En bref
Certificats d’économies d’énergie (CEE) : arrêté du 7 avril 2025 modifiant l’arrêté du 4 septembre 2014
Modification de l’arrêté tarifaire S21 : refonte majeure actée et à venir des conditions d’achat pour les installations sur toiture et ombrière inférieure ou égale à 500 kWc
Code minier : publication de l’arrêté du 3 avril 2025 soumettant les décisions d’octroi, d’extension ou de prolongation des concessions et permis exclusifs de recherches (PER) à évaluation environnementale
Déforestation importée : consultation publique sur un projet de règlement modifiant le règlement 2023/1115 (RDUE)
ICPE : le Conseil d’Etat précise les conditions d’opposabilité des documents d’urbanisme aux autorisations d’exploiter
La décision du Conseil d’Etat en date du 16 décembre 2016 (n°391452) apporte des éléments très importants concernant l’opposabilité des règles d’occupation des sols aux décisions autorisant l’exploitation d’une installation classée pour la protection de l’environnement (ICPE). Analyse.
I. Sur la prise en compte de l’évolution favorable du document d’urbanisme entre la délivrance de l’autorisation et la date à laquelle le juge statue
Il convient de rappeler que le contrôle de la légalité d’une ICPE relève d’un contentieux de pleine juridiction (cf. alinéa 1 du I de l’article L. 514-6 du code de l’environnement). En principe, la légalité d’une autorisation administrative est contrôlée au regard des normes applicables, non pas au jour de sa délivrance mais au jour de la décision par laquelle le juge administratif statue sur le recours dirigé contre cette autorisation.
Cependant, aux termes de l’alinéa 2 du I de l’article L. 514-6 du code de l’environnement, il est prévu que :
« Par exception, la compatibilité d’une installation classée avec les dispositions d’un schéma de cohérence territoriale, d’un plan local d’urbanisme, d’un plan d’occupation des sols ou d’une carte communale est appréciée à la date de l’autorisation, de l’enregistrement ou de la déclaration. (…).«
Par une décision n°367901 du 22 février 2016, le Conseil d’Etat a considéré que les évolutions du plan local d’urbanisme (PLU) postérieures à la délivrance d’une autorisation d’exploiter ne peuvent pas être opposées lorsque ces évolutions sont défavorables à la légalité de l’autorisation ICPE (cf. notre commentaire).
Nous faisions remarquer que le Conseil d’Etat n’avait pas fondé son raisonnement sur l’article L. 514-6 du code de l’environnement précité.
Dans sa décision du 16 décembre 2016, qui ne fait pas non plus mention de l’article L. 514-6 du code de l’environnement, le Conseil d’Etat établit, par un considérant de principe, que :
« 4. Considérant, en deuxième lieu, qu’il appartient au juge du plein contentieux des installations classées de se prononcer sur la légalité de l’autorisation au regard des règles d’urbanisme légalement applicables à la date de sa délivrance ; que, toutefois, eu égard à son office, la méconnaissance par l’autorisation des règles d’urbanisme en vigueur à cette date ne fait pas obstacle à ce qu’il constate que, à la date à laquelle il statue, la décision a été régularisée par une modification ultérieure de ces règles ;«
En principe, la légalité de l’autorisation ICPE est donc appréciée au regard des règles d’urbanisme légalement applicables à la date de sa délivrance (cf. pour une application récente Conseil d’Etat, 30 décembre 2016, n°396420).
Toutefois, l’illégalité de l’autorisation ICPE constatée le jour de sa délivrance peut être régularisée par une évolution ultérieure des règles d’urbanisme.
Le Conseil d’Etat a donc jugé que :
« en ayant apprécié la légalité de l’autorisation litigieuse au regard des seules dispositions du plan local d’urbanisme en vigueur à la date de son arrêt, alors qu’il lui appartenait d’abord de l’apprécier au regard des règles d’urbanisme légalement applicables à la date à laquelle l’autorisation a été délivrée, la cour a entaché son arrêt d’une erreur de droit«
II. Sur les conséquences juridiques en cas de d’illégalité du document d’urbanisme sur l’autorisation d’ICPE
En premier lieu, dans sa décision du 16 décembre 2016, le Conseil d’Etat confirme la possibilité de soulever l’illégalité d’un document d’urbanisme, même lorsque la décision attaquée est une autorisation ICPE.
Il précise que la déclaration d’illégalité doit intervenir dans les conditions de l’article L. 600-1 du code de l’urbanisme, lequel fait obstacle à l’invocation de vices de forme ou de procédure contre le document d’urbanisme passé un délai de six mois à compter de la prise d’effet de ce dernier.
