En bref
[webinaire] 23 octobre 2025 – Procédure et contentieux de l’autorisation environnementale : ce qu’il faut savoir
Me Florian Ferjoux, élu au conseil d’administration d’Enerplan, le syndicat des professionnels du solaire
[jurisprudence cabinet] Biogaz : une unité de stockage de digestat issu d’une unité de méthanisation permet de limiter l’usage d’engrais chimiques et est nécessaire à l’activité agricole (tribunal administratif de Nantes)
Solaire : Gossement Avocats défend la société JP Energie Environnement et obtient le rejet d’un recours dirigé contre une installation photovoltaïque devant le Tribunal administratif d’Orléans
Éolien : le Conseil d’Etat précise les conditions de recherche en responsabilité de la commune et de l’Etat en cas de refus de permis de construire
Par une décision du 19 novembre 2018, n° 412693, le Conseil d’Etat apporte d’importantes précisions quant aux éléments à prendre en compte pour retenir la responsabilité pour faute de l’administration et pour calculer le préjudice dont peut se prévaloir le développeur d’un projet de parc éolien qui s’est vu refusé un permis de construire.
En l’espèce, le porteur de projet éolien avait conclu en 2008 avec une commune une promesse de bail aux fins d’implanter un parc éolien. Certainement en vue d’attirer d’autres opérateurs éoliens sur son territoire, la commune avait modifié l’année suivante son plan d’occupation des sols en créant une zone NDE (zone à caractère naturel, réservée à l’implantation d’un projet éolien). La même année, le Préfet de département a approuvé la création d’une zone de développement de l’éolien (ZDE).
Les parcelles objet de la promesse de bail étaient situées à la fois dans la zone NDE du plan d’occupation des sols de la commune et dans la ZDE.
Or, le Préfet a finalement refusé de lui délivrer le permis de construire ce parc éolien aux motifs que :
– le projet méconnaissait les dispositions de la loi littoral (articles L. 146-1 et L. 146-4 du code de l’urbanisme) ;
– les effets de ce parc cumulés avec ceux d’éoliennes existantes multipliaient les effets d’obstacles des corridors de passage des flux migratoires des oiseaux et chiroptères dans cette zone Natura 2000.
Le porteur de projets a alors saisi les juridictions d’une demande d’indemnisation à l’encontre de l’Etat et de la commune d’implantation du projet. Il considérait en effet que l’Etat et la commune l’avaient induit en erreur en lui faisant croire à une fausse sécurité juridique pour la mise en œuvre de son projet éolien, ce qui lui avait causé un préjudice économique.
Le tribunal administratif de Montpellier a d’abord rejeté l’ensemble de ses demandes.
Saisie à son tour, la Cour administrative d’appel de Marseille a retenu la responsabilité pour faute à la fois de la commune et de l’Etat (CAA Marseille, 23 mai 2017, n° 15MA05017 et 16MA00037). Elle les a donc condamnés à indemniser l’appelant des frais d’études engagés inutilement. Toutefois, la Cour a tenu compte de la faute du pétitionnaire pour diminuer le montant du préjudice réclamé.
L’opérateur éolien, déçu du montant des indemnités obtenues, et la commune ont formé un pourvoi en cassation devant le Conseil d’Etat. Par une décision du 19 novembre 2018, le Conseil d’Etat a confirmé en partie l’arrêt de la Cour administrative d’appel de Marseille en retenant la responsabilité pour faute de l’Etat. En revanche, la responsabilité de la commune du lieu d’implantation du parc pour le même motif est écartée par la Haute juridiction.
En premier lieu, la responsabilité pour faute de la commune du lieu d’implantation du projet est écartée.
Le Conseil d’Etat rappelle les actions de la commune :
– signature d’une promesse de bail sur ses parcelles ;
– création d’une zone NDE ;
– proposition au Préfet de créer une ZDE.
Il considère que la commune n’a pas donné de garanties au porteur de projets, mais « s’est bornée à rendre possible et à faciliter la réalisation d’un parc éolien sur son territoire ». La réalisation du projet est en effet conditionnée in fine à la délivrance par le préfet d’un permis de construire.
En deuxième lieu, s’agissant de la responsabilité de l’Etat, la Cour administrative d’appel de Marseille avait retenu la responsabilité pour faute de l’Etat, comme le rappelle la présente décision du conseil d’Etat.
La Cour avait en effet « estimé que la commune et l’Etat avaient donné des assurances précises et constantes à la société X sur la faisabilité de son projet d’implantation d’un parc éolien dans une zone où ce dernier ne pouvait pas être implanté et condamné, sur ce fondement, la commune de Salses-le-Château et l’Etat à verser à la société X respectivement les somme de 134 714,40 euros, portant intérêts à compter du 24 octobre 2013 et de 89 809,60 euros, portant intérêts à compter du 18 octobre 2013″.
