En bref
Certificats d’économies d’énergie (CEE) : arrêté du 7 avril 2025 modifiant l’arrêté du 4 septembre 2014
Modification de l’arrêté tarifaire S21 : refonte majeure actée et à venir des conditions d’achat pour les installations sur toiture et ombrière inférieure ou égale à 500 kWc
Code minier : publication de l’arrêté du 3 avril 2025 soumettant les décisions d’octroi, d’extension ou de prolongation des concessions et permis exclusifs de recherches (PER) à évaluation environnementale
Déforestation importée : consultation publique sur un projet de règlement modifiant le règlement 2023/1115 (RDUE)
Projet de loi énergie – climat : le Gouvernement veut modifier certains objectifs de la politique nationale de l’énergie et du climat
Le Gouvernement vient d’adresser pour avis au Conseil économique, social et environnemental, l’article 1er du projet de loi énergie climat. Ce texte vise à modifier certains objectifs de la politique énergétique et climatique de la France. On notera notamment la suppression de l’objectif « facteur 4 » (diviser par quatre les émissions de gaz à effet de serre entre 1990 et 2050), l’introduction de l’objectif de « neutralité carbone », la modification de l’objectif de réduction de la consommation finale d’énergie, la modification de l’échéance de réduction de la part du nucléaire dans la production d’électricité.
Résumé
Le projet de loi que le Gouvernement élabore actuellement, modifie certains objectifs de la politique énergétique et climatique de la France
– il supprime l’objectif « facteur 4 » (diviser par quatre les émissions de gaz à effet de serre entre 1990 et 2050) et lui substitue un objectif bien plus imprécis juridiquement de « neutralité carbone ». Une suppression étonnante car il s’agissait de l’un des principaux acquis du Grenelle de l’environnement et d’une mesure phare de la loi de transition énergétique qui semblait faire consensus.
– il lui substitue un objectif de « neutralité carbone à l’horizon 2050 »
– il modifie l’objectif intermédiaire de réduction de la consommation énergétique : 17% et non plus 20% en 2030.
– il modifie l’objectif de réduction de la consommation énergétique primaire des énergies fossiles : de 40 %- et non plus plus de 30% – en 2030 par rapport à l’année de référence 2012.
– il modifie l’échéance de l’objectif de réduction de la part du nucléaire dans la production d’électricité : de 2025 à 2035. Cette modification démontre, comme notre cabinet l’a indiqué à plusieurs reprises, que la nouvelle programmation pluriannuelle de l’énergie ne peut pas être publié tant que la loi de 2015 relative à la transition énergétique n’est pas modifiée.
Le calendrier prévisionnel d’élaboration du projet de loi
– Le Conseil économique, social et environnemental doit remettre son avis au Gouvernement le 27 février 2019.
– Le Conseil d’Etat doit remettre son avis au Gouvernement le 29 février 2019
– Mi-mars : le projet de loi est présenté en Conseil des ministres puis déposé au Parlement où il doit être débattu en procédure d’urgence
– Ensuite : le Gouvernement est appelé à présenter un projet de décret relatif à la programmation pluriannuelle de l’énergie, lequel sera sans doute soumis à une procédure de consultation. Il est donc probable que la prochaine PPE ne soit publiée qu’en fin d’année.
La modification des objectifs de la politique énergétique et climatique de la France
L’article 1er du projet de loi « énergie climat » procède à modification de l’article L.100-4 du code de l’énergie :
1° Au 1°, les mots « de diviser par quatre les émissions de gaz à effet de serre entre 1990 et »
sont remplacés par les mots : « d’atteindre la neutralité carbone à l’horizon » ;
2° Au 2°, les mots : « objectif intermédiaire de 20% en 2030 » sont remplacés par les mots :
« objectif intermédiaire de 17% en 2030 » :
3° Au 3°, le taux : « 30% » est remplacé par le taux : « 40% » ;
4° Au 5°, l’année : « 2025 » est remplacé par l’année : « 2035 ».
Ainsi, si cet article 1er devait être voté sans modification, l’article L.100-4 du code de l’énergie serait alors ainsi rédigé :
« I. – La politique énergétique nationale a pour objectifs :
1° De réduire les émissions de gaz à effet de serre de 40 % entre 1990 et 2030 et de diviser par quatre les émissions de gaz à effet de serre entre 1990 et d’atteindre la neutralité carbone à l’horizon 2050. La trajectoire est précisée dans les budgets carbone mentionnés à l’article L. 222-1 A du code de l’environnement ;
2° De réduire la consommation énergétique finale de 50 % en 2050 par rapport à la référence 2012, en visant un objectif intermédiaire de 20 % en 2030 objectif intermédiaire de 17% en 2030. Cette dynamique soutient le développement d’une économie efficace en énergie, notamment dans les secteurs du bâtiment, des transports et de l’économie circulaire, et préserve la compétitivité et le développement du secteur industriel ;
3° De réduire la consommation énergétique primaire des énergies fossiles de 30 % 40 %en 2030 par rapport à l’année de référence 2012, en modulant cet objectif par énergie fossile en fonction du facteur d’émissions de gaz à effet de serre de chacune ;
4° De porter la part des énergies renouvelables à 23 % de la consommation finale brute d’énergie en 2020 et à 32 % de cette consommation en 2030 ; à cette date, pour parvenir à cet objectif, les énergies renouvelables doivent représenter 40 % de la production d’électricité, 38 % de la consommation finale de chaleur, 15 % de la consommation finale de carburant et 10 % de la consommation de gaz ;
5° De réduire la part du nucléaire dans la production d’électricité à 50 % à l’horizon 2025 2035;
6° De contribuer à l’atteinte des objectifs de réduction de la pollution atmosphérique prévus par le plan national de réduction des émissions de polluants atmosphériques défini à l’article L. 222-9 du code de l’environnement ;
7° De disposer d’un parc immobilier dont l’ensemble des bâtiments sont rénovés en fonction des normes » bâtiment basse consommation » ou assimilées, à l’horizon 2050, en menant une politique de rénovation thermique des logements concernant majoritairement les ménages aux revenus modestes ;
8° De parvenir à l’autonomie énergétique dans les départements d’outre-mer à l’horizon 2030, avec, comme objectif intermédiaire, 50 % d’énergies renouvelables à l’horizon 2020 ;
9° De multiplier par cinq la quantité de chaleur et de froid renouvelables et de récupération livrée par les réseaux de chaleur et de froid à l’horizon 2030. »
Sur la suppression de l’objectif « facteur 4 »
L’objectif « facteur 4 » impose à la France de diviser par quatre les émissions de gaz à effet de serre entre 1990 et 2050. Cité par plusieurs lois depuis 2005, il été introduit dans le code de l’énergie dans sa rédaction actuelle par la loi n° 2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte
Il s’agit d’un objectif majeur de la politique énergétique et climatique du pays. La suppression de cet objectif constitue un événement important pour la politique énergétique et le droit de l’énergie.
