En bref
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Un maire peut refuser le permis de construire d’un poulailler industriel en raison du manque d’eau, en tenant compte du changement climatique (jurisprudence cabinet)
[webinaire] 21 novembre 2025 : « Etat de droit et Environnement : le Conseil constitutionnel face aux reculs environnementaux » (La Fabrique écologique)
[colloque] 17 octobre 2025 : intervention d’Arnaud Gossement à la IXème édition des Journées Cambacérès sur « Justice et Environnement » organisées par la Cour d’appel et la Faculté de droit de Montpellier
ICPE : les évolutions défavorables du plan local d’urbanisme ne sont pas opposables à l’autorisation d’exploiter
Par arrêt n°367901 rendu ce 22 février 2016, le Conseil d’Etat a jugé que « lorsque, postérieurement à la délivrance d’une autorisation d’ouverture, les prescriptions du plan évoluent dans un sens défavorable au projet, elles ne sont pas opposables à l’arrêté autorisant l’exploitation de l’installation classée« .
Il convient de rappeler que le contrôle de la légalité d’une autorisation d’exploiter une installation classée (ICPE) relève d’un contentieux de pleine juridiction. En d’autres termes, la légalité de cette autorisation est contrôle au regard des normes applicables, non pas au jour de sa délivrance mais au jour du jugement par lequel le juge administratif statue sur le recours dirigé contre cette autorisation.
Ceci emporte notamment pour conséquence que les évolutions du plan local d’urbanisme, postérieures à la délivrance d’une autorisation d’exploiter peuvent être opposées à une autorisation d’exploiter pourtant antérieure auxdites évolutions.
Lors des débats parlementaires préalables au vote de la loi du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte, l’article L.514-6 du code de l’environnement a été modifié de manière à préciser que la compatibilité d’une ICPE avec les dispositions d’un SCOT, d’un PLU, d’un POS ou d’une carte communale, est appréciée, non à la date du jugement mais à la date de l’autorisation, de l’enregistrement ou de la déclaration de cette ICPE.
L’article L.514-6 du code de l’environnement dispose désormais :
« I.-Les décisions prises en application des articles L. 171-7, L. 171-8 et L. 171-10, L. 512-1, L. 512-3, L. 512-7-3 à L. 512-7-5, L. 512-8, L. 512-12, L. 512-13, L. 512-20, L. 513-1, L. 514-4, du I de l’article L. 515-13 et de l’article L. 516-1 sont soumises à un contentieux de pleine juridiction.
Par exception, la compatibilité d’une installation classée avec les dispositions d’un schéma de cohérence territoriale, d’un plan local d’urbanisme, d’un plan d’occupation des sols ou d’une carte communale est appréciée à la date de l’autorisation, de l’enregistrement ou de la déclaration.
Un décret en Conseil d’Etat précise les délais dans lesquels les décisions mentionnées au premier alinéa du présent article peuvent être déférées à la juridiction administrative.«
Ces dispositions ont contribué grandement à la sécurité juridique des projets en introduisant une nouvelle exception au principe du plein contentieux selon lequel le Juge administratif tient compte du droit applicable à la date de sa décision et non à la date de la décision déférée à son contrôle.
Par arrêt n°367901 du 22 février 2016, le Conseil d’Etat a également jugé que les évolutions du PLU, postérieures à une autorisation d’exploiter ICPE, ne sont pas opposables à cette dernière.
Toutefois, le Conseil d’Etat s’est uniquement fondé sur l’article L.123-5 du code de l’urbanisme et non sur cet article L.514-6 modifié du code de l’environnement.
L’arrêt précise en effet :
« 10. Considérant qu’en vertu du premier alinéa de l’article L. 123-5 du code de l’urbanisme, dans sa rédaction applicable au litige : » Le règlement et les documents graphiques du plan local d’urbanisme sont opposables à toute personne publique ou privée pour l’exécution de tous travaux, constructions (…), pour la création de lotissements et l’ouverture des installations classées appartenant aux catégories déterminées dans le plan » ; que le juge du plein contentieux des installations classées pour la protection de l’environnement, eu égard à son office, fait en principe application du plan local d’urbanisme dans sa rédaction en vigueur à la date à laquelle il statue ; qu’il résulte toutefois des dispositions précitées de l’article L. 123-5 du code de l’urbanisme que le plan local d’urbanisme est opposable aux seules autorisations d’ouverture d’installations classées accordées postérieurement à l’adoption du plan ; qu’il résulte de l’intention du législateur que lorsque, postérieurement à la délivrance d’une autorisation d’ouverture, les prescriptions du plan évoluent dans un sens défavorable au projet, elles ne sont pas opposables à l’arrêté autorisant l’exploitation de l’installation classée ; qu’il en résulte qu’en faisant application de la délibération du 25 mars 2009, qui était postérieure à l’autorisation accordée à la société E. et avait pour effet d’interdire l’installation en cause, la cour a entaché son arrêt d’une erreur de droit ; que, par suite et sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens du pourvoi relatifs à cette partie de l’arrêt attaqué, les sociétés requérantes sont fondées à demander l’annulation de cet arrêt en tant qu’il a statué sur la légalité de l’arrêté du 3 août 2007 autorisant l’exploitation de l’installation litigieuse »
On relèvera que le Conseil d’Etat procède ici, non à une application de l’article L.514-6 du code de l’environnement mais à une interprétation, en fonction de « l’intention du législateur » de l’article L.123-5 du code de l’urbanisme.
Le résultat est toutefois quasiment identique. Au cas présent, le Conseil d’Etat juge que les évolutions « dans un sens défavorable » au projet ne sont pas opposables à l’arrêté d’autorisation d’exploiter l’ICPE en cause.
La précision apportée par les termes « dans un sens défavorable » est importante. En effet, le Juge du plein contentieux doit pouvoir exercer l’ensemble de ses attributions, notamment délivrer une autorisation d’exploiter qui aurait été refusée par l’administration. On peut donc imaginer que, si l’évolution du PLU est « favorable » au projet, le Juge puisse en tenir compte pour délivrer l’autorisation qui aurait été refusée par l’administration.
Arnaud Gossement
Cabinet d’avocats Gossement
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Le décret du 17 novembre 2025 confirme que la filière REP des emballages professionnels répond à un schéma plutôt financier, ce que confirmait déjà la version projet du texte.
On ne manquera toutefois pas de relever que dans sa version publiée, le décret a notablement évolué dans sa rédaction par rapport à sa version projet. Par exemple, le décret du 17 novembre 2025 a supprimé la catégorie des emballages mixtes, là où la version projet avait uniquement supprimé la notion d’ « alimentaire ». La distinction reposant désormais sur les emballages ménagers et professionnels, laquelle pourra être précisée par un arrêté « périmètre » pris par la ministre chargée de l’environnement (un tel projet d’arrêté avait d’ailleurs été soumis à consultation publique, en même temps que le projet de cahier des charges).
Il est difficile d’anticiper sur le cadre règlementaire de la future filière REP des emballages professionnels, dès l’instant où certaines précisions devront être apportées par le cahier des charges (prise en charge opérationnelle, modalités de détermination des coûts liés à la reprise des emballages usagés en vue de leur réemploi, barème d’éco-modulation, etc.).
Enfin, si les emballages de produits relevant d’autres filières REP et qui sont clairement identifiés au sein du décret, ne relèvent pas de la filière REP des emballages ménagers comme professionnels, le décret n’apporte aucune précision sur les modalités de compensation des coûts dans le cas où les déchets d’emballages relevant de ces produits seraient pris en charge par le ou les éco-organismes agréés au titre de la REP des emballages.
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