En bref
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Un maire peut refuser le permis de construire d’un poulailler industriel en raison du manque d’eau, en tenant compte du changement climatique (jurisprudence cabinet)
[webinaire] 21 novembre 2025 : « Etat de droit et Environnement : le Conseil constitutionnel face aux reculs environnementaux » (La Fabrique écologique)
[colloque] 17 octobre 2025 : intervention d’Arnaud Gossement à la IXème édition des Journées Cambacérès sur « Justice et Environnement » organisées par la Cour d’appel et la Faculté de droit de Montpellier
Eolien – autorisation environnementale : précisions sur les capacités techniques et financières de l’exploitant (Cour administrative d’appel de Lyon)
Par arrêt du 2 avril 2020, n°19LY02607, la cour administrative d’appel de Lyon a précisé qu’une société de projet créée en vue d’exploiter un parc éolien peut, pour justifier de ses capacités techniques et financières, se prévaloir de celles de sa société-mère, laquelle détient la majorité de son capital (cf. CAA Lyon, 2 avril 2020, 19LY02607).
En l’espèce, une société de projet avait sollicité et obtenu une autorisation d’exploiter un parc éolien. Plusieurs requérants ont contesté la légalité de cette autorisation, au motif, notamment, que le pétitionnaire ne présentait pas de garanties techniques et financières suffisantes. Le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a, sur ce fondement, annulé l’autorisation attaquée. Ce jugement, contesté par l’exploitante, vient d’être infirmé par la cour administrative d’appel de Lyon.
La décision retient l’attention plus particulièrement sur l’appréciation des capacités techniques et financières en application du régime de l’autorisation environnementale.
I. Prise en compte de l’assouplissement de la justification des capacités techniques et financières dans le cadre de la réforme de l’autorisation environnementale
L’exigence de preuve par le demandeur d’une autorisation environnementale, a évolué à la suite de l’entrée en vigueur le décret du 26 janvier 2017 relatif à l’autorisation environnementale. Le pétitionnaire peut démontrer la constitution de ses capacités techniques et financières jusqu’à la date de mise en service (cf. article D. 181-15-2 du code de l’environnement).
En comparaison, jusqu’à l’entrée en vigueur de l’autorisation environnementale, le dossier de demande devait comporter la preuve des « capacités techniques et financières de l’exploitant».
Sur le contrôle des capacités techniques et financières, le Conseil d’Etat a, par un avis du 26 juillet 2018, défini une méthodologie particulièrement précise :
- Lorsque le juge statue avant la mise en service de l’installation, il lui appartient de vérifier la pertinence des modalités selon lesquelles le pétitionnaire prévoit de disposer de capacités financières et techniques suffisantes pour assumer l’ensemble des exigences susceptibles de découler du fonctionnement, de la cessation éventuelle de l’exploitation et de la remise en état du site ;
- Lorsqu’il statue après la mise en service de l’installation, il lui appartient de vérifier la réalité et le caractère suffisant des capacités financières et techniques du pétitionnaire.
Le Conseil d’Etat a également précisé que le dossier d’une demande d’autorisation doit uniquement comporter une présentation des modalités prévues pour établir les capacités techniques et financières du demandeur. Il n’est plus exigé de ce dernier qu’il fournisse des indications précises et étayées.
La décision ici commentée de la cour administrative d’appel de Lyon fait une exacte application de l’avis précité du Conseil d’Etat.