L’objectif « facteur 4 » devrait donc être remplacé par l’objectif « neutralité carbone ». Ce qui appelle les observations suivantes :
– l’objectif « neutralité carbone » n’est pas défini en droit et est susceptible d’interprétations diverses de la part des écologistes et scientifiques. Contrairement à une idée reçue, l’Accord de Paris ne propose pas de définition de la neutralité carbone mais son article 4 se rapproche de l’idée de neutralité climatique au moyen d’un engagement non contraignant des Etats entre eux.
– il est mentionné dans le « Plan climat » présenté par Nicolas Hulot, alors ministre de la transition écologique et solidaire en janvier 2018. Il est ainsi défini :
« Avec la loi de transition énergétique, la France avait pour objectif de diviser par 4 ses émissions de gaz à effet de serre d’ici 2050. Le Plan Climat intègre désormais de nouveaux objectifs : viser la neutralité des émissions de gaz à effet de serre à l’horizon 2050, c’est-à-dire trouver un équilibre entre les émissions de l’Homme et la capacité des écosystèmes à absorber du carbone.«
Nous passons ici d’une logique de seule réduction des émissions de gaz à effet de serre à une logique d’équilibre entre les émissions et les absorptions. Cette définition du « Plan climat » n’a toutefois aucune valeur juridique comme le « Plan climat » lui-même. A noter : le plan climat ne prévoyait pas d’effacer l’objectif « facteur 4 » mais plutôt d’insérer un nouvel objectif, celui de la neutralité carbone.
Faute d’une quelconque définition juridique de la « neutralité carbone », il conviendra de se référer aux termes de l’exposé des motifs du projet de loi pour avoir au moins connaissance de l’interprétation par le Gouvernement de cette notion
« Dans un contexte d’urgence à agir et en réponse à l’appel de l’Accord de Paris, le Gouvernement a rehaussé son ambition, en fixant au sein du Plan climat de juillet 2017 l’objectif d’atteindre la neutralité carbone à l’horizon 2050 à l’échelle du territoire national.
Dans les termes de l’accord de Paris, la neutralité carbone est entendue comme l’atteinte de l’équilibre entre les émissions de gaz à effet de serre et les absorptions anthropiques (c’est-àdire les absorptions par les écosystèmes gérés par l’homme tels que les forêts, les prairies, les sols agricoles et les zones humides, et par certains procédés industriels, tel que la capture et le stockage du carbone). En même temps que l’ambition de long terme a été renforcée, le bilan de la mise en œuvre de la SNBC sur la première période 2015-2018 a constaté que le premier budget carbone sera dépassé. » (nous soulignons).
L’exposé des motifs d’un projet de loi n’ayant pas de valeur normative, il est donc nécessaire que les parlementaires saisis de ce projet de loi aient à cœur de proposer une définition précise de cette notion de « neutralité carbone ». Un travail de précision d’autant plus nécessaire que la notion de neutralité carbone est imprécise sinon ambiguë lorsque l’on lit certaines communications.
Il conviendrait notamment de préciser :
– que cette notion n’intéresse pas que le dioxyde de carbone mais bien l’ensemble des gaz à effet de serre
– que cette notion suppose une réduction des émissions de gaz à effet de serre et non pas simplement leur compensation.
L’expression même « d’absoptions anthropiques » mériterait d’être précisé car la maturité, l’efficacité et la disponibilité de certaines techniques comme le CSC sont encore l’objet de débats.
En définitive, le Gouvernement propose au Parlement de remplacer un objectif précis, chiffré, daté et relatif à toutes les émissions de gaz à effet de serre, par un objectif reposant, pour l’heure, sur une notion imprécise et non définie et dont le lien avec la SNBC n’est même pas établi.
Sur la modification de l’échéance de l’objectif de réduction de la part du nucléaire dans dans la production d’électricité
Le projet de loi prévoit de modifier la loi de 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte de manière à reporter de 2025 à 2035 l’échéance de l’objectif de réduction de la part du nucléaire dans la production d’électricité à 50 %.
Cette modification confirme une analyse de notre cabinet : le décret relatif à la prochaine PPE ne peut être publié tant que la loi n’a pas été modifiée. Il convient donc d’attendre que le projet de loi énergie climat soit débattu puis voté avant que le projet de décret PPE ne puisse être à son tour instruit puis publié.
Arnaud Gossement
Avocat associé – Cabinet Gossement Avocats
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