En bref
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Un maire peut refuser le permis de construire d’un poulailler industriel en raison du manque d’eau, en tenant compte du changement climatique (jurisprudence cabinet)
[webinaire] 21 novembre 2025 : « Etat de droit et Environnement : le Conseil constitutionnel face aux reculs environnementaux » (La Fabrique écologique)
[colloque] 17 octobre 2025 : intervention d’Arnaud Gossement à la IXème édition des Journées Cambacérès sur « Justice et Environnement » organisées par la Cour d’appel et la Faculté de droit de Montpellier
Abeilles : publication arrêté du 20 novembre 2021 relatif à la protection des abeilles et des autres insectes pollinisateurs et à la préservation des services de pollinisation lors de l’utilisation des produits phytopharmaceutiques
Résumé
- L’arrêté du 20 novembre 2021 abroge le précédent arrêté du 28 novembre 2003 relatif aux conditions d’utilisation des insecticides et acaricides à usage agricole en vue de protéger les abeilles et autres insectes pollinisateurs. Cet arrêté du 28 novembre 2003 devait être révisé à la suite de deux avis rendus par l’ANSES.
- Il entre en vigueur le 1er janvier 2022 mais n’est pas nécessairement d’application immédiate aux produits bénéficiant d’une autorisation d’utilisation délivrée antérieurement.
- Il étend et complète la liste des définitions qui devront être utilisées pour l’exercice de la police des produits phytopharmaceutiques.
- Il étend à tous les produits phytopharmaceutiques le principe d’une évaluation de la possibilité d’utiliser un produit phytopharmaceutique pendant la période de floraison sur les cultures attractives pour les pollinisateurs et sur les zones de butinage au regard du risque pour les pollinisateurs (notice de l’arrêté).
- Il dispose que si le produit est autorisé par l’Anses pour un usage en floraison le traitement doit, sauf cas particulier, être réalisé dans les 2 heures qui précèdent le coucher du soleil et dans les 3 heures qui suivent le coucher du soleil.
- Il prévoit des mesures transitoires et un calendrier de mise en œuvre de ces nouvelles dispositions.
Base légale. L’arrêté du 20 novembre 2021 précise les pouvoirs de police de l’administration en matière d’utilisation de produits phytopharmaceutiques dans le but précis de mieux protéger les abeilles et insectes pollinisateurs.
Il est pris sur le fondement de l’article L.253-7 du code rural et de la pêche maritime qui attribue à l’Etat un pouvoir de police des produits phytopharmaceutiques. L’article L.253-7 dispose que l’administration « peut, dans l’intérêt de la santé publique ou de l’environnement, prendre toute mesure d’interdiction, de restriction ou de prescription particulière concernant la mise sur le marché, la délivrance, l’utilisation et la détention des produits mentionnés à l’article L. 253-1 du présent code et des semences traitées par ces produits. Elle en informe sans délai le directeur général de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail.«
Définitions. l’arrêté du 20 novembre 2021 comporte une liste étoffée de définitions au contenu plus précis que celle en vigueur depuis 2003.
L’arrêté du 28 novembre 2003 comportait la liste suivante (article 1er) :
« Aux fins du présent arrêté, on entend par :
« Abeilles », le groupe des apoïdes ;
« Exsudat », le miellat, sécrétion sucrée produite par les insectes sur les plantes, et le nectar extrafloral des plantes, qui sont récoltées par les abeilles ;
« Floraison », la période végétative s’étendant de l’ouverture des premières fleurs d’un groupement végétal jusqu’à la fin de la chute des pétales des dernières fleurs de ce même groupement« .
L’arrêté du 20 novembre 2021comporte la liste de de définitions suivantes (article 1er) :
« Aux fins du présent arrêté, on entend par :
« Abeilles » : abeilles domestiques, les abeilles sauvages et les bourdons ;
« Coucher du soleil » : heure définie par l’éphéméride du lieu le plus proche de l’implantation du lieu de traitement;
« Culture attractive » : une culture attractive est une culture qui, par sa nature, présente un attrait pour les abeilles ou d’autres insectes pollinisateurs. Ne sont pas considérées comme attractives au sens du présent arrêté les cultures qui figurent sur une liste publiée au Bulletin officiel du ministère chargé de l’agriculture ;
« Exsudat » : miellat, sécrétions sucrées produites par les plantes et nectar extra-floral des plantes, qui sont récoltés par les abeilles ou d’autres insectes pollinisateurs ;
« Floraison » : période végétative s’étendant de l’ouverture des premières fleurs à la chute des pétales des dernières fleurs ;
« Produits » : produits phytopharmaceutiques, à l’exception des produits d’éclaircissage, et leurs adjuvants mentionnés à l’article L. 253-1 du code rural et de la pêche maritime ;
« Registre » : registre relatif à l’utilisation des produits phytopharmaceutiques tel que prévu par l’arrêté du 16 juin 2009 relatif aux conditions dans lesquelles les exploitants mentionnés à l’article L. 257-1 du code rural et de la pêche maritime tiennent le registre mentionné par l’article 67 du règlement (CE) n° 1107/2009 du 21 octobre 2009 concernant la mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques ;
« Usage » : utilisation d’un produit phytopharmaceutique ou d’un adjuvant sur un végétal, un produit végétal ou une famille de végétaux, afin de lutter contre un organisme nuisible, un groupe d’organismes nuisibles, une maladie ou un groupe de maladies, selon une fonction et des modalités d’application bien définies, tel que répertorié par le catalogue mentionné au II de l’article D. 253-8 du code rural et de la pêche maritime ;
« Utilisation de produit » : toute application d’un produit phytopharmaceutique ou d’un adjuvant sur un cycle végétatif conformément à un usage autorisé, quel que soit le mode d’application et la partie de la plante faisant l’objet du traitement, à l’exception des applications définies en annexe 1 qui excluent toute exposition des pollinisateurs durant la floraison ;
« Zone de butinage » : à l’exclusion des cultures en production, une zone de butinage est un espace agricole ou non agricole occupé par un groupement végétal cultivé ou spontané, qui présente un intérêt manifeste pour les abeilles ou d’autres insectes pollinisateurs du fait de la présence de fleurs ou d’exsudats. Au sens du présent arrêté, les utilisations de produits sur les zones de butinage sont celles visant à traiter spécifiquement ces zones, indépendamment de l’utilisation sur les cultures en production. »
L’extension de l’interdiction de principe par la définition de la plage horaire d’utilisation. Il s’agit du point le plus sensible de l’arrêté du 20 novembre 2021 à propos duquel le débat est le plus vif.
