Solaire / tarif d’achat : des constructions situées sur des parcelles distinctes peuvent toutefois former un « bâtiment unique » (Cour administrative d’appel de Paris)

Juil 14, 2018 | Energie – Climat

Par arrêt n°16PA02783 du 7 juin 2018, la Cour administrative d’appel de Paris a jugé que deux constructions situées sur des parcelles distinctes peuvent toutefois former un bâtiment unique. Le tarif d’achat est calculé est alors calculé pour un projet unique dont la puissance de l’ensemble des panneaux doit être cumulée.

Dans cette affaire, deux sociétés ont présent, séparément, une demande de raccordement pour des installations de production d’électricité à partir de l’énergie photovoltaïque, chacune d’une puissance installée de 9 kw.

Après mise en service, l’une des deux sociétés a transféré la propriété de son installation à l’autre. Considérant que ces deux installations formaient un seul et même projet, la société EDF AOA a adressé à leur propriétaire une proposition de contrat d’achat comportant un tarif d’achat inférieur à celui escompté. La société propriétaire des installations a alors contesté cette proposition devant le juge administratif. Son recours ayant été rejeté par le tribunal administratif, la Cour administrative d’appel de Paris a été saisie.

L’arrêt rendu ce 7 juin 2018 par la Cour administrative d’appel de Paris confirme une jurisprudence administrative désormais bien établie.

La puissance crête et la situation cadastrale des installations est appréciée à la date de la demande complète de raccordement

Le premier intérêt de cet arrêt tient à ce qu’il rappelle que la puissance installée d’une installation de production d’électricité solaire s’apprécie à la date de demande de raccordement. Dans ce cadre, c’est également à la date de demande complète de raccordement que s’apprécie la situation cadastrale des constructions supports de ces installations.

L’arrêt rendu par la Cour administrative d’appel de Paris précise :

« 6. Il ressort des pièces du dossier que la parcelle unique X a été divisée en deux parcelles X et X par une modification enregistrée sur les registres cadastraux le 27 juin 2013. Par une demande initiale du 25 juin 2013, il a été demandé à ERDF le raccordement des deux installations photovoltaïques au réseau public. Toutefois, ses demandes n’ont été complètes que le 10 septembre 2013. Dès lors qu’il ressort des conditions générales du contrat d’achat que la puissance crête Q s’apprécie au moment du dépôt de la demande complète de raccordement, la SAS X est fondée à soutenir que les installations n°1 et 2 se trouvaient sur deux parcelles cadastrales différentes à la date de leurs demandes de raccordement, le 10 septembre 2013. »

Ainsi, dans ce dossier, les installations se trouvaient bien sur des parcelles cadastrales différentes à la date de la demande complète de raccordement. Cette circonstance ne suffit toutefois pas à elle seule à démontrer que la puissance de ces installations ne doit pas être cumulée lors du calcul du tarif d’achat applicable.

La qualification de bâtiment unique est opérée au cas par cas en fonction d’un faisceau d’indices

Notre cabinet a très souvent, sur ce blog et auprès de ses clients été consulté sur la question du cumul de puissances installées de plusieurs installations au regard de la notion de bâtiment unique. L’administration comme l’AOA ont entendu s’opposer au fractionnement de projets en plusieurs petits projets dans le but de bénéficier plusieurs fois de tarifs d’achat d’électricité plus attractifs. Cette doctrine a pu aussi, dans certains cas, être très voire trop rigoureuse et affecter des projets pourtant tout à fait sincères.

L’arrêt rendu par la Cour administrative d’appel de Paris démontre que le juge administratif se fonde, non pas sur un seul critère mais, au cas par cas, sur un ensemble d’indices :

« 7. Toutefois, s’il ressort des deux constats d’huissier, produits par la requérante et la société EDF, que les installations photovoltaïques sont construites sur deux ouvrages bâtis à des époques différentes et de construction différentes, que ces bâtiments sont séparés par un mur et qu’ils ne sont pas communiquant, il apparaît néanmoins que les deux constructions sont situées à la même adresse et appartiennent au même propriétaire, qu’elles sont juxtaposées, qu’elles ont un pan de mur en commun et sont indissociables sans dommage pour l’un des deux bâtiments. Par suite, c’est à bon droit que le Tribunal administratif de Paris a jugé que les deux constructions devaient être regardées, pour l’application de l’arrêté du 4 mars 2011, comme formant un unique bâtiment et que c’est par une exacte application des dispositions réglementaires en vigueur que la société EDF a proposé à la SAS X la conclusion d’un contrat d’achat d’électricité comportant un tarif de 16,731 centimes d’euro par kilowattheure, après majoration de 10 % concernant certaines installations utilisant l’énergie radiative du soleil, et a rejeté la réclamation de la requérante tendant à ce que soit retenu pour ses installations, un tarif d’achat de 32,659 centimes d’euro par kilowattheure. »

Ainsi, dans le présent dossier, la Cour relève, dans un premier temps et en plus de la différence de situation cadastrale, deux indices qui laissent à penser que les installations sont bien distinctes :

– les installations photovoltaïques sont construites sur deux ouvrages bâtis à des époques différentes et de construction différentes ;

– ces bâtiments sont séparés par un mur et ils ne sont pas communiquant ;

Toutefois, dans un deuxième temps, la Cour souligne qu’une autre série d’indices permet de qualifier de bâtiment unique les constructions supports des installations de production en cause :

– les deux constructions sont situées à la même adresse ;

– elles appartiennent au même propriétaire ;

– elles sont juxtaposées ;

– elles ont un pan de mur en commun et sont indissociables sans dommage pour l’un des deux bâtiments.

En définitive, le recours de la société propriétaire des deux installations est rejeté et le tarif d’achat est calculé en fonction de la puissance cumulée de l’ensemble des panneaux des deux installations.

Arnaud Gossement

Avocat associé – Cabinet Gossement Avocats

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