En bref
Hydroélectricité : modifications des modalités d’expérimentation du dispositif du médiateur
Schéma d’aménagement et de gestion des eaux (SAGE) : Modification des dispositions relatives à l’élaboration, la modification et la révision des SAGE
Déchets : Assouplissement des conditions pour la reprise des déchets de construction par les distributeurs
Certificats d’économie d’énergie : Publication au JO de ce jour de l’arrêté du 18 novembre 2024 modifiant plusieurs textes règlementaires relatifs aux opérations standardisées d’économie d’énergie
Urbanisme : précisions sur l’appréciation de l’intérêt à agir du voisin contre un permis de construire (Conseil d’Etat)
Par une décision n°389798 du 13 avril 2016, le Conseil d’Etat a apporté d’importantes précisions quant à l’appréciation de l’intérêt à agir de l’auteur d’un recours contre un permis de construire, lorsque celui-ci fait état de sa qualité de voisin du projet. Une décision qui « tempère » l’interprétation qu’il convient d’avoir d’une jurisprudence de plus en plus rigoureuse quant à l’intérêt à agir de l’auteur d’un recours contre une autorisation d’urbanisme.
Alors que le droit et la jurisprudence se montrent de plus en plus rigoureux quant aux conditions de recevabilité des recours dirigés contre des autorisations d’urbanisme, la décision du 13 avril 2016 vient « tempérer » l’interprétation qu’il convient de faire de la jurisprudence administrative en cours de développement sur l’intérêt à agir du voisin.
En effet, cette décision rappelle que le voisin immédiat justifie « en principe » d’un intérêt à agir et qu’il ne lui est pas imposé de démontrer le caractère certain des atteintes que le projet litigieux peut porter à ses intérêts.
Pour mémoire, aux termes de l’article L. 600-1-2 du code de l’urbanisme, l’auteur du recours contre une autorisation d’urbanisme est tenu de démontrer son intérêt à agir et, partant, la recevabilité de son recours, par la preuve que le projet litigieux porte atteinte aux conditions d’occupation, d’utilisation ou de jouissance du bien qu’il détient ou occupe :
« Une personne autre que l’Etat, les collectivités territoriales ou leurs groupements ou une association n’est recevable à former un recours pour excès de pouvoir contre un permis de construire, de démolir ou d’aménager que si la construction, l’aménagement ou les travaux sont de nature à affecter directement les conditions d’occupation, d’utilisation ou de jouissance du bien qu’elle détient ou occupe régulièrement ou pour lequel elle bénéficie d’une promesse de vente, de bail, ou d’un contrat préliminaire mentionné à l’article L. 261-15 du code de la construction et de l’habitation « .
Depuis l’entrée en vigueur de ces dispositions, la jurisprudence administrative a évolué dans le sens d’une appréciation parfois rigoureuse de l’intérêt à agir de l’auteur d’un recours tendant à l’annulation d’une autorisation d’urbanisme.
Par arrêt n°387507 rendu ce 10 février 2016, le Conseil d’Etat a confirmé la portée de l’arrêt n°386121 du 10 juin 2015 : l’auteur du recours contre une autorisation d’urbanisme doit précisément démontrer son intérêt à agir. La preuve de l’atteinte à ses intérêts peut être rapportée par tous moyens. La seule production d’une attestation de propriété ne suffit pas.
La décision rendue ce 13 avril 2016 apporte de substantielles précisions quant aux conditions d’appréciation, par le juge administratif, de l’intérêt à agir du requérant :
« 2. Considérant qu’il résulte de ces dispositions qu’il appartient, en particulier, à tout requérant qui saisit le juge administratif d’un recours pour excès de pouvoir tendant à l’annulation d’un permis de construire, de démolir ou d’aménager, de préciser l’atteinte qu’il invoque pour justifier d’un intérêt lui donnant qualité pour agir, en faisant état de tous éléments suffisamment précis et étayés de nature à établir que cette atteinte est susceptible d’affecter directement les conditions d’occupation, d’utilisation ou de jouissance de son bien ; qu’il appartient au défendeur, s’il entend contester l’intérêt à agir du requérant, d’apporter tous éléments de nature à établir que les atteintes alléguées sont dépourvues de réalité ; que le juge de l’excès de pouvoir apprécie la recevabilité de la requête au vu des éléments ainsi versés au dossier par les parties, en écartant le cas échéant les allégations qu’il jugerait insuffisamment étayées mais sans pour autant exiger de l’auteur du recours qu’il apporte la preuve du caractère certain des atteintes qu’il invoque au soutien de la recevabilité de celui-ci ; qu’eu égard à sa situation particulière, le voisin immédiat justifie, en principe, d’un intérêt à agir lorsqu’il fait état devant le juge, qui statue au vu de l’ensemble des pièces du dossier, d’éléments relatifs à la nature, à l’importance ou à la localisation du projet de construction ; »
On retiendra de ce considérant de principe :
– que le juge administratif apprécie la recevabilité de la requête au vu des éléments ainsi versés au dossier par les parties, en écartant le cas échéant les allégations qu’il jugerait insuffisamment étayées
– que le juge n’exige pas exiger de l’auteur du recours qu’il apporte la preuve du caractère certain des atteintes qu’il invoque au soutien de la recevabilité de celui-ci ;
– que le voisin immédiat justifie, en principe, d’un intérêt à agir lorsqu’il fait état devant le juge, qui statue au vu de l’ensemble des pièces du dossier, d’éléments relatifs à la nature, à l’importance ou à la localisation du projet de construction ;
Cette décision du 13 avril 2016 rappelle donc que le principe demeure celui selon lequel le « voisin immédiat » justifie « en principe » d’un intérêt à agir. Toutefois, cet intérêt à agir ne peut être démontré par la seule mention de la qualité de voisin mais doit être corroboré par des éléments concrets. La preuve du caractère certain des atteintes du projet aux intérêts de ce voisin immédiat n’est pas requise.
C’est donc au cas par cas, au vu des éléments du dossier et des productions des parties, que le juge appréciera l’intérêt à agir du requérant. Il pourra, éventuellement, rejeter par ordonnance, un recours qui est manifestement irrecevable, faute de cette preuve de l’intérêt à agir.
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