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Appels d’offres éolien en mer : le Gouvernement dépose un nouvel amendement pour revoir les résultats des appels d’offres organisés en 2011 et 2013 (Projet de loi État au service d’une société de confiance)
Par un amendement n°120 déposé à l’Assemblée nationale devant la Commission spéciale chargée d’examiner le projet de loi pour un État au service d’une société de confiance, ce 8 juin 2018 , le Gouvernement propose d’inscrire à l’article 34 de ce texte, une procédure d’amélioration des offres retenues ou d’abrogation des décisions d’attribution prises au terme des appels d’offres « éolien en mer » organisés en 2011 et 2013.
Pour mémoire, le 8 mars 2018, en première lecture, le Gouvernement avait déposé au Sénat un amendement destiné à permettre à l’Etat de renégocier les offres retenues au terme des appels d’offres « éolien en mer » organisés en 2011 et 2013. Au terme d’un débat très animé, l’amendement avait été rejeté en séance publique.
En nouvelle lecture, devant la commission spéciale chargée de chargée d’examiner le projet de loi pour un État au service d’une société de confiance, le Gouvernement a déposé, ce 8 juin 2018, un nouvel amendement, plus long et plus détaillé, dont le but premier est d’autoriser l’Etat a revoir les offres retenues au terme des appels d’offres organisés en 2011 et 2013.
Si cet amendement était adopté par les députés, l’article 34 du projet de loi serait alors composé des dispositions suivantes.
I. Dispositions relatives aux appels d’offres éolien en mer 2011 et 2013
Le but ici recherché par l’Etat est clairement défini dans l’exposé des motifs de l’amendement :
« A ce jour, aucun contrat d’obligation d’achat n’a été signé et aucune de ces installations n’est construite. Le tarif accordé à ces installations est très élevé (entre 180 et 230 euros/MWh) et ne correspond plus aux prix actuels de l’éolien en mer, entraînant des rémunérations excessives pour les candidats retenus.
Les prix des parcs éolien en mer ayant fortement baissé, l’État cherche à réduire le coût de soutien public des projets tout en confortant la filière.«
Le Gouvernement estime que les tarifs d’achat d’électricité des projets retenus par appels d’offres en 2011 et 2013 pourraient entraîner des « rémunérations excessives ». Cette prise de position de l’Etat est lourde de conséquences pour la filière de l’éolien en mer en particulier mais aussi pour la commande publique en général.
– Pour l’éolien en mer en particulier, cette déclaration du Gouvernement et l’amendement qu’il propose peuvent affecter le développement de la filière et contribuer au retard de réalisation des parcs éoliens en mer. A très court terme, cette remise en cause des objectifs de développement de l’éolien en mer appellera une révision de la programmation pluriannuelle de l’énergie, censée être finalisée ce mois-ci.
– Pour la commande publique en général, il n’est pas satisfaisant que l’Etat se donne le droit, en modifiant la loi, de remettre en cause le résultat d’appels d’offres, des années après adoption des décisions d’attribution. Cela peut altérer la confiance des candidats dans la signature des personnes publiques. Le principe de sécurité juridique est ici interrogé.
Sur le fond, cette procédure d’amélioration / abrogation est structurée de la manière suivante par l’amendement que le Gouvernement vient de déposer.
Etape 1 : Le ministre chargé de l’énergie peut demander une amélioration d’une offre retenue à l’issue d’un appel d’offres organisé en 2011 ou 2013
L’amendement précise : « VI. – Pour les procédures de mise en concurrence mentionnées à l’article L. 311‑10 du code de l’énergie relatives à des installations de production d’énergie renouvelable en mer dont le candidat retenu a été désigné avant le 1er janvier 2015 et pour lesquelles les contrats prévus à l’article L. 311‑12 du même code n’ont pas encore été conclus à la date d’entrée en vigueur de la présente loi, le ministre chargé de l’énergie peut demander, préalablement à la conclusion desdits contrats, au candidat retenu d’améliorer son offre, notamment en diminuant le montant du tarif d’achat, en modifiant les modalités de révision ou de versement de ce tarif ou en réduisant la puissance de l’installation, le cas échéant par dérogation à certaines dispositions du cahier des charges mentionné aux articles L. 311‑10‑1 et suivants du code de l’énergie.
Etape 2 : En cas d’accord avec le candidat retenu, l’acceptation de l’offre améliorée par le ministre chargé de l’énergie peut emporter mise à jour du cahier des charges. Le recours contre la décision d’acceptation de l’offre améliorée est porté devant le Conseil d’Etat, compétent en premier et dernier ressort.
L’amendement précise : « L’acceptation de l’offre améliorée par le ministre chargé de l’énergie emporte, en tant que de besoin, mise à jour du cahier des charges mentionné aux articles L. 311‑10‑1 et suivants du code de l’énergie et le contenu de cette offre améliorée s’impose au contrat que le candidat retenu conclut avec Électricité de France conformément à l’article L. 311‑12 du code de l’énergie.
