Déchets d’équipements électriques et électroniques : décret du 10 mars 2016 sur l’obligation de contracter des opérateurs de gestion

Mar 13, 2016 | Environnement

Le Gouvernement vient de publier, au journal officiel du 12 mars 2016, le décret n° 2016-288 du 10 mars 2016 « portant diverses dispositions d’adaptation et de simplification dans le domaine de la prévention et de la gestion des déchets ». Ce décret organise notamment le régime juridique de l’obligation de contracter des opérateurs de gestion de déchets d’équipements électriques et électroniques.

L’article 77 III de la loi n° 2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte a étendu l’obligation de contracter, anciennement définie à l’article R.R. 543-194-1, à tous les opérateurs de gestion de D3E ménagers ou professionnels.

L’article 2e décret n°2016-188 du 10 mars 2016 précise le régime juridique de cette obligation au sein de l’article R.543-200-1 du code de l’environnement.

De manière générale, la vocation de ce dispositif contractuel tient à la lutte contre les sites illégaux de traitement de déchets qui continuent d’exister, notamment en matière d’équipements électriques et électroniques. Il suscite plusieurs questions. Ainsi, la nature juridique des contrats qui seront ainsi conclus ne manquera pas de susciter un débat. Ce dispositif impose en effet une obligation à des personnes privées de conclure un contrat dont le contenu aura été préalablement encadré par arrêté. De même, ce dispositif ouvre la question de la responsabilité des éco-organismes cocontractants en cas de problème lié à la gestion des déchets.

I. La création de l’obligation de contracter des opérateurs de gestion des D3E

L’article 77 de la loi n° 2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte a inséré les termes suivants au troisième alinéa de l’article L. 541-10-2 du code de l’environnement :

« Les opérateurs de gestion de déchets ne peuvent gérer des déchets d’équipements électriques et électroniques que s’ils disposent de contrats passés en vue de la gestion de ces déchets avec les éco-organismes agréés ou avec les systèmes individuels mis en place par les personnes mentionnées au même premier alinéa. »

Aux termes de ces dispositions, les opérateurs de « gestion » – c’est à dire de collecte et de traitement – des déchets d’équipements électriques et électroniques, doivent contracter avec : soit un éco-organisme agréé, soit un système individuel, pour pouvoir exercer leur activité. Ces dispositions ne donnent pas d’indication précise sur la fonction et le contenu de ces contrats.

Cette obligation de contracter n’est pas tout à fait nouvelle.

L’article 7 du décret n° 2012-617 du 2 mai 2012 « relatif à la gestion des déchets de piles et accumulateurs et d’équipements électriques et électroniques » avait en effet inséré un article R543-194-1 au sein du code de l’environnement, ainsi rédigé :

« Les opérateurs de traitement de déchets ne peuvent traiter des déchets d’équipements électriques et électroniques ménagers collectés séparément ou repris gratuitement par les distributeurs conformément à l’article R. 543-180 que s’ils disposent de contrats passés en vue du traitement de ces déchets avec les éco-organismes agréés dans les conditions définies aux articles R. 543-189 et R. 543-190 ou avec les producteurs ayant mis en place des systèmes individuels approuvés dans les conditions définies aux articles R. 543-191 et R. 543-192.

S’il est constaté qu’un opérateur de traitement traite des déchets mentionnés à l’alinéa précédent sans disposer d’un tel contrat, le préfet du département où est implanté l’opérateur concerné l’avise des faits qui lui sont reprochés et de la sanction qu’il encourt. L’intéressé est mis à même de présenter ses observations, écrites ou orales, dans le délai d’un mois, le cas échéant, assisté d’un conseil ou représenté par un mandataire de son choix.

Au terme de cette procédure, le préfet du département où est implanté l’opérateur de traitement concerné peut, par une décision motivée qui indique les voies et délais de recours, prononcer une amende administrative, dont le montant tient compte de la gravité des manquements constatés et des avantages qui en sont retirés et ne peut excéder 750 € pour une personne physique et 3 750 € pour une personne morale par tonne de déchets d’équipements électriques et électroniques ménagers traités ou entreposés sur le site de l’opérateur.

Les décisions prises en application du présent article mentionnent le délai et les modalités de paiement de l’amende. L’amende est recouvrée conformément aux dispositions du décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique.

Aux termes de ces dispositions, seuls les opérateurs de traitement de déchets d’équipements électriques et électroniques ménagers collectés séparément ou repris gratuitement par les distributeurs, étaient tenus de contracter, soit avec un éco-organisme agréé, soit avec un système individuel approuvé.

L’article 77 de la loi n° 2015-992 du 17 août 2015 a donc étendu le champ de cette obligation de contracter à tous les opérateurs de gestion pour tous les déchets d’équipements électriques et électroniques, ménagers ou professionnels.

Le décret n° 2016-288 du 10 mars 2016 organise cette obligation de contracter, ainsi étendue. Il abroge les articles R. 543-194-1 et R. 543-199 du code de l’environnement et introduit un nouvel article R.543-200-1.

