En bref
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Un maire peut refuser le permis de construire d’un poulailler industriel en raison du manque d’eau, en tenant compte du changement climatique (jurisprudence cabinet)
[webinaire] 21 novembre 2025 : « Etat de droit et Environnement : le Conseil constitutionnel face aux reculs environnementaux » (La Fabrique écologique)
[colloque] 17 octobre 2025 : intervention d’Arnaud Gossement à la IXème édition des Journées Cambacérès sur « Justice et Environnement » organisées par la Cour d’appel et la Faculté de droit de Montpellier
Urbanisme : un « cahier de recommandations architecturales » peut être opposé à une demande d’autorisation d’urbanisme, à certaines conditions (Conseil d’Etat, 2 juin 2023, n°461645)
Les faits et la procédure
Dans cette affaire, un maire a délivré à une SCI un permis de construire en vue de la surélévation d’un immeuble et de la réalisation de logements. Ce permis de construire était assorti de douze prescriptions.
Le bénéficiaire de ce permis de construire a alors formé un recours gracieux contre sept de ces prescriptions. La SCI a ensuite demandé au tribunal administratif de Versailles d’annuler l’arrêté du maire lui délivrant un permis de construire, en tant qu’il comportait l’ensemble des prescriptions qui lui étaient attachées.
Par un jugement du 17 décembre 2021, le tribunal administratif de Versailles a annulé les prescriptions relatives aux volets extérieurs et aux modèles des portes d’accès, et rejeté le surplus des conclusions de la société. La SCI a alors formé un pourvoi en cassation contre ce jugement, devant le Conseil d’Etat.
Solution
Après avoir rappelé les dispositions du code de l’urbanisme relatives au contenu du plan local d’urbanisme et, plus particulièrement de son règlement, le Conseil d’Etat a précisé à quelles conditions un maire peut opposer aux demandes d’autorisations d’urbanisme, le respect d’un « cahier de recommandations architecturales:
« 10. Ces dispositions ne font pas obstacle à ce que le règlement du plan local d’urbanisme renvoie à un » cahier de recommandations architecturales « , adopté selon les mêmes modalités procédurales, le soin d’expliciter ou de préciser certaines des règles figurant dans le règlement auquel il s’incorpore. Un tel document ne peut toutefois être opposé aux demandes d’autorisation d’urbanisme que s’il y est fait expressément référence dans le règlement et que ce cahier se contente d’expliciter ou préciser, sans les contredire ni les méconnaître, des règles figurant déjà dans le règlement.«
Les conditions d’opposabilité d’un cahier de recommandations architecturales à une demande d’autorisation d’urbanisme sont donc les suivantes :
- Le règlement du PLU doit renvoyer à ce cahier de recommandations architecturales
- Ce cahier doit être adopté selon les mêmes modalités procédurales que le PLU
- L’objet de ce cahier ne peut être que le suivant : « expliciter ou préciser certaines des règles figurant dans le règlement auquel il s’incorpore«
- Le cahier ne peut, ni contredire ni méconnaître les règles figurant déjà dans le PLU.
En définitive, le « cahier de recommandations architecturales est bien une composante du règlement du PLU mais sous un autre nom. Ce procédé n’est pas interdit par principe mais, s’agissant d’un volet du règlement : il doit être élaboré comme ledit règlement et ne pas le contredire.
Cette décision du Conseil d’Etat peut être rapprochée du jugement rendu ce 26 janvier 2023 par lequel le tribunal administratif de Rouen a annulé la délibération par laquelle un conseil municipal avait approuvé une « charte de l’urbanisme et du cadre de vie » comportant plusieurs règles impératives à la charge des opérateurs de l’immobilier.
Le tribunal administratif de Rouen avait alors précisé que cette délibération était illégale au motif que la commune ne peut pas imposer, au moyen de cette charte, de telles règles ne relevant pas de son domaine de compétence. La commune ne pouvait en effet pas créer de nouvelles règles impératives relevant en réalité du domaine de la loi et du règlement en s’écartant des prescriptions du code de l’urbanisme :
« 6. Il résulte de ces dispositions que les demandes relatives à l’utilisation des sols et à l’implantation des constructions ne peuvent être instruites que dans les conditions fixées par les dispositions législatives et réglementaires du code de l’urbanisme, qui définissent de manière limitative les informations ou pièces pouvant être exigées par l’autorité compétente.
7. Au vu de ses termes, et notamment de la nature de certains des « engagements » qu’elle prévoit, la « Charte de l’urbanisme et du cadre de vie » de X doit être regardée comme imposant aux opérateurs immobiliers concernés des règles impératives relatives à la conception et à la réalisation de projets de construction, relevant, par leur nature, de la loi ou du règlement. Par suite, la commune de X n’était pas compétente pour imposer de telles prescriptions en matière d’urbanisme.«
La jurisprudence administrative peut être ainsi résumée : la commune ne peut pas s’écarter du code de l’urbanisme en général et de la procédure d’élaboration du PLU en particulier pour instruire les demandes d’autorisation d’urbanisme ensuite présentées à son maire.
Arnaud Gossement
avocat, docteur en droit
professeur associé à l’université Paris I Panthéon-Sorbonne
A lire également :
Chartes de l’urbanisme : la commune ne peut pas imposer ainsi des règles impératives ne relevant pas de sa compétence (tribunal administratif de Rouen, 26 janvier 2023, n°2202586)
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On ne manquera toutefois pas de relever que dans sa version publiée, le décret a notablement évolué dans sa rédaction par rapport à sa version projet. Par exemple, le décret du 17 novembre 2025 a supprimé la catégorie des emballages mixtes, là où la version projet avait uniquement supprimé la notion d’ « alimentaire ». La distinction reposant désormais sur les emballages ménagers et professionnels, laquelle pourra être précisée par un arrêté « périmètre » pris par la ministre chargée de l’environnement (un tel projet d’arrêté avait d’ailleurs été soumis à consultation publique, en même temps que le projet de cahier des charges).
Il est difficile d’anticiper sur le cadre règlementaire de la future filière REP des emballages professionnels, dès l’instant où certaines précisions devront être apportées par le cahier des charges (prise en charge opérationnelle, modalités de détermination des coûts liés à la reprise des emballages usagés en vue de leur réemploi, barème d’éco-modulation, etc.).
Enfin, si les emballages de produits relevant d’autres filières REP et qui sont clairement identifiés au sein du décret, ne relèvent pas de la filière REP des emballages ménagers comme professionnels, le décret n’apporte aucune précision sur les modalités de compensation des coûts dans le cas où les déchets d’emballages relevant de ces produits seraient pris en charge par le ou les éco-organismes agréés au titre de la REP des emballages.
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