Le Conseil d’État est compétent pour connaître en premier et dernier ressort des recours dirigés contre la décision du ministre chargé de l’énergie mentionné au second alinéa du VI. »
Etape 3 : en cas de désaccord avec le candidat retenu, la décision le désignant à l’issue de l’appel d’offres peut être abrogée par décret.
L’amendement précise : « VII. – Pour les procédures de mise en concurrence mentionnées à l’article L. 311‑10 du code de l’énergie relatives à des installations de production d’énergie renouvelable en mer dont le candidat retenu a été désigné avant le 1er janvier 2015 et pour lesquelles les contrats prévus à l’article L. 311‑12 du même code n’ont pas encore été conclus à la date d’entrée en vigueur de la présente loi, la décision de l’autorité administrative désignant le candidat retenu à l’issue de la procédure de mise en concurrence peut être abrogée par décret.
Etape 4 : l’abrogation de la décision d’attribution entraîne l’abrogation de l’autorisation d’exploiter et la résiliation de la convention de concession d’utilisation du domaine public maritime
L’amendement précise : « Cette abrogation entraîne l’abrogation de l’autorisation d’exploiter une installation de production d’électricité prévue par l’article L. 311‑1 du code de l’énergie et la résiliation de la convention de concession d’utilisation du domaine public maritime accordée en application de l’article L. 2124‑3 du code général de la propriété des personnes publiques qui est liée au projet, si une telle convention a déjà été conclue.
Etape 5 : le candidat dont la décision d’attribution est abrogée doit remettre ses études à l’Etat
L’amendement précise : « En cas d’abrogation de la décision désignant le candidat retenu, ce dernier remet au ministre chargé de l’énergie l’ensemble des études menées afin de réaliser son projet, ainsi que l’ensemble des données collectées sur le site ou relatives au site, en particulier les données météorologiques et de vent, météocéaniques, géotechniques et géophysiques et l’ensemble des données à caractère environnemental. »
Etape 6 : le candidat dont la décision d’attribution est abrogée a un droit à indemnisation
L’amendement précise quels sont les frais et coûts dont le candidat peut demander indemnisation : « En cas d’abrogation de la décision désignant le candidat retenu, ce dernier est indemnisé de l’ensemble des frais, dument justifiés et en relation directe avec le projet, exposés entre la date d’adoption de la décision désignant le candidat retenu et la date d’entrée en vigueur du décret d’abrogation mentionné aux alinéas précédents, après déduction des éventuelles subventions publiques versées. Les indemnisations relatives aux études mentionnées au précédent alinéa sont calculées sur la base des frais de réalisation des études dument justifiés.
L’indemnité comprend également, le cas échéant, les coûts raisonnables et dûment justifiés liés à la rupture des contrats conclus par le candidat retenu pour la réalisation du projet, dès lors que ces contrats ont été conclus à des conditions normales et que leur signature n’a pas été anticipée au-delà de ce qui était nécessaire pour satisfaire aux exigences du cahier des charges de la procédure de mise en concurrence.
Cette indemnité est exclusive de toute indemnité complémentaire, et notamment de l’indemnité contractuelle prévue en cas de résiliation de la convention de concession d’utilisation du domaine public maritime accordée en application de l’article L. 2124‑3 du code général de la propriété des personnes publiques.«
Etape 7 : lancement dans les six mois d’une nouvelle procédure de mise en concurrence
L’amendement précise : « En cas d’abrogation de la décision du ministre chargé de l’énergie désignant un candidat retenu à l’issue d’une procédure de mise en concurrence en application du premier alinéa du présent VII, le ministre chargé de l’énergie lance, dans un délai ne pouvant excéder six mois, une nouvelle procédure de mise en concurrence relative à des installations de production d’énergie renouvelable en mer d’une puissance au moins égale et sur la même zone géographique ou sur une zone géographique à proximité. »
Notre propos n’est pas ici d’analyser la légalité de ces dispositions. Toutefois, il convient de s’interroger sur le précédent que cet article 34 – s’il est adopté avec la rédaction proposée par l’amendement du Gouvernement – est susceptible de créer.
II. Dispositions relatives aux prochains appels d’offres éolien en mer
1. Organisation du débat public préalable aux procédures de mise en concurrence – saisine de la CNDP
2. Possibilité pour l’État de réaliser tout ou partie de l’étude d’impact
3. Possibilité pour le pétitionnaire de modifier les caractéristiques principales de son installation, au fil des autorisations requises
4. Possibilité pour l’Etat de définir des prescriptions et des mesures d’évitement, de réduction et de compensation associées portant sur des caractéristiques techniques variables au sein desquels le projet peut évoluer
5. Obligation d’un « porter à connaissance » des caractéristiques du projet tel qu’il aura été réalisé in fine.
6. Régime de sanctions au cas où le lauréat d’une procédure de mise en concurrence ne réaliserait pas le projet sans motif valable.
Arnaud Gossement
Avocat associé – Docteur en droit
Cabinet Gossement Avocats
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