En deuxième lieu, en droit de l’urbanisme, d’abord selon la jurisprudence (CE, 7 février 2008, Commune de Courbevoie, n°297227, publié au Lebon), puis en vertu de l’article L. 600-12 du code de l’urbanisme, cité ci-après :
« L’annulation ou la déclaration d’illégalité d’un schéma de cohérence territoriale, d’un plan local d’urbanisme, d’un document d’urbanisme en tenant lieu ou d’une carte communale a pour effet de remettre en vigueur le schéma de cohérence territoriale, le plan local d’urbanisme, le document d’urbanisme en tenant lieu ou la carte communale immédiatement antérieur.«
Par sa décision du 16 décembre 2016, le Conseil d’Etat a décidé d’appliquer les dispositions résultant de l’article L. 600-12 du code de l’urbanisme en matière d’installation classée.
De telle sorte qu’il appartient au juge administratif de confronter l’autorisation d’exploiter en cause aux règles d’urbanisme remises en vigueur par effet de la déclaration d’illégalité du document d’urbanisme qui lui était opposable.
En l’espèce, la Cour avait considéré le plan local d’urbanisme applicable comme étant illégale – incompatibilité avec une prescription du schéma de cohérence territorial.
Cependant, elle a omis d’apprécier l’autorisation ICPE contestée au regard des règles d’occupation des sols antérieures au plan d’urbanisme litigieux, remises en vigueur du fait de de l’illégalité de ce dernier, entachant son arrêt d’une erreur de droit.
La jurisprudence complexe qui découle de cette décision sera certainement appliquée en matière d’autorisation environnementale unique, laquelle sera soumise à un contrôle de pleine juridiction et intégrera les autorisations ICPE – et non les décisions d’enregistrement et de déclaration.
L’autorisation environnementale unique devrait entrer en vigueur au cours de l’année 2017, à la suite de la publication des projets d’ordonnance et de décret qui la pérennise et l’organise.
Florian Ferjoux
Avocat – Cabinet Gossement Avocats
Vous avez apprécié cet article ? Partagez le sur les réseaux sociaux :
Découvrez le cabinet Gossement Avocats
Gossement Avocats est une référence dans ses domaines d’excellence :
droit de l’environnement, droit de l’énergie, droit de l’urbanisme, tant en droit public qu’en droit privé.
À lire également
Dérogation espèces protégées : la définition par la loi de l’obligation de dépôt d’une demande de dérogation est conforme à la Constitution (Conseil constitutionnel, 29 avril 2025, n°2025-879 DC)
Par une décision n°2025-879 DC du 29 avril 2025, le Conseil constitutionnel a, notamment, déclaré conforme à la Constitution l’article 23 de la loi "portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne en matière économique, financière,...
2 mai 2025 : conférence d’Arnaud Gossement à l’université de Lille sur « L’effet non-suspensif des recours en contentieux administratif, à l’aune de l’affaire de l’autoroute A69 »
Le vendredi 2 mai 2025 à 14h, Me Arnaud Gossement donnera, à l'université de Lille, une conférence intitulée : "Retour sur l'affaire de l'autoroute A69, l'effet non-suspensif de recours en contentieux administratif". Cette conférence sera animée par M. Pierre-Yves...
« Ne boudons pas les bonnes nouvelles » : nouvelle chronique d’Arnaud Gossement pour le journal La Croix
Arnaud Gossement est l’un des quatre experts membres du comité écologie du journal La Croix. Un comité mis en place pour accompagner la rédaction dans sa volonté de mieux traiter l’actualité des enjeux environnementaux. Dans ce cadre, Arnaud Gossement a publié ici une...
Transition énergétique : le Premier ministre confirme un changement de forme et de fond pour la prochaine feuille de route énergétique, qui sera adoptée par une loi
Ce lundi 28 avril 2025, à l'Assemblée nationale, le Premier ministre a procédé à une "déclaration sur la souveraineté énergétique de la France" qui a été suivie d'un débat sans vote, comme le prévoit l'article 50-1 de la Constitution. Un débat du même type sera...
Déchets – économie circulaire : une proposition de loi pour rendre visible l’éco-contribution sur les produits relevant du principe de la responsabilité élargie du producteur (REP)
Voici une mesure qui peut sembler technique mais qui est en réalité essentielle pour la protection de l'environnement et, plus précisément, pour la prévention et la gestion des déchets. Ce 17 avril 2025, M. Stéphane Delautrette et plusieurs autres députés du groupe...
Pollution de l’eau potable par les nitrates : la Commission européenne saisit la Cour de justice de l’Union européenne d’un recours contre la France (Affaire C-154/25)
Par un recours daté du 21 février 2025 et rendu public ce 22 avril 2025 (affaire C-154/25), la Commission européenne a demandé à la Cour de justice de l'Union européenne de constater que la France ne respecte toujours pas la directive (UE) 2020/2184 du Parlement...
Découvrez le cabinet Gossement Avocats
Notre Cabinet
Notre valeur ajoutée :
outre une parfaite connaissance du droit, nous contribuons à son élaboration et anticipons en permanence ses évolutions.
Nos Compétences
Gossement Avocats est une référence dans ses domaines d'excellence :
droit de l'environnement, droit de l'énergie, droit de l'urbanisme, tant en droit public qu'en droit privé.
Contact
Le cabinet dispose de bureaux à Paris, Rennes et intervient partout en France.