille de route énergétique, qui sera adoptée par une loi
Ce lundi 28 avril 2025, à l'Assemblée nationale, le Premier ministre a procédé à une "déclaration sur la souveraineté énergétique de la France" qui a été suivie d'un débat sans vote, comme le prévoit l'article 50-1 de la Constitution. Un débat du même type sera...
Déchets – économie circulaire : une proposition de loi pour rendre visible l’éco-contribution sur les produits relevant du principe de la responsabilité élargie du producteur (REP)
Voici une mesure qui peut sembler technique mais qui est en réalité essentielle pour la protection de l'environnement et, plus précisément, pour la prévention et la gestion des déchets. Ce 17 avril 2025, M. Stéphane Delautrette et plusieurs autres députés du groupe...
Pollution de l’eau potable par les nitrates : la Commission européenne saisit la Cour de justice de l’Union européenne d’un recours contre la France (Affaire C-154/25)
Par un recours daté du 21 février 2025 et rendu public ce 22 avril 2025 (affaire C-154/25), la Commission européenne a demandé à la Cour de justice de l'Union européenne de constater que la France ne respecte toujours pas la directive (UE) 2020/2184 du Parlement...
Loup : article de Me Florian Ferjoux dans le « Journal du droit européen » sur la jurisprudence récente de la Cour de justice de l’Union européenne
Me Florian Ferjoux a procédé à une analyse des enjeux juridiques liés à la préservation du loup au regard de la directive Habitats dans son nouvel article intitulé : « Le loup : la protection des espèces dans la directive Habitats », publié au sein du Journal du droit...
Découvrez le cabinet Gossement Avocats
Notre Cabinet
Notre valeur ajoutée :
outre une parfaite connaissance du droit, nous contribuons à son élaboration et anticipons en permanence ses évolutions.
Nos Compétences
Gossement Avocats est une référence dans ses domaines d'excellence :
droit de l'environnement, droit de l'énergie, droit de l'urbanisme, tant en droit public qu'en droit privé.
Contact
Le cabinet dispose de bureaux à Paris, Rennes et intervient partout en France.