II. Les débiteurs de l’obligation de contracter

L’obligation de contracter s’impose à tous les opérateurs de gestion de D3E et non plus seulement aux opérateurs de traitement. L’article R.543-2001-1 du code de l’environnement donne les définitions suivantes de l' »opérateur de transit » et de l' »opérateur de regroupement » :

« 1° « Opérateur de transit » : un opérateur recevant des déchets et les réexpédiant, sans réaliser d’autre opération qu’une rupture de charge et un entreposage temporaire dans l’attente de la reprise de ces déchets et de leur évacuation vers une installation de gestion des déchets ;

« 2° « Opérateur de regroupement » : un opérateur recevant des déchets et les réexpédiant, après avoir procédé à leur déconditionnement et reconditionnement pour constituer des lots de tailles plus importantes. »

III. La désignation du co-contractant

L’article L. 541-10-2 du code de l’environnement dans sa rédaction issue de l’article 77 de la loi n° 2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte impose aux opérateurs de traitement de contracter : soit avec un éco-organismes agréés, soit avec systèmes individuels.

L’article R.543-200-1 du code de l’environnement, dans sa rédaction issue du décret n°2016-288 du 10 mars 2016, précise :

« II. – Un opérateur de gestion de déchets ne peut gérer des déchets d’équipements électriques et électroniques que s’il a conclu préalablement un contrat écrit relatif à la gestion de ces déchets :

« – soit avec un éco-organisme agréé dans les conditions définies aux articles R. 543-190 et R. 543-197 ;
« – soit avec un producteur ayant mis en place un système individuel approuvé dans les conditions définies à l’article R. 543-192 ou attesté dans les conditions définies à l’article R. 543-197-1 ;
« – soit, pour ce qui concerne un opérateur de collecte, de transit ou de regroupement, avec un opérateur de traitement, auquel il remet les déchets concernés, ayant lui-même conclu un contrat entrant dans le champ des deux alinéas précédents. Dans ce cas, l’opérateur de traitement fournit à l’opérateur de collecte, de transit ou de regroupement un document justificatif de l’existence et de l’adéquation du contrat. »

Aux termes de ces dispositions :

– un opérateur de traitement de D3E doit contracter directement : soit avec un éco-organisme, soit avec un système individuel

– un opérateur de collecte, de transit ou de regroupement doit contracter : soit avec un éco-organisme, soit avec un système individuel, soit avec un opérateur de traitement qui a lui-même contracté avec un éco-organisme ou un système individuel.

Les auteurs de l’article R.543-200-1 du code de l’environnement ont donc interprété l’article L.541-10-2 du code de l’environnement comme permettant de réaliser une chaine de contrats, jusqu’à un éco-organisme ou un système individuel.

Enfin, l’opérateur de gestion devra s’assurer que son cocontractant est bien compétent pour la catégorie de déchets pour laquelle il intervient. L’article R.543-200-1 précise en effet : « III. – Le contrat mentionné au II est conclu avec un éco-organisme agréé pour la catégorie de déchets concernés ou avec un producteur ayant mis en place un système individuel approuvé ou attesté pour les déchets concernés.« 

IV. Le contenu du contrat

Le contenu du contrat n’est pas laissé à l’appréciation des parties. L’article R.543-200-1 du code de l’environnement prévoit l’intervention d’un arrêt interministériel pour définir les dispositions et clauses minimales devant figurer dans les contrats » :

« IV. – Un arrêté conjoint des ministres chargés de l’environnement et de l’industrie définit les dispositions et clauses minimales devant figurer dans les contrats et les documents justificatifs mentionnés au I.« 

V. Le contrôle

L’article R.543-200-1 du code de l’environnement précise :

que tout opérateur concerné par cette obligation de contracter doit mettre à disposition des inspecteurs de l’environnement les contrats et documents justificatifs

« V. – Tout opérateur mentionné au II du présent article est tenu de présenter les contrats ou les documents justificatifs exigés à ce II, à la demande de tout inspecteur de l’environnement au sens du I de l’article L. 172-1.« 

Par ailleurs, ce même article organise la procédure sanction du défaut d’exécution de cette obligation de contracter :

« S’il est constaté qu’un opérateur mentionné au II gère des déchets sans disposer préalablement des contrats ou des justificatifs nécessaires, le préfet du département où exerce l’opérateur concerné l’avise des faits qui lui sont reprochés et de la sanction qu’il encourt. L’intéressé est mis à même de présenter ses observations, écrites ou orales, dans le délai d’un mois, le cas échéant, assisté d’un conseil ou représenté par un mandataire de son choix.

« Au terme de cette procédure, le préfet peut, par une décision motivée qui indique les voies et délais de recours, prononcer une amende administrative dont le montant tient compte de la gravité des manquements constatés et des avantages qui en sont retirés et qui ne peut excéder 750 € pour une personne physique et 3 750 € pour une personne morale par tonne de déchets d’équipements électriques et électroniques.

« La décision mentionne le délai et les modalités de paiement de l’amende. L’amende est recouvrée conformément aux dispositions du décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique. »

VI. Entrée en vigueur

L’article 77 de la loi du 17 août 2015 précise en effet que cette obligation de contracter, désormais définie à l’article L.541-10-2 du code de l’environnement « s’applique à compter du 1er janvier 2017 pour les déchets d’équipements électriques et électroniques professionnels. » 

Arnaud Gossement

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