Urbanisme / Evaluation environnementale : le Conseil d’Etat précise les conditions de mise en œuvre des articles L.122-1 et L.122-2 du code de l’environnement permettant la suspension, par le juge des référés, de l’exécution d’une décision administrative

Jan 7, 2019 | Droit de l'Urbanisme

Par un arrêt du 28 novembre 2018, n°419315, le Conseil d’Etat a apprécié l’application des articles L.122-1 et L. 122-2 du code de l’environnement aux termes desquels le juge des référés peut suspendre une décision administrative approuvant un projet de construction lorsque ce dernier n’a pas fait l’objet d’une évaluation environnementale.

Ce qu’il faut retenir

– Lorsqu’un projet de construction est susceptible d’avoir une incidence notable sur l’environnement, une évaluation environnementale est nécessaire.

– Cette évaluation est également exigée lorsque le projet inclut plusieurs travaux A défaut de cette évaluation, le juge des référés peut suspendre la décision administrative autorisant le projet.

– Toutefois, lorsqu’un PLU prévoit l’urbanisation de l’ensemble d’une zone et qu’au sein de cette même zone un projet de construction impactant l’environnement est autorisé par une décision administrative, seul ce projet doit faire l’objet d’une évaluation environnementale et non pas l’ensemble du projet d’urbanisation visé par le PLU.

Commentaire

En l’espèce, par un arrêté du 23 octobre 2017, un maire a accordé à la société X un permis d’aménager en vue de la création d’un lotissement de 18 lots sur la zone du C. Des particuliers et une association ont saisi le juge des référés du tribunal administratif de Nantes afin d’obtenir la suspension de l’exécution de cet arrêté.

Par une ordonnance du 13 mars 2018, le juge des référés a prononcé la suspension demandée au motif que le projet n’avait pas fait l’objet d’une évaluation environnementale conformément aux articles L. 122-1 et L.122-2 du code de l’environnement.

Conformément aux règles du contentieux administratif, la contestation d’une ordonnance de référé suspension est formée devant le Conseil d’Etat. Aussi, la commune et la société X ont formé un pourvoi en cassation contre cette ordonnance devant la Haute juridiction.

En premier lieu, le Conseil d’Etat rappelle les règles de droit applicables au cas d’espèce.

– De première part, aux termes de l’article L. 122-2 du code de l’environnement, en cas de demande de suspension d’une décision administrative approuvant un projet de construction dans le milieu naturel fondée sur une absence d’étude d’impact avérée, le juge des référés doit y faire droit.

– De deuxième part, aux termes de l’article L. 122-1 II du code de l’environnement, les projets qui ont une incidence notable sur l’environnement font l’objet d’une évaluation environnementale.

– De troisième part, le III de ce même article précise que lorsque le projet est constitué de plusieurs travaux il doit être appréhendé dans son ensemble y compris en cas de fractionnement dans le temps et dans l’espace et en cas de multiplicité des maîtres d’ouvrage, afin que ses incidences sur l’environnement soient évaluées dans leur globalité.

En deuxième lieu et en l’espèce, conformément à la notice de présentation, le PLU de la commune, devait être modifié afin d’ouvrir à l’urbanisation à l’ensemble de la zone du C.

Or, le projet autorisé par l’arrêté querellé ne devait être réalisé que sur un secteur de cette zone. Par voie de conséquence, l’absence d’évaluation environnementale pour l’ensemble de la zone ne justifie pas la suspension automatique de l’exécution de l’arrêté. Partant, l’ordonnance portant suspension de l’exécution de la décision administrative est annulée.

En conséquence, même si le PLU modifie une zone dans son intégralité et que le projet de lotissement faisant l’objet d’une autorisation litigieuse s’inscrit dans le cadre de cette modification, il n’y a pas lieu de considérer qu’il s’agit d’un projet constitué de plusieurs travaux devant faire l’objet d’une évaluation environnementale au sens de l’article L.122-2 du code de l’urbanisme. 

Isabelle Michel

Juriste en droit de l’environnement

Gossement Avocats

Vous avez apprécié cet article ? Partagez le sur les réseaux sociaux :

Découvrez le cabinet Gossement Avocats

Gossement Avocats est une référence dans ses domaines d’excellence :
droit de l’environnement, droit de l’énergie, droit de l’urbanisme, tant en droit public qu’en droit privé.

À lire également

Dérogation espèces protégées : l’administration n’est pas tenue de vérifier la fiabilité d’un dispositif anticollision prescrit par le juge administratif ou d’exiger le dépôt d’une demande de dérogation (Conseil d’Etat, 22 décembre 2025, n°497091 et 492940)

Dérogation espèces protégées : l’administration n’est pas tenue de vérifier la fiabilité d’un dispositif anticollision prescrit par le juge administratif ou d’exiger le dépôt d’une demande de dérogation (Conseil d’Etat, 22 décembre 2025, n°497091 et 492940)

Par deux décisions rendues ce 22 décembre 2025, le Conseil d'Etat a apporté d'importantes précisions relatives à la procédure d'autorisation de déroger à l'interdiction de destruction d'espèces protégées. En premier lieu, la Haute juridiction administrative a jugé que...

Charte de l’environnement : le juge judiciaire est compétent, à certaines conditions, pour statuer sur une demande de réparation du préjudice écologique causé par une activité autorisée (AMM) par l’administration (Cour de cassation, 13 novembre 2025, n°500 FS-B)

Charte de l’environnement : le juge judiciaire est compétent, à certaines conditions, pour statuer sur une demande de réparation du préjudice écologique causé par une activité autorisée (AMM) par l’administration (Cour de cassation, 13 novembre 2025, n°500 FS-B)

En cette année du vingtième anniversaire de la Charte de l'environnement, la Cour de cassation vient, pour la deuxième fois (cf. notre commentaire) d'en faire application. Mais d'une manière qui peut apparaître surprenante. Par un arrêt rendu ce 13 novembre 2025, la...

Dérogation espèces protégées : l’illégalité de l’autorisation d’exploiter une activité industrielle peut démontrer l’existence d’un « risque suffisamment caractérisé » imposant au préfet d’enjoindre au porteur de projet de déposer une demande de « dérogation espèces protégées » (TA Guyane, 11 décembre 2025, Association Guyane Nature Environnement, n°2201889)

Dérogation espèces protégées : l’illégalité de l’autorisation d’exploiter une activité industrielle peut démontrer l’existence d’un « risque suffisamment caractérisé » imposant au préfet d’enjoindre au porteur de projet de déposer une demande de « dérogation espèces protégées » (TA Guyane, 11 décembre 2025, Association Guyane Nature Environnement, n°2201889)

Par un jugement n°2201889 rendu ce 11 decembre 2025, le tribunal administratif de la Guyane a annulé, à la demande de l'association Guyane Nature Environnement, d'une part une autorisation d'exploiter une mine d'aurifère, d'autre part le refus du préfet d'ejoindre au...

Découvrez le cabinet Gossement Avocats

Notre Cabinet

Notre valeur ajoutée :
outre une parfaite connaissance du droit, nous contribuons à son élaboration et anticipons en permanence ses évolutions.

Nos Compétences

Gossement Avocats est une référence dans ses domaines d'excellence :
droit de l'environnement, droit de l'énergie, droit de l'urbanisme, tant en droit public qu'en droit privé.

Contact

Le cabinet dispose de bureaux à Paris, Rennes et intervient partout en France.