Si la responsabilité de l’Etat a été ainsi retenue en appel, le Conseil d’Etat note que l’Etat n’a pas introduit de pourvoi contre cet arrêt. La question de caractérisation d’une faute de l’Etat n’est donc plus ouverte devant le juge de cassation.
Reste que le Conseil d’Etat juge que le pétitionnaire a commis une « imprudence fautive » de nature à exonérer d’une partie de sa responsabilité. La Haute juridiction souligne ainsi l’absence d’assurances précises et constantes des services de l’Etat, la complexité du projet, la qualité de professionnel du porteur de projet, pour juger que ce dernier avait commis « une imprudence fautive de nature à exonérer l’Etat (…) d’au moins une partie de sa responsabilité« .
En conclusion, cet arrêt n’est pas contraire aux intérêts de la filière. Certes, le Conseil d’Etat se montre rigoureux dans l’appréciation du rôle du porteur de projet. Toutefois, cet arrêt devrait être de nature à rassurer les services des communes et de l’Etat qui souhaitent soutenir le développement de l’éolien, sans crainte de voir leur responsabilité trop aisément recherchée à raison des éventuelles garanties qu’ils pourraient adresser aux pétitionnaires.
Emilie Bertaina
Avocate – Cabinet Gossement Avocats
Vous avez apprécié cet article ? Partagez le sur les réseaux sociaux :
Découvrez le cabinet Gossement Avocats
Gossement Avocats est une référence dans ses domaines d’excellence :
droit de l’environnement, droit de l’énergie, droit de l’urbanisme, tant en droit public qu’en droit privé.
À lire également
Urbanisme : une loi de simplification pour compliquer le contentieux de l’urbanisme (loi de simplification du droit de l’urbanisme et du logement)
Ce 15 octobre 2025, l'Assemblée nationale a définitivement adopté la proposition de loi de simplification du droit de l’urbanisme et du logement. Cette loi doit encore être promulguée puis publiée au journal officiel avant d'entrer en vigueur. Son article 26 comporte...
Solaire : le Gouvernement propose une majoration du tarif de l’IFER pour les centrales photovoltaïques installées avant 2021, un nouveau mécanisme de déplafonnement des primes négatives et une réactivation de la procédure de révision des tarifs d’achat S06 et S10 (projet de loi de finances pour 2026)
Le Gouvernement vient de présenter en conseil des ministres, ce 14 octobre 2025, le projet de loi de finances pour 2026. Ce texte comporte plusieurs mesures qui intéressent la fiscalité et le financement des installations de production d'électricité d'origine...
Certificats d’économies d’énergie (CEE) : l’administration ne peut pas imposer, sans texte, une obligation de résultat relative aux économies d’énergie attendues (Conseil d’Etat, 8 octobre 2025, n°496114)
Par une décision n°496114 rendue ce 8 octobre 2025, le Conseil d'État a jugé que l'administration ne peut - d'elle-même et sans texte - imposer au demandeur de certificats d'économies d'énergie la preuve de la "réalité des économies d'énergie attendues" alors que la...
Eolien : le Conseil d’Etat précise la méthode d’appréciation de l’impact d’une installation sur les vues depuis un monument à conserver (Conseil d’Etat, 30 septembre 2025, n°492891)
Par un arrêt n°492891 du 30 septembre 2025, le Conseil d'Etat a précisé la méthode d'appréciation, au cas par cas, de l'impact éventuel d'un parc éolien sur les vues offertes depuis un monument à conserver. Commentaire. Résumé 1. Par une décision rendue ce 30...
[webinaire] 23 octobre 2025 – Procédure et contentieux de l’autorisation environnementale : ce qu’il faut savoir
La procédure de l'autorisation environnementale est, depuis 2017, la procédure suivie par de nombreux porteurs de projets susceptibles d'intéresser la protection de l'environnement : installations classées pour la protection de l'environnement (ICPE), parcs éoliens,...
[conférence] « Dix ans après l’Accord de Paris, le monde économique a-t-il fait sa transition ? » Intervention de Me Arnaud Gossement aux « Rendez-vous de l’histoire », le 11 octobre 2025 à 16h15 à Blois
Le samedi 11 octobre 2025, dans le cadre des "Rendez-vous de l'histoire" organisés à Blois, se tiendra, à l'Hôtel de Ville, une conférence consacrée au sujet suivant : "Dix ans après l'Accord de Paris, le monde économique a-t-il fait sa transition ?" Arnaud Gossement...
Découvrez le cabinet Gossement Avocats
Notre Cabinet
Notre valeur ajoutée :
outre une parfaite connaissance du droit, nous contribuons à son élaboration et anticipons en permanence ses évolutions.
Nos Compétences
Gossement Avocats est une référence dans ses domaines d'excellence :
droit de l'environnement, droit de l'énergie, droit de l'urbanisme, tant en droit public qu'en droit privé.
Contact
Le cabinet dispose de bureaux à Paris, Rennes et intervient partout en France.