L’arrêté du 28 novembre 2003 comportait le principe d’interdiction suivant (article 2) :
« En vue de protéger les abeilles et autres insectes pollinisateurs, les traitements réalisés au moyen d’insecticides et d’acaricides sont interdits durant toute la période de floraison, et pendant la période de production d’exsudats, quels que soient les produits et l’appareil applicateur utilisés, sur tous les peuplements forestiers et toutes les cultures visités par ces insectes.«
Aux termes de son avis du 5 juillet 2019, l’ANSES avait recommandé une modification de cette interdiction, en
« La question du renforcement des dispositions de cet arrêté du 28 novembre 2003 a fait l’objet d’une précédente saisine de l’Anses par la Direction générale de l’alimentation (DGAl) concernant sa révision. Un avis sur cette saisine (2013-SA-0234) avait été rendu par l’Anses le 31 mars 2014. L’Anses considère les précédentes recommandations émises comme toujours valables. L’Anses avait notamment estimé que seule la luminosité peut être proposée comme condition indicatrice de l’absence d’activité de butinage des abeilles domestiques. Ainsi il avait été recommandé qu’afin de garantir un délai suffisant entre l’application et le début de l’activité de butinage des abeilles domestiques, les traitements phytopharmaceutiques bénéficiant d’une dérogation à l’interdiction de traitement, ne soient appliqués ni en fin de nuit ni tôt le matin. Il conviendrait donc que, quelle que soit la culture concernée, les traitements phytopharmaceutiques bénéficiant d’une dérogation ne puissent être appliqués qu’après l’heure de coucher du soleil telle que définie par l’éphéméride et dans les trois heures suivantes, dans des conditions permettant d’assurer la sécurité et la santé des opérateurs.«
L’arrêté du 20 novembre 2021 complète le texte de cette interdiction en précisant une plage horaire au cours de laquelle les produits autorisés peuvent être utilisés (je souligne) :
« L’application sur une culture attractive en floraison ou sur une zone de butinage d’un produit autorisé en vertu de l’article 2 est réalisée dans les 2 heures qui précèdent le coucher du soleil et dans les 3 heures qui suivent le coucher du soleil.
Adaptation et suppression de l’interdiction de principe. L’arrêté du 20 novembre 2021 comporte plusieurs possibilités d’adaptation, de suppression ou de dérogation à l’interdiction de principe précitée.
1. Cette interdiction de principe peut faire l’objet d’une adaptation ou d’une suppression au cas par cas, en cas « de garanties équivalentes » à cette interdiction et après avis de l’ANSES (article 3) :
« Cette période peut être adaptée ou supprimée, selon des modalités apportant des garanties équivalentes en matière d’exposition des abeilles et autres pollinisateurs. Ces modalités seront définies en annexe après avis de l’Anses, notamment en vue de permettre des traitements le matin ou sous un seuil de température.«
2. La plage horaire d’utilisation peut être modifiée (article 5) :
« – si, en raison de l’activité exclusivement diurne des bio-agresseurs, le traitement réalisé au cours de la période définie à l’article 3 ne permet pas d’assurer une protection efficace de la culture traitée ;
– si, compte tenu du développement d’une maladie, l’efficacité d’un traitement fongicide est conditionnée par sa réalisation dans un délai contraint incompatible avec la période prévue à l’article 3.
Dans ces deux cas, l’application peut être réalisée sans contrainte horaire.
A titre temporaire, pour une période de huit mois à compter de la publication du présent arrêté, l’application peut aussi être réalisée sans contrainte horaire à condition que la température soit suffisamment basse pour éviter la présence d’abeille.
L’heure de début et l’heure de fin du traitement ainsi que le motif ayant motivé la modification de la période prévue à l’article 3 sont consignés dans le registre. »
Dispositions transitoires. L’article 8 de l’arrêté du 20 novembre 2021 est sans doute celui qui suscitera le plus de réactions. Il prévoit des dispositions transitoires pour l’application de l’interdiction de principe organisée aux articles 3 à 5 dudit arrêté.
En résumé, cette interdiction
- ne sera pas immédiatement applicable aux produits autorisés avant l’entrée en vigueur de l’arrêté ni même à ceux faisant l’objet d’un demande complète de renouvellement dans un délai de quatre ans
- mais dépendra de la capacité de l’ANSES a procéder à une évaluation des risques de ces produits au regard des nouvelles exigences des articles 3 à 5 précités.
A lire également :
La page dédiée à la consultation publique sur le projet d’arrêté
Les deux avis de l’ANSES publiés en novembre 2018 ainsi qu’en juillet 2019 :
https://www.gossement-avocats.com/wp-content/uploads/2021/11/PHYTO2018SA0147.pdf
https://www.gossement-avocats.com/wp-content/uploads/2021/11/PHYTO2019SA0097.pdf.
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