La cour juge en effet que les modalités selon lesquelles la société de projet prévoit de disposer de capacités financières et techniques sont, en l’espèce, suffisantes. L’arrêt précise ainsi que :
« 4. Il résulte de l’instruction que la société X, laquelle a été créée pour l’exploitation du parc éolien, est une filiale à 100% du groupe Y, son capital social étant détenu à 70% par la société Z. Cette dernière société, dont le chiffre d’affaires atteignait 60 millions d’euros en 2011 et dont le résultat opérationnel représentait 30% de ce chiffre d’affaires, est spécialisée dans l’exploitation de parcs éoliens. Elle bénéficie d’une notation A auprès des établissements bancaires, ce qui établit une capacité d’emprunt très favorable. La société X a produit un compte d’exploitation prévisionnel, dont les résultats ne sont pas utilement contestés, permettant de justifier la capacité du projet à dégager d’importants flux de trésorerie et à faire face tant aux emprunts bancaires envisagés qu’aux exigences susceptibles de découler du fonctionnement des éoliennes. Par ailleurs, la société Z se prévaut d’une lettre d’intention en date du 27 juillet 2016, qui peut être prise en compte quand bien même elle est postérieure à l’autorisation, selon laquelle elle s’engage à mettre à disposition de la société X, sa filiale, ses capacités techniques et financières, afin de lui permettre de conduire son projet dans le respect des intérêts visés à l’article L. 511-1 du code de l’environnement et d’être en mesure de satisfaire à ses obligations lors de sa cessation d’activité. Au demeurant, et ainsi que le fait valoir le ministre, les dispositions de l’article L. 553-3 du code de l’environnement, reprises à l’article L. 515-46 de ce code, obligent la société mère, en cas de défaillance de l’exploitant, à prendre en charge le démantèlement de l’installation et la remise en état du site. Compte tenu de l’ensemble de ces éléments, qui n’ont pas été contestés par les intimés depuis la reprise d’instance, et eu égard aux conditions de fonctionnement de parcs éoliens, la société X, quand bien même elle n’explicite pas précisément les conditions dans lesquelles elle entend financer sur ses fonds propres 20% de l’investissement initial, justifie de la pertinence des modalités selon lesquelles elle prévoit de disposer de capacités financières et techniques suffisantes pour assumer l’ensemble des exigences susceptibles de découler du fonctionnement, de la cessation éventuelle de l’exploitation et de la remise en état du site. » (nous soulignons).
Pour juger que les modalités prévues par la société de projet, s’agissant de ses capacités techniques et financières, sont suffisantes, il est intéressant de relever que la cour prend en compte :
une lettre d’intention produite par la société-mère postérieurement à la délivrance de l’autorisation, par laquelle elle s’engage à mettre à disposition de sa filiale, ses capacités techniques et financières ;
l’imprécision des conditions dans lesquelles la société de projet entend financer, sur ses fonds propres, une partie de l’investissement initial ;
les conditions spécifiques de fonctionnement des parcs éoliens.
II. Un exploitant d’une installation classée peut justifier de capacités financières propres ou fournies par un tiers (confirmation)
Dans le prolongement de l’arrêt du 22 février 2016 rendu par le Conseil d’Etat, confirmé par arrêt de la cour administrative d’appel de Bordeaux le 14 mars 2017, la cour administrative d’appel de Lyon vient confirmer que le demandeur d’une autorisation environnementale peut justifier des capacités techniques et financières qu’il détient en propre ou qui lui sont fournies par un tiers, en l’occurrence, s’agissant d’une filiale, par sa société-mère.
Il convient de relever, toutefois, qu’aux termes de l’arrêt commenté, la cour administrative d’appel de Lyon ne se borne pas à constater l’appartenance de la société de projet à un groupe spécialisé dans le développement des projets de parcs éoliens, mais prend le soin de détailler les capacités notamment financières de la société-mère.
Emma Babin
Avocate- Cabinet Gossement Avocats
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Emballages : le décret n°2025-1081 du 17 novembre 2025 sur la filière REP des emballages professionnels est (enfin) publié
Le décret du 17 novembre 2025 confirme que la filière REP des emballages professionnels répond à un schéma plutôt financier, ce que confirmait déjà la version projet du texte.
On ne manquera toutefois pas de relever que dans sa version publiée, le décret a notablement évolué dans sa rédaction par rapport à sa version projet. Par exemple, le décret du 17 novembre 2025 a supprimé la catégorie des emballages mixtes, là où la version projet avait uniquement supprimé la notion d’ « alimentaire ». La distinction reposant désormais sur les emballages ménagers et professionnels, laquelle pourra être précisée par un arrêté « périmètre » pris par la ministre chargée de l’environnement (un tel projet d’arrêté avait d’ailleurs été soumis à consultation publique, en même temps que le projet de cahier des charges).
Il est difficile d’anticiper sur le cadre règlementaire de la future filière REP des emballages professionnels, dès l’instant où certaines précisions devront être apportées par le cahier des charges (prise en charge opérationnelle, modalités de détermination des coûts liés à la reprise des emballages usagés en vue de leur réemploi, barème d’éco-modulation, etc.).
Enfin, si les emballages de produits relevant d’autres filières REP et qui sont clairement identifiés au sein du décret, ne relèvent pas de la filière REP des emballages ménagers comme professionnels, le décret n’apporte aucune précision sur les modalités de compensation des coûts dans le cas où les déchets d’emballages relevant de ces produits seraient pris en charge par le ou les éco-organismes agréés au titre de la REP des emballages.
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